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le baiser de la mort

Vite passée dans le fourmillement médiatique -mais néanmoins assez largement relayée- cette information, ce fait divers qui fustigea une visiteuse de musée à Avignon, artiste elle-même, tellement enamourée d'un tableau de Twombly, qu'elle y posa les lèvres.

Une trace de rouge à lèvres, le peintre s'est dit "horrifié" (connard), et voici un procès exemplaire.

Je travaille dans un musée, au contact permanent des oeuvres. Je peux vous dire qu'une telle agression, immédiatement repérée, vite nettoyée par un restaurateur, malgré la nocivité des graisses qui constituent le rouge à lèvres, n'a rien de catastrophique.

La vandale va sûrement (je n'ai pas suivi l'affaire jusqu'au bout) écoper d'une méchante amende. L'exemplarité, toujours.

J'ai pour ma part toujours en tête la destruction par des paysans enragés du parlement de Bretagne en 1994. Une merveille architecturale, avec ses tableaux, ses tapisseries (la plupart sauvées mais tout de même...), des sculptures, ses plafonds, ses ors... Un procès ? On cherche les coupables ? Non. Et notre hyperprésident -à l'époque où il ne traitait pas encore les bretons de connards- qui s'empresse même de bénir les incendiaires, en disant qu'il les comprend. Il n'a jamais compris la colère des pyromanes de banlieue, par contre.

Je ne m'énerve pas, j'explique.

Commentaires

  • Le pire dans l'histoire étant que la bougresse s'en tire sans rien, vu que l'artiste a revu sa position, trouvant génial que son oeuvre ait été modifiée par une spectatrice. Au passage, on notera la formidable publicité qui a été faite pour son expo, qui a gagné des centaines de visiteurs grâce à l'intervention de l'iconoclaste. Laquelle a d'ailleurs ouvert un site internet et se fait des couilles en or grâce aux différentes interviews qu'elle donne... Je vais venir cracher sur un Debré, vous aurez certainement des retombées médiatiques!

  • Pour ma part, tu m'apprends que Twombly est revenu sur sa réaction première... et j'en suis ravi. Il ne s'agissait pas, à mon sens, d'une dégradation, mais cela fait maintenant partie de l'histoire de l'oeuvre. Et si chacun a pu en retirer quelque chose... Y compris un peu de sous (mais c'est tellement fugace) pour la fille, qui est RMiste (rappelons-le), et bien tant mieux (de toute façon, Twombly n'a pas particulièrement besoin de publicité, il me semble). Cracher sur un tableau ? Pour le Twombly, il y avait un acte d'amour, un élan complice. C'était défendable. Comme j'aurais aimé qu'un jour, à l'époque où je peignais, une femme vienne poser un baiser sur un de mes tableaux ! Je ne l'aurais jamais nettoyé, tu peux en être sûr. Et j'en garderais le souvenir chéri.

  • Pour illustrer mon propos, me vient l'exemple du piano enveloppé de feutre de Joseph Beuys.
    L'artiste avait donc enveloppé un piano à queue d'un feutre gris marqué d'une croix rouge, qui ne laissait deviner que la forme de l'instrument. Le nombreux public a, pendant des années, touché le tissu pour vérifier s'il y avait bien un piano sous le feutre. Petit à petit, l'usure a été telle que le musée (Pompidou je crois, mais pas sûr) a demandé à Beuys de refaire la couverture. Dans un premier temps, il a refusé, parce que cette dégradation faisait partie de l'histoire de l'oeuvre, selon lui. Lorsque tout de même, plus tard, l'état du feutre devint vraiment pitoyable, le musée réitéra sa demande, et Beuys finit par accepter, à une condition : que la "peau" de feutre précédente, soit accrochée au mur, pendue à proximité du piano dans sa nouvelle mue. Toute "dégradation" n'est pas une hérésie ou un blasphème. Mais il faut être un artiste intelligent (et vivant) pour le comprendre. C'est pourquoi je suis très heureux que Twombly soit revenu sur sa décision première -à mon sens inspirée par un entourage prompt à être "plus royaliste que le roi" et surtout avide de gagner un procès.
    Pour le reste, attention : je situe ces exemples dans le cas où l'artiste est encore vivant et peut lui-même déterminer s'il y a ou non matière à s'offusquer. Dans le cas des oeuvres du patrimoine, et surtout du patrimoine ancien, nous sommes dans un cas de figure très différent. Le rôle des conservateurs est de "conserver", ce qui peut d'ailleurs mener au paradoxe qu'on n'expose plus une oeuvre, trop fragile. Se pose alors une nouvelle question : quel est l'intérêt d'une oeuvre cachée ?

  • Touché! Je connaissais cette histoire du piano, tu t'en douteras, c'est ma chérie qui me l'avait racontée.
    Pour le reste, je me suis un peu emballé mais cette histoire m'a vraiment énervé. Et je m'explique. Quand on lit les interviews des personnages concernés, à savoir l'artiste et la demoiselle enivrée par la puissance du tableau, on se demande ce qu'ils ont réellement dans la tête. Une semaine, Twonbly est offusqué et porte plainte, l'autre semaine, il trouve cela génial et se ravise. Quant à la jeune femme, on dira qu'elle a certainement été dépassée par son acte et qu'elle tente de fournir des explications à son geste. "Je suis moi aussi artiste" a-t-elle dit(si elle est rmiste et que ce geste lui rapporte du fric, tant mieux effectivement).
    Toute cette histoire est un détournement, pour un truc qui aurait pu être nettoyé trés rapidement en effet.
    Et je n'irai pas craché sur un Debré. Ca serait trés con et puis j'aime bien ce qu'il a fait ce gars. Je sais toujours pas pourquoi, mais j'aime bien.
    Quant à la question de l'intérêt d'une oeuvre cachée, vaste débat auquel je répondrai quand j'aurai réfléchi.

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