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Nuance

Dans notre ville accablée par le chômage et la précarité (30% de la population vit au dessous du seuil de pauvreté), il y a paradoxalement une grande concentration de propriétaires de Ferrari (125 personnes sont soumises à l'ISF). Mais comme ils ont honte – ou peur- ils ne les sortent que la nuit tombée, et même bien avancée. Vers trois heures du matin, en semaine, il n’est pas rare de voir deux Ferrari se croiser en klaxonnant. Dans leur lit, les pauvres sourient sur des rêves de viande hebdomadaire. Tous les deux ans à peu près, les Ferraristes, dans un surcroît de remords -qui leur permet aussi de montrer enfin leur réussite sans en éprouver de gêne-, organisent une exposition de leurs machines, dont les bénéfices vont aux associations caritatives locales (environ mille euros sur le week-end soit 400 euros pour chaque association). Cet argent aboutit peut-être dans les poches des plus miséreux sous la forme d’un centime chacun à peu près. Ce qui n’est pas suffisant pour assister à l’exposition suivante, qu’ils regardent par-delà les grilles. Pour l’heure, aucune amertume ne les pousse à sauter les barrières, à jeter un pavé sur les bolides. Parfois, un conducteur, dans la nuit propice, écrase un de ces pauvres. Cela mêle deux rouges à peine différenciés, mais l’automobiliste râle. Le ferrariste est très sensible aux nuances.

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