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  • La première f(a)ille

    Lors de mon passage au concours d'entrée à l'Ecole des Beaux-Arts de Saint-Etienne (je vous parle d'un temps...), j'étais un garçon pataud et complexé. M'intimidaient surtout les filles, toutes plus belles et sérieuses les unes que les autres. Sérieuses, oui. Belles mais glaçantes. Les impétrantes ne souriaient pas, le sourire devait avoir quelque chose de l'ordre de la soumission, de l'allégeance au système, enfin une idée comme ça. Bref, les filles étaient engagées, militantes, hautaines et austères. L'une des épreuves était la présentation d'un dossier. J'avais honte de mes petits dessins, mais enfin, le jury ne fut pas l'assemblée sarcastique et cruelle qu'on m'avait préparé à voir.
    Tout se passe bien. Je n'en mène pas large pour autant. En fin de journée, je revois une fille avec qui j'avais échangé quelques mots le matin. Belle brune, sévère, austère, etc. Vous avez compris. Elle vient de passer l'épreuve, je lui demande comment ça s'est passé. Elle ricane : « Ces cons ! Je leur ai montré des dessins politiques. Y'en a un qui m'a demandé ce que ça voulait dire ! Le con ! Je lui ai dit que s'il était pas capable de comprendre un dessin politique, fallait qu'il s'interroge, lui, pas moi. Ah, le con ! » J'étais très admiratif d'une telle force de caractère. Je n'osais rien ajouter, de peur qu'elle me montre les dessins et que je sois moi aussi, (si peu politisé à l'époque) rangé dans la même catégorie que le prof qui avait osé contrarier la jeune femme.
    Finalement, je fus reçu. Pas revu la fille. Les cons avaient renoncé à lui infliger leur ignorance crasse. J'ai commencé à questionner mes préjugés. Est-ce que quelqu'un qui a une grande gueule est forcément plus intelligent que moi ?