Le contenu de ce billet pourra paraître extrêmement prétentieux, mais je viens de comprendre un principe assez étrange. A la relecture d’un manuscrit relativement ancien que je m’apprête à envoyer chez un éditeur, le considérant avec ce mélange d’innocence et de vigilance qui conduit le travail critique d’un texte qu’on a –non pas oublié- mais rangé plus ou moins dans la catégorie des livres publiables à revoir, je me suis aperçu que certaines idées, certaines réflexions esquissées par les personnages, sont (je rougis, la prétention arrive, attention), plutôt bien vues, assez originales et pour tout dire, dépassant la hauteur de pensée qui est généralement la mienne. Ce que je veux dire c’est qu’il m’apparaît que les livres sont plus intelligents que leurs auteurs. C’est un mystère, ça, tout de même. Comment, dans un cerveau à peu près normé tel que le mien, peuvent s’échapper des formes qui me dépassent, qui m’enseignent des idées, neuves pour moi-même ? S’il y a une réponse, je serais tenté de la trouver tout simplement dans le temps de maturation extraordinaire qu’est celui d’un texte littéraire. A force de se pencher sur chaque virgule, de réfléchir à l’attitude du moindre personnage, d’entrer dans sa vie et dans ses émotions, à force de revenir et revenir sur une idée, jour et nuit (blanche), des heures et des heures sur une phrase parfois, sur une bribe, un embryon d’idée qui vient de nous traverser, il me semble que nous finissons par produire une pensée plus élaborée que celle qui, d’habitude, nous sert à communiquer avec les autres. C’est peut-être pour cela aussi, qu’un auteur n’a pas toujours les clés pour expliquer son œuvre. Parce qu’elle est issue d’un autre, meilleur que lui-même.
Commentaires
Oui, je crois simplement que c'est le fruit du travail, le temps passé inlassablement à chercher la meilleure solution, l'acharnement à vouloir trouver ce qui sera juste qui fait qu'un labeur fini, posé, mis dans un placard peut nous paraître bon voire très bon quand on le reprend avec un œil neuf, à jeun, vierge de cette concentration et de ces heures passées à chercher.
Ça n'est pas prétentieux, comme tu le dis, c'est presque un regard sur le travail d'un autre nous-même.
Que dire sinon "j'acquiesce"?