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La confession

Dans le car qui me ramène à la maison, les conversations des adolescents entre eux. Le lait de la tendresse humaine. Souvent, leurs paroles me traversent. J'abandonne ma lecture, j'écoute, ému. Il y a eu ce garçon, expliquant à une copine le mauvais sort qu'une petite bande a voulu lui faire, quelques jours plus tôt. « Il me dit Viens, je veux te parler , j'avais pas envie mais j'y vais, dans une petite rue comme ça. » « Mais tu y es allé ? C'était un piège et tu y es allé ? » « Ouais, c'était un piège mais j'étais coincé, j'y suis allé. Au fond de la petite rue. Ils étaient tous là. Cinq-six. Ils commencent à me prendre la tête, que j'ai dit des trucs sur eux, tout ça. Il fait venir sa copine. Elle dit : « Je sais plus ce qu'il a dit mais il m'a insultée de pute » « C'est vrai, tu lui as dit ça ? » « Ouais, peut-être, j'en sais rien, de toute façon c'est une pute. Ouais, je l'ai peut-être dit » (la fille à côté de lui pouffe, approuve le verdict) « Alors, l'autre il me donne des baffes. Je l'ai laissé faire. » « Tu l'as laissé faire ? » « Oui » « T'as raison. » « De toute façon, ils étaient six, si je me battais, ils me cassaient la tête. » « T'as raison. Qu'est-ce que t'as fait ? » « Ben je me suis mis à courir, j'ai couru, j'ai foutu le camp. Ils m'ont suivi. On a couru dans toute la ville. J'avais peur. » « Ils t'ont pas rattrapé ? » « Non. Ils ont dû me prendre pour une vraie fiotte. » (La fille pouffe à nouveau. Je sens dans sa réaction, un large sourire, une bienveillance. Aucun jugement. Elle est seulement heureuse que le garçon s'en soit tiré indemne). Je souris aussi. L'honnêteté de ce gamin, le tranquille détachement de son récit et son humour, me font apprécier ce que je crois lire comme une évolution de mentalité. A son âge, peut-être aurais-je fui, ce qui n'est pas sûr (il m'est arrivé de ces petits événements où je me découvrais un héroïsme imprévisible), mais en tout cas, jamais je n'aurais avoué ma fuite à une fille. Orgueil des petits mâles d'une époque révolue. Ou bien ai-je écouté le récit d'une exception.

Commentaires

  • ...je me souviens m'être battu en 5ème uniquement pour me défendre.
    Le proviseur adjoint de l'établissement ne voulait rien savoir qui des deux gamins avait cherché la m...de.
    Résultat: on a pris tous les deux et c'était limite que l'agresseur avait raison (il avait plein de copains lui).
    Ce souvenir d'injustice me suit encore malgré les années qui passent...
    d'autant qu'il m'avait défiguré, que j'étais méconnaissable.
    Ce jour-là j'aurai dû fermer ma gueule, j'aurai dû me laisser faire et tendre la joue alors peut-être, je n'aurais pas été sanctionné, n'est-ce pas ? ...

  • Impossible à dire, cher Fred2.

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