Je me rends bien compte écrit Lionel Gizant dans son journal, je me rends bien compte que mes collègues sont gentils avec moi. C'est vrai, tous l'aiment bien, malgré ses coups de gueule – des coups de gueule pour rien, café renversé, faute d'orthographe dans une note, mépris pour les échecs, ça les fait rire, en fait – parce qu'il ne représente aucun danger pour eux. Aucune trahison ne viendra de lui, aucune envie d'en découdre, pas d'exigence sur la façon dont ils devraient faire leur métier, ils aiment aussi sa disponibilité pour les vacances, les nuits, les dimanches... et ses supérieurs apprécient qu'il obéisse sans discuter malgré son âge, qu'il ne plaigne aucune heure de trop, sans revendication. Tout le monde aime surtout qu'il se fiche de paraître et soit beau pourtant, les femmes trouvent sa désinvolture séduisante. Il sait, il comprend, il se voit dans la vie, incarnant le stéréotype du flic désabusé, dans les films qu'il aime. D'une certaine façon, les films l'ont renseigné sur qui il est, Bogart lui a peut-être même montré le héros sans héroïsme qu'il serait – qu'il est en train de devenir. Il y a une part de vérité dans le cliché.
La suite dans Le Psychopompe, signature le 24 avril à la libraire Lauxerois, rue Charles-de-gaulle à Roanne (Loire) dès 14 heures.