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En 1889, donc, si l'on se réfère à la maquette de l'exposition universelle, le Furan est sous contrôle mais bien visible depuis le ciel. À partir de là, il ne faudra pas plus d'une douzaine d'années pour qu'il disparaisse tout à fait : au début du XXe siècle, il est couvert sur la totalité du centre-ville, ainsi que les biefs et tout le système hydrographique souterrain. Les citoyens perdent le contact avec leur rivière, avec l'eau qui circule sous leurs pas. Ils ne la redécouvrent qu'à cent ans de là, brièvement, à l'occasion des travaux de 2005, notamment place du Peuple (le Pré de Foire médiéval, souvenez-vous), quand on défonce la chaussée, qu'on renforce les voûtes des XVIIe-XVIIIe. Comme je regrette de n'avoir pas visité la ville à ce moment-là ! Le Furan réapparaît ; les Stéphanois redeviennent des riverains. S'en trouvent diversement charmés. On s'émerveille et on grimace, le souvenir de cette période de dévoilement inspire à des témoins le geste de se pincer le nez. Peut-être que le citadin moderne est plus sensible que celui du passé. Les Stéphanois d'antan affrontaient quotidiennement les effluves d'un cours dans lequel, par exemple, les boucheries et triperies du quartier des Gauds (place des Ursules, actuel cours Victor Hugo), jetaient leurs immondices. Il arriva même qu'on se réjouisse de lire, dans la pollution de la rivière, les signes de la bonne santé économique de la ville : « Le Furan roule ses eaux usées sous le pavé de la cité. Et le parfum qui s'en exhale sent la sueur, c'est sa fierté », écrit Marius Bailly, qui poétisait quand il ne chroniquait pas pour la presse régionale. Alors, l'odeur sale du Furan de 2005, en comparaison… L'assainissement de la rivière, programmé dès 1991, avait quelque retard : il était en fait à peine commencé à l'époque de ces travaux. L'état s'était amélioré sensiblement depuis les épidémies de typhoïde de 1857, mais les choses ont-elles changé à l'époque moderne ? Un rapport de l'institut Pasteur, en 1976 (c'est récent et déjà bien loin, je réalise que ce sont les temps de mon adolescence), décrit une eau chargée en produits toxiques, hydrocarbures, détergents... Un milieu « profondément pollué » au sortir de la zone urbaine. Alors qu'au Bessat, à la source, l'eau du Furan est qualifiée dans le même document de « fraîche, rapide, bien oxygénée ». En 2004, la station du Porchon ne dépolluait que la moitié des eaux du Furan. À l'heure où j'écris ces lignes, en 2018, nous devrions avoir atteint le « bon état écologique et chimique » exigé par les directives européennes, puisque l'échéance pour y parvenir était fixée par Bruxelles à 2015.

 

Extrait de "à propos de Saint-Etienne", écriture en cours.

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