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  • Se sentir NU

    Février étant particulièrement court, il nous arrive comme un flash la révélation que, mardi, nous serons à un mois de la représentation de "Peindre". Je flippe, certes, mais j'en connais qui commencent à sentir se nouer gorge et tripes face à l'échéance. C'est à se demander ce que nous avons fichu jusque là, bon sang ! Pourtant, pourtant...

    Je promets que ce sera beau. Je promets que ce sera surprenant. Je promets que ce sera riche et vivant.

    Je ne promets pas qu'on sera tout-à-fait prêt. Mais enfin.

  • La poncée du jour

    Quand on commence à trouver plus de plaisir à poncer un parquet qu'à écrire un livre, il faut commencer à s'interroger sur son statut d'écrivant. Ou en tout cas, sur l'intérêt de ce qu'on écrit.

  • La carte qui raconte et le territoire qui veut parler

    La carte et le territoire
    de Michel Houellebecq


    Ce soir, à l'espace Noirot de Villerest, rencontre littéraire autour du dernier roman de Michel Houellebecq. L'imminence de cette rencontre, animée par un ami, fin lecteur et habile manipulateur de passerelles sémantiques et de paradoxes, m'a obligé à noter quelques idées sur ce roman et, puisque le sommeil ne vient pas, à les reprendre ici pour les soumettre à votre réflexion.

    Je ne prends pas la peine de résumer l'intrigue : vous la connaissez ou bien vous la trouverez sur le net. J'ai lu ce livre dès sa sortie, avant sa consécration annoncée au Goncourt. C'est effectivement plutôt un bon Goncourt, ni plus ni moins mauvais que ses prédécesseurs. C'est un bon livre, riche, fluide, intelligent (mais est-il pour autant pertinent ? Je crois que non et je vais tâcher de dire pourquoi en conclusion de cette petite chronique). Le style ? Houellebecq est dans la post-littérature, il écrit sans amour et sans dandysme littéraire, sans lyrisme. S'il va au bout de sa logique (ne doutons pas qu'il récidivera ses échappées vers le cinéma), il abandonnera cette forme vieille qu'est le roman pour autre chose : une littérature orale, une expression détachée de l'activité scripturaire. Cela n'empêche que « la carte et le territoire » est un bon roman. Pourtant, si les deux premières parties sont excellentes, vraiment, la troisième est d'une telle fadeur, d'une telle innocuité, que je continue de m'interroger. N'y aurait-il pas quelque malignité cachée dans cette apparente vacuité ? On est assez proche de la démarche des photos que fait Jed des objets à ses débuts : la neutralité de leur représentation frise l'étrangeté.

    Houellebecq est pour moi -et c'est ce que j'aime en lui (si tant est qu'on puisse « aimer » un tel auteur et ses livres)- un auteur qui aiguillonne, précipite, dérange, agace, annonce. Me voici bien désemparé. La carte et le territoire, présenté comme son ouvrage le plus abouti, le plus accompli, est aussi le plus gentil, le plus policé, le plus inoffensif, le moins subversif. J'allais dire : un roman normal, comme il s'en produit beaucoup. Une critique sur le monde de l'art ? Même pas : c'est bien mal connaître le monde de l'art contemporain pour voir dans le portrait que l'auteur en fait autre chose qu'un simple constat. La démarche du peintre Jed Martin avec ses déclinaisons sont même plutôt intéressantes et bien vues. Une critique de la télé people et autre poncifs ? La charge serait bien légère. Sarcastique, oui, mais sans goût de la destruction. MH, qu'as-tu fait de tes crocs ?

    Ce qui reste, au bout du compte, de la lecture ? Deux choses : l'idée géniale d'intégrer un Houellebecq personnage de roman. Idée magnifiquement conduite, donnée avec panache et humour.  Une réussite. Et puis, et puis, justement, l'exploration du thème porté par le titre : la carte, le territoire. La carte plus passionnante, plus chargée de vérité et d'enseignements que le territoire. La carte qui dit plus que le lieu. Il n'est donc pas surprenant de se trouver confronté, à plusieurs moments du livre, aux fameuses notices Wikipédia. C'est qu'elles ont le même projet : définir un lieu, le décrire, le vider de sa substance par le simple effet de survol. En dire assez pour prouver l'existence d'un lieu et par là, créer un champ de possibles. Le lieu décrit, le lieu donné par l'activité descriptive, qu'elle soit cartographique ou scripturaire, a autant de réalité que le vrai. Souvenons-nous que Marco Polo, de retour de Chine, fut pris pour fou et que Jules Verne n'a pas bougé de chez lui pour écrire des récits de voyage auxquels plusieurs générations ont prêté foi. Le récit du lieu vaut le lieu, pour qui n'y est pas allé... et peut-être aussi pour qui s'en détache à force d'isolement. Des tyrans en ont fait récemment l'amère expérience, en découvrant que leur territoire avait une réalité. A ce titre, on peut imaginer que Houellebecq est en retard d'une époque. Il a considéré la virtualité du monde, façon Google earth, comme une donnée majeure du XXIème siècle. Nous assistons peut-être, en ce moment-même, à l'inverse exact. C'est bien ce que je disais : Houellebecq n'annonce plus rien et a perdu ses crocs.

    Pour explorer encore le thème de la carte et du territoire, je vous suggère deux lectures :
    Pfitz d'Andrew Crumey
    La frontière invisible de Fr. Schuiten et Benoît Peeters

  • Peindre NU

    Ce n'est pas une bande-annonce, ce n'est pas un extrait, c'est autre chose. Heureusement, l'anglais vient à notre secours pour nous proposer le mot "teaser". Voici donc le premier teaser de la pièce PEINDRE, présentée le 2 avril au Théâtre de Roanne (scène régionale). C'est sur le site (très beau) de NU laboratoire-Compagnie. On le doit à Jérôme Bodon-Clair et à Marc Bonnetin.

     

    Et c'était la 901ème note de Kronix, au passage.

  • L'heure de la lecture

    L'heure du Roi

        Dès la quatrième de couverture, le lecteur est sommé d’adorer un livre qu’on présente comme un grand livre et par ailleurs comme « le plus beau morceau de prose russe de la seconde moitié du vingtième siècle » (selon l’expression péremptoire d’un gamin de 18 ans benoîtement reprise par tous les internautes) et les atouts ne manquent pas pour le convaincre si besoin. L’histoire du livre d’abord : circulant sous le manteau dans la Russie soviétique des années 70 ; l’histoire de son auteur : Boris Khazanov, qui fait huit ans de travaux forcés et s’exile en Allemagne dans les années 80 ; l’argument : la vie du roi d’un petit pays et celle de ses sujets sous la botte nazie, et un acte final qui les honore et les condamne ; son style : sobre, évitant l’effet, court, habile et drôle (un humour à la Boulgakov, décalé, pince-sans-rire) ; son propos : la richesse des lectures à plusieurs niveaux, le questionnement philosophique qu’il apporte, les réflexions qu’il esquisse pour le bonheur des enseignants de seconde… Comment ne pas aimer un tel livre ? En a-t-on seulement le droit ? (On n’avait pas plus le droit, naguère, de faire la fine bouche à la lecture de « matin brun », cette fable édifiante pour les amateurs de récits sans complexité, ce qui leur semble la meilleure mesure des choses et la plus accessible au commun des mortels.)
        Face à une telle force d’intimidation, le lecteur est assez mal à l’aise (autant dire « très embarrassé ») pour expliquer l’impression d’ennui qu’il a ressenti à presque chaque page. « Presque », car il faut applaudir avec enthousiasme à certaines scènes, particulièrement réussies : le passage de l’armée allemande à la frontière, la charge de la cavalerie au château, « l’heure du roi » (la première) et surtout une visite médicale d’anthologie. Ce n’est déjà pas si mal pour un petit récit de 115 pages. Il n’en reste pas moins que le peu de choses qui se passe là pourrait tenir –si l’écriture avait la sobriété et la finesse chantées sur tous les tons par d’autres lecteurs, tétanisés par l’adoration- en deux fois moins de pages. Et la fin, ménagée comme un suspense hitchcockien, la fin qu’on espère bouleversante, inédite, incroyable et annoncée comme telle, n’est que la redite du beau geste du roi du Danemark, imité par ses sujets. Pourquoi alors choisir l’utopie géographique, pourquoi abstraire du contexte, tandis que le contexte est primordial ?

        Faut-il lire « l’heure du roi » ? Oui, bien entendu, c’est un livre élégant, riche, pertinent. Faut-il reprendre l’affirmation du Figaro qui en fait « un extraordinaire bijou de finesse littéraire », et celle citée au début de cette chronique, de « plus beau morceau de prose russe... » ? Essayons de mesurer nos enthousiasmes s’il-vous-plaît. Disons ce qui est : voici un bon support de réflexion pour étudiants et organisateurs de café-philo. Vous pouvez entendre par là que l’ouvrage est promis à un certain succès.

     

    L'heure du Roi
    Boris Khazanov
    Edition Viviane Hamy. 7 €

  • On ferme

    La forme papier est peut-être bien désuète (quoique le prochain salon de l'édition originale et du livre d'artiste qui aura lieu à Roanne en mai tentera de prouver le contraire), mais il reste que la lecture ne saurait faire l'économie des passeurs que sont les librairies et les bibliothèques. Avant que le phénomène ne prenne pied chez nous, la Grande-bretagne essuie les plâtres de la disparition de ces lieux aimés que sont les bibliothèques. Pour vous faire une idée du phénomène, je ne saurais trop vous conseiller de lire l'article d'Assouline sur son blog.

    M'est avis qu'il serait bon de prendre les devants, par cheu nous.

  • Anatomie de la Joconde

    Tandis que Google vous propose grâce à Google art d'entrer dans 17 des plus prestigieux musées du monde avec quelques toiles en très haute définition, vous aurez peut-être remarqué que le Louvre n'y figure pas. Ce doit être trop peuple pour la grande institution qui préfère s'aller ensabler pour conforter des projets de contrats en rafales (oho).

    Pour l'heure, il est possible d'aller trifouiller la Joconde jusqu'à l'oeil, jusqu'au fond des craquelures les plus malsaines, avec d'autres beautés, grâce à ce site :

    http://merovingio.c2rmf.cnrs.fr/iipimage/showcase/

     

    L'exercice a quelque chose d'assez étrange, voire de presque obscène, mais on peut aussi y vérifier que, mine de rien, le père Signac était un sacré artiste (la richesse des coleurs, l'inventivité de ses variations sur quelques centimètres carrés)!

  • Dolorisme et renoncement

    J'ai pu m'interroger récemment sur cette idée que le dolorisme du christianisme (version Paul de Tharse), justement décrié par Michel Onfray, a peut-être un autre but que la seule défiance de son propre corps, et l'horreur de la sensualité. Il m'est apparu (mais je clame que cela n'entre pas dans le projet des religieux, d'abord concernés par l'intimidation et le prône de l'abjection de tout ce qui est chair, aimant le pouvoir qui en résulte) que, du dégoût du corps pratiqué une vie entière, pouvait résulter une attitude plus sereine face à la mort. Dans la conviction que l'enveloppe de chair est méprisable et encombrante, pleine de souillures et fautive, le moribond peut trouver une grande consolation à en être délivré enfin. En tout cas, peut-il s'en détacher plus aisément. Vivre son corps, chercher les jouissances qu'il procure, aimer s'en repaître et en repaître l'autre, bref : le considérer comme la vie-même, doit causer j'imagine la grande souffrance d'avoir à l'abandonner à l'humus.
    Disant cela, je ne sais pas si cette proposition tient vraiment ; c'est qu'il faudrait savoir quantifier la peur des uns et des autres à mourir. Un handicapé moteur sera-t-il plus indifférent face à la mort, qu'un danseur accompli ? Je vous laisse ruminer ça et je dois conclure avec ma satisfaction de vous avoir fait perdre bien deux minutes.

  • Des voeux pour février

    Pour les Romains, le mois de février n’existait pas. Je vous le souhaite de même : inexistant, réduit à rien, déjà oublié. Qu’on en finisse avec ce mois nul et qu’on passe vite à mars, mois du printemps.