Recueillir la parole de l'autre, la parole qui l'écorche et le délivre, y être fidèle malgré la conversion nécessaire qui amènera à la littérature. C'est ça. Et il n'existe aucune formule. Je navigue aujourd'hui bien loin de mes rassurants rivages fictionnels.
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Il y a quelques années, une amie perdait son mari. Je le connaissais peu. Pourtant, elle voulut que j'écrive une sorte d'oraison funèbre et que je la lise à l'église. Pour elle, m'expliqua l'ami missionné pour me demander cette faveur, il s'agissait de s'assurer de la qualité de ce qui serait dit et fait pendant la cérémonie. Ce qu'il faut déduire de cette conviction est assez gênant, j'étais très mal à l'aise mais, par respect, et puis parce que ce que je connaissais du défunt me l'avait fait paraître comme une belle personne, j'acceptai. Je lus donc mon texte qui effleurait à peine le portrait du disparu (et pour cause), après les témoignages d'amis plus légitimes pour s'exprimer. Logiquement, je m'étais tenu à des considérations sur le désarroi de ceux qui restent, dédiées à la veuve, que je connaissais mieux. « Tout ce qui peut être dit, tout ce qui peut t'avoir été témoigné de sympathie et de chaleureux soutien, n'empêchera pas les heures muettes à venir, celles où tu te trouveras seule face au vertige du manque et de l'absence. (…) La disparition d'une personne aimée nous confronte à l'incompréhension de ce qui ne sera jamais plus et, pour toi A., pour vous, enfants, parents et amis de B., ainsi que pour tous ceux qui ont connu la sidération du deuil, chaque phrase de chaque journée commence par 'désormais'. » Voyez, des notions de ce calibre. Après l'enterrement, nous nous trouvons quelques uns dans le café du village. Face à moi, un ami du défunt. Furieux. Il me tance. Comment avais-je osé parler au nom des endeuillés légitimes, des vrais amis, de la famille ? Lui, avait veillé son ami, avait suivi son agonie, qui étais-je pour évoquer son chagrin ? Il avait raison, bien entendu. Je tentais de lui dire que je n'aurais jamais osé, de moi-même, prendre la parole pour évoquer le souvenir de B., que c'était une disposition de son épouse, persuadée de bien faire, je n'avais fait que m'exécuter, comment refuser une telle demande ? Mais je sentais que ma parole était embrouillée et peu convaincante car une voix honteuse, au fond de moi, avouait que j'avais été flatté par la requête de la veuve. Et lui, l'ami sincère, l'éploré, l'inconsolable, avait perçu la prétention sous le propos de circonstance.
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Oui, c'était bien, mais il y a eu ce moment où tu as crié : "Oh, Jacques !" et je te rappelle que je me nomme Sébastien.
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Nefs de Pangée - Nouvelle critique
C'est Lanfeust Mag qui s'empare du sujet et le traite avec efficacité et enthousiasme dans le numéro d'été de la revue. Merci à eux. Et un salut particulier à Cédric Fernandez, infatigablement bienveillant pour son vieux scénariste...
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Pour construire une pyramide, on faisait un grand trou aux parois bien nettes. Ensuite, on remplissait le trou avec un tas de pierres, et puis on retournait vivement l'ensemble. Cette technique serait issue de l'observation d'un enfant faisant des pâtés dans le sable. Enfin, c'est une théorie.
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Maman, j'ai choisi la paléontologie, parce que les dinosaures carnivores repéraient leur proie au mouvement et que je me garderai bien, dans mon futur métier, d'en faire le moindre.
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Et la voici, notre Salammbô, édition de luxe, accompagnée de Voyage en Orient et de quantité de bonus, dont (joie intense!) une préface signée de votre serviteur, que j'ai intitulée : Salammbô. Raté, comme un chef-d’œuvre, et une passionnante post-face de Frédéric Weil, autour de la notion d’ingénierie de monde imaginaire.
C'est une co-édition Mnémos/Les Moutons électriques. Et je redis (en l'assumant) ma grande fierté d'avoir participé à ce beau projet éditorial.
Allez-y, même si vous n'avez pas en main cette superbe version, reprenons tous en chœur : "C'était à Mégara, faubourg de Carthage..."
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9 dermatologues sur 10 déconseillent l'épilation au chalumeau. Le dixième a été rayé de l'ordre des médecins.
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Sa perversion sexuelle était à ce point spécialisée qu'elle lui procurait, en plus d'une jouissance vive et brutale, la sensation de faire partie d'une élite extrêmement restreinte, voire d'être une sorte d'élu.
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Dieu n'a jamais été jeune, il n'a jamais eu peur de la mort. Alors, ses conseils, ses commandements… De quoi je me mêle ?
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Le principe de la valise a tout de même plusieurs siècles, quant à celui de la roue et de sa version réduite, la roulette, il se confond avec les débuts de l'Histoire. Alors comment expliquer qu'il a fallu attendre la fin du XXe siècle pour bénéficier des valises à roulettes ?
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Noirmoutier ! L'île ! Le salon du livre de mer ! (et j'arrête de mettre des points d'exclamation). J'hésite entre l'enthousiasme et, c'est vrai, la surprise. Je suis invité au salon du livre de mer de Noirmoutier. Oui. Quelle œuvre a pu inspirer aux organisateurs cette invitation, moi qui suis tellement terrien ? Les Nefs de Pangée.
Tout le week-end, j'essayerai donc de défendre mon roman entre spécialistes de la voile et aventuriers de haute-mer. Je vous raconterai. J'emporte mon calepin pour dessiner. Retour lundi soir (car, déjà, une journée de déplacement pour rejoindre ces beaux endroits, une autre pour revenir...). Cadeau improbable de l'écriture. beau cadeau. Je suis très heureux.
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Je suivis les plus coriaces, les plus acharnés, les plus revêches, jusqu'à la lassitude.
Et puis, je ne me sentis plus guidé par les râleurs...
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(silence éloquent, une pensée pour des amis durement touchés hier)
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Je suis très fier de vous annoncer que La vie volée de Martin Sourire est sélectionné pour le Prix du livre historique.Le jury est composé de Victor Battagion, Catherine Clément, Sophie Chauveau et Bruno Dumézil.
Patience : le prix sera décerné en février 2018.
Je n'oublierai pas de vous tenir informés, chers lecteurs (tu m'étonnes !)
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C'était il y a plus de trente ans, je m'occupais avec deux autres amis d'un festival de Science-Fiction dans ma commune. Festival qui eut son heure de gloire, fut honoré de la présence de nombre d'écrivains, de réalisateurs et de dessinateurs de premier plan (ainsi que de starlettes et fugaces célébrités télévisuelles, bref). Pour l'un d'eux, nous décidons d'embaucher deux personnes. C'était l'époque des « TUCS », contrats aidés (déjà), qui permettaient à des associations comme la nôtre d'employer des personnes précaires. On me confie ce dossier (quand on est trois pour tout faire, il faut accepter le partage des tâches, même celles qui semblent les plus éloignées de vos centres d'intérêt). Annonces, contacts, partenaires, je mets rapidement sur pied le processus et des candidatures nous parviennent. Une poignée de profils de toute nature, je convoque tout le monde. Le contrat sera de trois mois, le travail demandé est une fonction de secrétariat dans un premier temps, puis d'accueil sur le festival. Avec mes camarades, nous choisissons deux jeunes femmes, pleines d'entrain, capables. Elles ont d'ailleurs parfaitement joué leur rôle, le moment venu. Reste à appeler les candidats malheureux. Tout se passe bien, jusqu'à cette dame. Elle a la cinquantaine, a été secrétaire dans une entreprise avant de se retrouver au chômage. Quand elle décroche, je déroule mon petit speech (formule de politesse, contexte, voix pleine de tact) qui n'a, jusque là, inspiré que des réactions désinvoltes, pour conclure par quelque chose comme : « Madame, je suis désolé, mais nous n'avons pas retenu votre candidature... » La respiration enfle, la voix se tort, à l'autre bout du fil : « Oh, mais comment ça se fait ? Pourquoi vous me prenez pas ? » Je suis tétanisé, les mots, maladroitement reproduits ici, ne sont rien, c’est l'immense détresse de la voix qui me colle un uppercut. Elle ne comprend pas, veut savoir. Elle est compétente, très compétente, elle a travaillé autrefois sur des manifestations, elle est une secrétaire organisée, une bosseuse… Voilà, je me découvre investi du rôle de salaud. Car c’est bien ça : on a rejeté cette femme parce que, à cinquante ans, elle était trop vieille pour notre si essentielle manifestation, on lui a préféré des gamines souriantes et joyeuses, jolies, qui feraient mieux dans le tableau de notre petit festival de province, tout auréolé de la présence de ses stars. Et, derrière la détresse, je comprends le chômage, les années de galère, l'image dévalorisée au sein de la famille, je devine son espoir, enfin, qu'on lui fasse de nouveau confiance, qu'elle reprenne pied dans la vie. Je me confonds en excuses, je lui dis que, peut-être, une autre fois... je dis n'importe quoi. Tout pour échapper à la morsure qui me saisit à l'écoute de cette prière dévastée. Je réalise que nous étions son dernier espoir, en tout cas se l'est-elle représenté ainsi. Je ne sais plus comment s'est achevé notre conversation, je ne sais plus si j'avais d'autres appels après, je sais seulement que la honte me vient encore à repenser à cette injustice. Et que cette injustice, j'en étais pour partie responsable. Depuis, quand j'entends évoquer des licenciements dans une petite boîte (c'est-à-dire quand le patron est celui qui renvoie, en personne), je vous assure, je pense d'avantage à lui qu'au malheureux type viré. Je ne peux pas croire qu'on licencie quelqu'un sans en être profondément bouleversé. Comme je l'ai été. Je pense toujours à cette femme, dont je ne sais plus ni nom ni visage, mais dont la voix, précisément, vient encore me cueillir, parfois. Et le sang, le même, à la même vitesse, me monte aux joues de la même façon.
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Une sympathique chronique à propos de Martin Sourire, par la blogueuse de Livres et bonheurs, qui admet n'être pas "une grande adepte des romans dits historiques", mais affirme que La vie volée de Martin Sourire lui a "particulièrement « parlé », servi par une écriture singulière, puissante et épique."
Merci, chère lectrice.
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Dans le seul souci de ne pas perdre une amitié, elle avait voté contre ses convictions. Personnellement, en élargissant le principe, j'en conclus que l'amour des autres l'emporte et même, tiens, je me dis qu'on va la sauver, cette planète.
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Son passe-temps favori, c'était de présenter un billet de 50 euros à un clochard et de l'engueuler parce que ce dernier n'avait pas la monnaie.