Ce que les gens sont décevants ! La tricherie, la duperie, tout ça ne leur fait ni chaud ni froid s'ils sont persuadés que la situation l'exige, s'ils pensent qu'il vaut mieux un tyran que la délicatesse de la démocratie. Toujours ce fantasme de l'homme providentiel. Je crois que les peuples se fatiguent, qu'à un moment de leur histoire, ils en ont assez qu'on les sollicite pour concevoir leur propre futur, exercice éminemment complexe, angoissant. Alors ils délèguent cette peine à ceux qui en feront quelque chose de compréhensible, d'évident. Cela ressemble à l'attitude des soldats dans la guerre. Plutôt charger, attaquer, foncer, plutôt risquer la mort que d'attendre la fusillade, l'inconnu, l'ennemi embusqué. Tout plutôt que l'angoisse. Et puis la tyrannie donne la sensation d'une certaine égalité pour les plus humbles. Ils se disent que, à partir de là, tout le monde est dans la merde, comme eux. Voilà, les dictatures naissent de prurits insupportables, quand on préfère se gratter au sang plutôt que de subir l'agacement de la démangeaison. Qu'importe ce qui arrivera : ça soulage. C'est assez romantique, en fait, ce désir d'assouvissement d'un besoin, comme la consommation d'une passion, trop puissante pour être retardée.
Extrait d'un scénar de BD en cours. "Renzo et le tyran"
(et c'est la 1800 ème note)
Commentaires
Euh, ça va rentrer dans une bulle?
Et c'est juste un extrait ! Mais c'est un premier jet, promis, je vais synthétiser.
Après relecture plus (très) attentive, j'adore. J'ai les images qui viennent. Je ne sais de quelle scène ni à quel moment ça sort mais ouh que j'ai hâte!
C'est planche 33. Le texte se distribue sur toute la planche (tu vois, il y a de la place). Content que ça te plaise; Il y aura plusieurs passages de cette nature dans cette seconde partie.