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Psychopompe J-8

Modeste Lebecq s'est heureusement arrêté d'écrire après l'insuccès de son deuxième livre, non pas qu'il ait renoncé à croire en son talent, mais parce que le tirage de ses premiers travaux, financés par la bienveillance de sa mère, et dont il avait mal mesuré les potentialités, encombrait sa maison pourtant vaste, d'un grand stock de cartons pleins et lourds. Lourds, car Modeste Lebecq aimait le beau papier. Sa prose amusante, par laquelle il exhibait son goût des truismes et des clichés, ainsi que sa méconnaissance satisfaite de la syntaxe et du vocabulaire, lui paraissait magnifiée par une impression de qualité, sur un Arches dispendieux et rigide. Cependant, s'il fut brièvement conscient de son incompétence éditoriale, Modeste Lebecq n'en resta pas moins convaincu de son talent d'écrivain, qu'aucun de ses amis n'eut le courage de démentir, sous le prétexte discutable que « ça ne fait de mal à personne ». Et encore moins sa mère, coupable d'avoir même soutenu ce regrettable penchant. Au lendemain de sa mort, après qu'on l'ait trouvé, écrasé sous une pile de cartons effondrés, on découvrit que l'auteur préparait en secret un nouveau désastre, le chef d'œuvre de sa vie, un énorme polar inspiré de la série X Files, où un curé et une militante cégétiste s'épaulent pour lutter contre un criminel en série qui s'avère finalement être un extraterrestre. En plus de cette intrigue originale, le cadre de l'action avait toutes les chances de séduire le public restreint et fidèle de son cercle d'amis et parents, puisque l'invasion commençait du côté de Saint-Bécaud, son village natal. Une souscription infructueuse a été lancée par sa mère, dans le but d'éditer l'œuvre posthume, bien qu'inachevée – semble-t-il, ou bien votre serviteur, qui a eu la chance de s'en procurer une copie, n'a-t-il pas bien compris la fin.

 

La suite dans Le Psychopompe, signature le 24 avril à Roanne (Loire)

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