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17 : 23 (sixième et dernière partie)

Il arrivait chez lui. La vingt-troisième minute expira quand il stoppa le moteur. Il savait que son portable, à cause de son décalage, égrenait une autre vingt-troisième minute, déroulait un temps différent et comme regagné sur le temps écoulé. Un bégaiement de soixante secondes. Un enfer renouvelé. Autour de la voiture dans laquelle il restait, rien de particulier, aucun danger en vue. L'image de la mort dans son cauchemar et la sensation de son invite silencieuse lui revinrent, mais comme estompées, une impression qui s'évapore. Il se concentra sur le silence, dans l'habitacle. Sa méditation le rendait sensible à l'infime déclenchement de l'aiguille des secondes sous la protection du verre, aux rumeurs lointaines de la ville, aux passages de moineaux insolents. Il éprouva la texture du volant sous sa main, se souvint qu'il avait voulu un temps, l'envelopper de cuir, ce qui lui parut soudain idiot. La pendule du tableau de bord, enfin, afficha 17 : 25. Il osa cette fois sortir son téléphone de la poche et l'allumer. Après l'animation du logotype sur l'écran apparut l'heure certifiée. 17 : 24. Il se rencogna dans son fauteuil, respira. Après un temps, s'autorisa à sortir. Dehors, debout, appuyé contre sa voiture, il huma l'air doux, y décela les parfums de chèvrefeuille ; le bleu rosé du ciel s'était dégradé pour s'assourdir et se nuancer d'un gris soyeux ; très haut, des martinets croisaient leurs trajectoires virtuoses ; l'herbe de la pelouse réfléchissait dans l'air la lumière d'un vert frais. Il pensa que son père lui avait apporté des légumes du jardin, la veille. Des tomates, des poivrons, des oignons, du piment, des échalotes, du cerfeuil... Longtemps qu'il n'avait pas pris le temps de préparer un bon repas avant que sa femme et les enfants ne rentrent. Il entra chez lui, résolu à faire un peu de cuisine.

Fin

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