En Afrique du sud, un jour de 1925, on découvrit ce galet à côté des ossements d'un australopithèque. Caprice naturel, sa forme évoque un visage. Les yeux, la bouche entrouverte sur une denture équivoque (riante ou menaçante)… même sa composition de jaspe rouge foncé pouvait paraître à son propriétaire une imitation de la couleur de sa peau. Ce qu'il est essentiel de rappeler, c'est que l'australopithèque est un hominidé qui a vécu il y a entre trois et quatre millions d'années, soit un ancêtre lointain et possiblement non-direct, à peine un cousin éloigné, une autre humanité disparue sans que nous en ayons hérité le moindre caractère. Sauf que… le galet de Makapansgat témoigne à l'évidence d'une pensée symbolique. Ce que sous-entend cette approche est vertigineux : la pensée symbolique serait une construction inhérente au genre hominidé, sapiens ou pas, et née avec l'origine de notre espèce. Ce n'est pas une conquête de notre cerveau, nous avons hérité de l'art sans le moindre effort et ceux qui nous ont précédés, qui ont peut-être cohabité avec nos propres ancêtres, en possédaient également le sens. L'abstraction était dans notre berceau, un cadeau dont nous avons mêlé les possibles usages : l'art et la religion, puisque les deux sont affaire de symboles, essentiellement. Plusieurs millions d'années… Sommes-nous parvenus au stade où nous pourrions enfin démêler les conséquences d'un tel héritage ?