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  • suite de l'indice (voir note d'hier)

    Soudain, la femme du Président suspend son geste. Le couple s’est rendu au Palais après le petit-déjeuner pris chez eux. Ils sont venus ici, lui pour recevoir ses ministres, elle pour recevoir son emploi du temps de la journée. Le détail lui est lu par une copine embauchée comme secrétaire de la gestion de l’overbooking. Son premier rendez-vous sera la visite d’un orphelinat volontaire. « Qu’est-ce que c’est que ce truc : un orphelinat volontaire ? » interroge la first lady. Ludmilla lui répond que c’est un établissement qui recueille les parricides. La Présidente esquisse un geste pour dire qu’en réalité, elle s’en fiche pas mal, pourvu qu’il y ait des crânes de petits malheureux à flatter, quand un effluve puissant arrête son mouvement. Par la fenêtre ouverte, une violente odeur de litière vient de l’assaillir. « Ah oui, pense-t-elle en s’approchant, c’est ce fameux taureau princier… » Elle se penche un peu à la fenêtre et découvre sous elle la grande bête fauve, dont les cornes aux reflets d’ébène encadrent un mufle brillant de colère. Le taureau tend son regard vers la croisée, plante ses pupilles noires dans les siennes et la spectatrice en a le souffle coupé. « Il est magnifique, hein ? », glisse son mari, arrivé derrière elle. Elle veut dire « oui », se tourne vers lui et, muette d’écœurement, constate dans les yeux du Président un éclat de désir infâme qui ne lui est pas adressé mais s’arrime à l’extérieur, aux reins de la bête.

  • Un indice

    Juste une amorce, un bout d'idée. Le sujet de la prochaine création de la compagnie NU serait une reprise distanciée d'un mythe antique. Vous pouvez facilement deviner, si vous êtes familiers de mythologie. Pour la pièce, ma foi, rendez-vous dans deux ans.

     

       Ça sent, dans le Palais, ça sent le fauve, ça sent la fumure. L’odeur monte depuis les pelouses du jardin, envahit les perrons, les voûtes, les salons de réception, les bureaux et les bibliothèques, imprègne les ors et les staffs. Les remugles changent le goût des dîners de réception, alourdissent les paroles diplomatiques, déconcentrent les échanges politiques. C’est une gêne constante. Le Président et ses conseillers, chaque jour, commencent la journée sans y penser. Il fait beau, ils font ouvrir la fenêtre et soudain l’odeur de ferme vient leur graisser les narines. Enfin, on n’y peut rien, il n’y en a que pour quelques jours se dit-on, on sera vite débarrassé.
       Le Prince est venu en touriste à Paris avec tout son cortège, ses femmes, sa garde et sa ménagerie. Dans la cour du Palais Royal, entre les cages aux lions, les volières pour oiseaux de paradis et les enclos pour les autruches, il n’y avait plus de place pour le taureau favori de son Altesse. Dans un élan irréfléchi (dont il est paraît-il coutumier), le Président a proposé le jardin de son palais. Le Prince a immédiatement accepté et le soir-même, le plus beau taureau de son pays broutait la pelouse de l’Elysée. Une belle créature, vraiment, une race inconnue chez nous, avec une robe feu, des cornes immenses, un port majestueux, un regard étonnamment intelligent pour cette espèce.
       

    Demain, un nouvel extrait pour clore, et puis plus rien pendant deux ans, donc.

  • De profundis

    Ils répandirent ses cendres au dessus de l'océan. Elles se figèrent à la surface d'une flaque de pétrole, pour l'éternité.

  • Saint Paul

    Avant de prononcer la moindre prophétie, chaque matin, Jésus consultait son poulpe personnel.

  • Le poids du coeur

    Je ne vois pas quelle vertu et quel extraordinaire il y a à écouter son cœur plutôt que la raison. Le cœur fait un tel ramdam, s'impose avec une telle autorité, tandis que la raison souvent, s'immisce, susurre, prie qu'on lui prête attention.

  • Sympathique

    Par souci de discrétion, il préférait se faire tatouer à l’encre invisible.

  • Môssieur l'écrivain...

    Pour qui est-ce que je me prends ? Je me morfonds depuis qu'une innocente plaisanterie m'a profondément bouleversé.

    Dans une rédaction que je connais bien pour y avoir travaillé et que je visite parfois, une jeune femme arrose son départ vers d'autres cieux professionnels. Ses collègues lui font les traditionnels cadeaux et quelques surprises plaisantes, dont une parodie du journal auquel elle participe. Au hasard, je saisis ce faux amusant, lis quelques articles très drôles et tombe sur une liste des moments les plus affligeants de sa carrière de rédactrice. Et je découvre notamment « les interviews d'auteurs qui se prennent pour Houellebecq ». La jeune journaliste m'a interviewé, lors de la sortie du « Psychopompe ». Je ne pense pas être paranoïaque en prenant le trait pour mon compte ; je sens même une certaine gêne autour de ma lecture.

    Mince alors ! Je donne donc cette image ? Celle d'un type qui « se prend pour » ? Moi qui n'ai accepté le titre d'écrivain qu'après l'édition de mon cinquième ou sixième roman, à plus de quarante ans, et encore : en baissant la voix et le regard. Peut-être ai-je parlé avec trop de sérieux de ce livre-là, peut-être ai-je cru devoir convaincre que c'était « bien », et dans cet exercice, me suis-je montré trop sûr de moi, prétentieux. La prétention, en fait, nous y sommes, petits auteurs, un peu conduits. C'est que l'on nous l'autorise, malgré notre modeste statut. On nous donne la parole, soudain, parce que nous avons écrit. Et nous voici pontifiant, discourant, donnant notre avis, à la demande d'un public qui écoute. Pourtant, nous ne sommes pas plus renseignés du monde que les autres, pas plus subtils, pas plus cultivés mais voilà : nous prenons l'habitude de cette autorité artificielle. J'ai dû semblé tellement sûr de moi...


    Une dure leçon d'humilité en tout cas.

  • Auto tamponnage

    Même s'il s'épouvante ou s'enthousiasme de la vie des autres, le subterfuge est vite éventé : Kronix parle de celui qui l'écrit. C'est sa principale fonction pour son auteur. Le roman et les autres formes d'écriture n'ont pas ce précieux avantage. Elles ne sont pas en prise directe avec soi, elles laissent le temps de la réflexion, du repentir, du polissage. Pas le billet diariste. C'est peut-être pour cela que Kronix a été longtemps en panne. Car d'autre part, j'écris « J'habitais Roanne ». Forme curieuse mêlant histoire, érudition, géographie, littérature et autobiographie, où je me livre plus crûment que dans tout ce que j'ai pu écrire jusqu'ici. Ce livre prend la place que Kronix tenait, en fait. Difficile dès lors d'ajouter à cette manière de confession, celle, quotidienne, du blog. Trouver une piste parallèle.

    Nous aborderons ensemble cette question de l'écriture autobiographique à la Bibliothèque de Saint-Haon-le-Châtel, le 14 mai prochain.

    En attendant, vous pouvez lire le passionnant ouvrage de Jean-Philippe Miraux, sur ce sujet, intitulé assez logiquement et avec la sobriété qui est la marque de cet auteur : "l'autobiographie".

  • Qu'est-ce qu'elles veulent ?

    Il faut supporter de vivre dans un monde où une gamine qui se fait cogner dessus par son père au point d’être soignée aux urgences est tenue pour une emmerdeuse qui exagère son traumatisme et sa mère qui demande le divorce, pour une dépressive incurable. Le père va bien. Il est entouré d’amis, qui essayent de le consoler.

  • Des fois

    Je crois en l’Homme. J’ai foi en lui. Même si mes prières au genre humain n’ont pas plus de chances d’être entendues que celles des religieux adressées à leur dieu éthéré.

  • Prends les patins

    Certains de nos actes procurent un plaisir originel et plus tard de brefs moments savoureux, mais forment souvent, sur la durée, une idée de l’enfer. Faire des enfants ou peindre un parquet en blanc, par exemple.

  • Peindre, bon, et après ?

    On s'inquiète paraît-il, que Kronix ne parle pas de « Peindre ». Le signe que je ne serais peut-être pas satisfait du résultat. Oh que si, je le suis ! Heureux, comblé. Mais Laurent Cachard, délaissant pour quelques heures le savoureux supplice du PAL qu'il s'inflige à lui-même, traversant les frontières de nos pays, supportant même les afters russophiles (ne cherchez pas), s'est donné cette peine, et il en a dit tout ce que j'aurais aimé en dire. Sinon, un petit tour sur le site de la compagnie, avec revue de presse et voici qui me soulage d'avoir à dire du bien d'un travail auquel j'ai participé. La prochaine étape – en dehors de la mise en route d'une nouvelle création- est de distribuer la pièce dans d'autres structures. Je vous tiendrai au courant.

  • Retour à de petits riens

    Il me paraissait bien simple de reprendre l’écriture quotidienne de Kronix, une question d’emploi du temps me disais-je, les perturbations de ces derniers mois, causées par deux chantiers importants, l'un associatif et l'autre disons de création, ont réduit mes dispositions pour ce genre qu’est l’écriture de billet. Je reprends le livre en cours, un livre sur ma ville, avec l’idée aujourd’hui que je trouverai bien quelques heures à consacrer à mon blog. Le temps, maintenant, je l’ai. Mais l’envie, le besoin… Plus tellement sûr. Je vais tâcher d’appliquer ce principe que je défends tous azimuts : la discipline, la discipline. On se met au boulot et, fatalement, forcément, les phrases s’enchaînant, il se produit quelque chose, des éléments se mettent en place. On réalise soudain qu’on est en train d’écrire. Je vais tâcher. Je ne promets rien. Voilà : Kronix revient, Kronix est de retour, il va dérouiller sa verve, partager son humeur quotidienne, essayant de ne pas penser que, muet ou déclamant, personne n’attend son avis sur rien.

    A demain.