Il m'effrayait déjà avant, mais quand il a conclu son premier discours de président par « Je ne vous trahirai pas », j'ai senti comme un frisson. Curieuse parole, improvisée celle-là, d'ailleurs, après la lecture de son texte, tandis qu'il levait les bras devant l'assemblée de ses fans. « Je ne vous trahirai pas », curieux, pourquoi ce besoin de le dire ? Pourquoi cet avertissement ? Pensait-il que, déjà, ses électeurs pourraient le croire susceptible de trahir ? De trahir qui, quoi ? Quels gens, quel concept, quelle idée ? N'était-ce pas en somme, une façon d'exorciser sa propre nature, de se convaincre lui-même que, pour une fois, cette-fois là, il ne ferait pas comme d'habitude, que cette-fois c'était du sérieux, qu'il était président bon sang de bois, et qu'il lui faudrait rester fidèle à ses engagements ? « Je ne vous trahirai pas », étrange, tout de même, de finir par cette phrase, lancée comme un salut. Etrange. Déclare-t-on à une femme qu'on rencontre : « Je ne te tromperai pas » ? La question ne se pose pas, a priori, à moins qu'on soit suspect à ses propres yeux, de rechuter. Si on éprouve le besoin d'en parler c'est que, me semble-t-il, la trahison germe et se contient, attend de trouver sa forme et de se manifester. On a vu, merci.