Depuis quelques mois, j'habite à une vingtaine de kilomètres de mon travail, j'ai donc opté -cohérence morale oblige- pour les transports en commun. Chaque matin, je me rends à pieds vers mon arrêt de bus, je m'installe confortablement parmi les gamins qui vont à l'école, stupéfaits et silencieux, et je bouquine ainsi une petite demi-heure jusqu'au terminus.
La société, toujours très protectrice, a décidé d'empêcher le chauffeur, suspect comme tous les chauffeurs de bus d'être secrètement alcoolique, de conduire en état d'ébriété. C'est fort bien. Il doit donc, chaque jour de travail, souffler dans un appareil qui détecte un taux d'alcoolémie trop important et bloque alors le démarrage du bus. Trop d'alcool : plus de car. Nous voici rassurés.
Un jour de cet été, le chauffeur est arrivé très en retard (c'était le bus du soir, celui qui me ramène dans mes pénates), il était furieux. C'est qu'il avait laissé, pendant la pause, l'alcootest derrière la vitre du bus. Le soleil a chauffé, chauffé, et a bousillé le subtil mécanisme. Le pauvre employé a eu beau souffler, souffler, déclarer main sur le coeur à la machine butée qu'il n'avait rien consommé, qu'il était réputé comme un modèle de sobriété, rien n'y a fait, le bus est resté imperturbablement aux ordres du petit bidule de plastique noir, qui ne voulait rien savoir. Il a fallu en appeler au "central", une équipe de techniciens est venu résoudre le souci, radicalement.
Depuis, je crois que le truc est carrément débranché. Le chauffeur roule en sifflotant, et nous, derrière, nous vivons dans la peur.
Commentaires
La politique donne aux choses des proportions délirantes. Et ce n'est pas aidé par leur manipulation rarement très lucide de la technologie.