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Livres - Page 2

  • 3714

    Les livres commencés s'accumulent. Les notes sur les carnets sont poussives. L'écran ne s'allume plus que pour de vagues enquêtes… Des périodes qu'on aimerait ne pas traverser ou mieux : ne pas connaître. Dont l'expérience récurrente assure pourtant qu'elles sont, à terme, fécondes. Patienter, lové dans les sombres draps de la mélancolie. Patienter. Et, comme disait Paul (merci à Françoise pour ce rappel) :
    « Ces jours qui te semblent vides
    Et perdus pour l’univers
    Ont des racines avides
    Qui travaillent les déserts
    [...]
    Patient, patience,
    Patience dans l’azur!
    Chaque atome de silence
    Est la chance d’un fruit mûr!"

  • 3692

    La dame passe devant moi. S'arrête. Elle regarde mes livres, jette un œil sur le panneau qui dit mon nom, me dévisage, non, décidément, elle ne voit pas quel écrivain je peux bien être. Elle ne m'a jamais vu à la télé. Je la sens inquiète, alors je tente : « Je ne suis pas très connu, rassurez-vous. » Soulagée, elle me demande gentiment : « Et ça va, vous vendez un peu de livres ? » Je lui réponds qu'on fait ce qu'on peut, que voulez-vous. Alors, avec la plus grande compassion, beaucoup de gentillesse, elle veut me consoler et lâche dans un soupir : « Et oui ; c'est que vous êtes pas connu. » On n'en sort pas.

  • 3691

    Le salon du livre de Saint-Etienne s'appelle "La Fête du livre". Réjouissons-nous donc, même si c'est dur à prononcer (joui-sson-nou-donc).

    J'y suis invité et, joie supplémentaire, sur le stand de la librairie "Le Quartier Latin", au côté de Jean-Noël Blanc. J'y défendrai les couleurs de mon petit dernier "Mines, rives et Minotaure", coédité par Le Réalgar et la Ville de Saint-Etienne. Un texte inspiré par mon séjour (une résidence d'auteur), de plusieurs mois dans ladite cité.

    Il sera justement question des relations entre Saint-Etienne et l'écriture lors d'une table ronde, en compagnie de l'excellent Lionel Bourg et d'autres auteurs (non moins excellents sans doute, mais dont je n'ai hélas rien lu) : Pierre Mazet, Grégory Mazenod et Jean-Louis Pichon. Nous tenterons de cerner les conditions par lesquelles Saint-Etienne est une ville romanesque. Pour cela, c'est la prestigieuse Ecole nationale Supérieure d'architecture de Saint-Etienne qui nous accueillera (et je m'aperçois qu'il vaudrait mieux que je commence à songer à y dire des choses intelligentes). Samedi 19, à 11h30.

    Et, en dehors des interviews sur RCF et France Bleue, on pourra me retrouver au Musée de la Mine pour une lecture-déambulation-rencontre, le samedi à 14 heures, et le dimanche à 10 heures.

    Le reste du temps, dès vendredi 15 heures, je serai, gentil et patient, sur le stand du Quartier Latin, pour signer des livres, comme il se doit, et ce, jusqu'au dimanche 18 heures (ou jusqu'à ce qu'on me dise "faut y aller maintenant, hein ?").

    Enfin, comme j'aurai un peu de temps vendredi, je compte bien rendre une petite visite au salon des éditeurs, une sorte de méga-off, à la bourse du travail.

  • 3686

    J'ai fait l'expérience de me lire. On se relit beaucoup, on ne se lit pas vraiment. Il faut pour cet exercice une distance que le travail empêche. Il faut une attitude détachée de certains enjeux, une posture de quidam qui ouvre un bouquin et espère passer un bon moment, tout simplement. J'ai donc lu « Les Nefs » et « Martin Sourire ». J'en conclus, chers lecteurs, que vous avez bien du mérite.

  • 3682

    13.172j-n Blanc.006.jpgDans une semaine, précisément (vous pouvez faire le calcul), la bibliothèque de Fleury-la-Montagne, celle-même qui a déjà reçu Maryse Vuillermet, Christian Degoutte, Laurent Cachard, Louis Dubost et tant d'autres remarquables auteurs, ouvre ses portes à l'un des plus prolifiques et insaisissables d'entre eux : Jean-Noël Blanc.

    Personnellement, je n'ai lu qu'(un peu plus d') une demi-douzaine de ses livres, et c'est donc trop peu, compte-tenu de sa production, pour l'évoquer savamment. Je peux cependant affirmer avoir goûté dans ses textes le phrasé exquis et gourmand, avoir savouré dans ses récits l'invention généreuse, l'humour, la bienveillance. Avoir découvert une sorte de philanthropie lucide. Ce qui n'est pas le moindre exploit.

    Lors de ma résidence à Saint-Etienne, il fut l'un de mes guides, l'un de ceux, essentiels, qui m'accueillit, m'ouvrit réseau et contacts.

    Je suis sacrément fier de pouvoir lui serrer la paluche, je vous le dis !

    Ce sera donc samedi 12 octobre à 18 heures, à la bibliothèque de Fleury.

    Inutile que je beugle, en conclusion : "Venez nombreux !", je pense que vous avez saisi l'idée : ça va être bien.

     

     

  • 3677

    Aurelia Kreit

    Couv-AK.pngNous n'allons pas nous y attarder, mais la genèse de ce roman fait partie intégrante de la légende qui le sous-tend. Il y est question d'un groupe musical formé à Lyon il y a trente ans, dont l'auteur fut un fan. Un groupe qui avait pour nom ce patronyme imaginaire, Aurelia Kreit, incarné par une photo d'inconnue (aujourd'hui en couverture du livre), image assez inspirante pour qu'une histoire y fût attachée. Une histoire d'exil, de fuite, de temps troublés et cruels… Parmi les auditeurs, le jeune Laurent Cachard se mit à rêver de ce qu'avait pu être la vie de cette petite fille. Une certaine reconnaissance, plusieurs publications primées plus loin, il considéra -la littérature lui étant devenue langage privilégié- qu'il était prêt à s'emparer de son histoire. Voici donc, édité par « Le Réalgar » (dont la ligne éditoriale est généralement attentive aux textes courts), le vaste roman historique qui nous était promis par l'auteur depuis si longtemps.
    Aurelia Kreit est née en 1900, en Urkaine. Elle est la fille d'un ingénieur juif. Dans Iekaterinoslav, village de la « Petite Russie », cela signifie qu'on est en terrain hostile et qu'on doit se préparer, d'un jour à l'autre, à changer de vie. Pour échapper aux sabotages, aux pogroms, aux meurtres impunis, aux haines épidermiques encouragées par le Tsar, deux familles juives amies décident de fuir. Hommes et compagnes séparés d'abord, par ruse, par souci de discrétion. Anton et Olga, Nikolaï et Varvara traversent avec leurs enfants les paysages de l'Ukraine, font escale dans les capitales mythiques de ces temps : Odessa, Vienne, Constantinople, Paris… pour finir par se forger une identité française (en germe dans leur intérêt pour Hugo, dès les premiers chapitres) à Lyon et, pour quelques survivants, à Saint-Etienne. On découvrira au passage qu'il exista une organisation de résistance juive à l'oppression, dès le début du XXe siècle et qu'il y eut, avant Freud, à Vienne, certain médecin impliqué dans la recherche de causes psychologiques dans l'incompréhensible mutisme d'enfants traumatisés. On pourra oublier les données techniques sur la sidérurgie ou l'armement de l'époque, sans dommage pour la compréhension de l'histoire.
    « Aurelia Kreit » a été pensé, selon l'antienne de son auteur, comme son « grand roman russe ». Au fil des plus de dix ans d'écriture, d'amendements, de repentirs, d'abandon, de sursaut, de volonté, d'acharnement, il est devenu autre chose : un objet littéraire singulier. Un roman historique, certes, et encore, mais surtout, une traversée dans le temps et par les pays, des consciences. Tout s'imbrique. Plus que les héros, se sont leurs âmes qui sont ballottées d'un point à l'autre, en quelque sorte écho de leur trajectoire physique. La petite qui incarne le livre, qui clôt le récit tout en l'ouvrant, a été, dans cette lente opération de maturité du texte, déplacée en marge du récit, et cela pourra surprendre le lecteur. Il faut comprendre que tous les personnages sont aimés de l'auteur. Même ceux qu'il sacrifie au fil de nombreuses et complexes péripéties, qui persisteront, spectres amicaux, à hanter le reste du roman. Aurelia Kreit ne force donc pas le destin à la manière d'un personnage commun de roman (ou de roman commun), elle est le témoin sans voix du destin des autres. Situation malaisée qui a cependant l'avantage de créer la distance d'observation dont le romancier est passé maître. Les remuements de pensée, les méditations et introspections sont donc les grands moments, les vrais gestes littéraires de « Aurelia ». En regard, l'Histoire devient prétexte, aussi documentée soit-elle. Les exilés de son grand roman russe ajoutent leurs voix aux nombreuses créatures du zoo humain cachardien. Autant de perceptions uniques de ce que c'est que vivre malgré tout, que d'exister et d'affronter les événements sans prétendre qu'on les contrôle.
    IMG_20190928_145033.jpgOn ne saura plus, un jour, de quels étonnants détours et amours est né « Aurelia Kreit. » Le roman ne sera témoin que de lui-même, y compris pour son auteur. Quelle postérité attend un texte aussi singulier, quels lecteurs voudront s'approprier ses questionnements ? Il faudra sans doute du temps pour que ce livre, son tempo, son sujet, la période qu'il explore, ses rebondissements, ses apparentes digressions, s'imposent dans un paysage littéraire qui ne l'attendait pas. On est reconnaissant aux éditions Le Réalgar d'avoir ainsi osé se distraire de leur ligne habituelle pour s'engager dans un tel ouvrage éditorial (430 pages plus les notes, fort bien mises en page, d'ailleurs). C'est un pari sur demain. Un pari nécessaire.

     

    Aurelia Kreit. Laurent Cachard. Editions Le Réalgar. 440 pages. 20 euros.

     

    Photo : Laurent Cachard, à la libraire Le Tramway, à Lyon, évoquant son roman, le samedi 28 septembre 2019, devant une nombreuse assemblée.

     

    On lira avec bénéfice la belle chronique d'Esther Rochant, mise en ligne sur le blog de Laurent, le Cheval de Troie.

  • Nouvelle critique des Nefs de Pangée

    Postée sur Canal Hurlant, "un site qui dit du mal, mais le fait bien", une marrante recension des Nefs, menée avec verve. La fin de l'article est mitigée, mais il me semble (je crois, on dirait bien, au fond, tout de même, un peu) que c'est quand même globalement positif, comme dirait un ancêtre.

  • 3630

    Causerie sur le thème « mes œuvres favorites »
    Saint-Haon-le Châtel, le samedi 15 juin.

    Il s'agissait de limiter son choix à dix. Je n'y suis pas parvenu. Alors, je me suis dit : « faisons-nous plaisir… » Après un rapide aperçu de l'histoire du livre (car de quoi parle-ton quand on parle de livre ?), je vais proposer un parcours de hasard parmi mes livres aimés.

    Comme on va le voir, un certain goût pour le monumental, en tout cas, en début de "carrière de lecteur" (la faute à Hugo, ça !), et puis, une certaine maturité, une curiosité, des envies d'infimes et d'intime, donnent ce mélange. Mais nous sommes tous lecteurs de cette eau, plus ou moins, n'est-ce pas ? (je veux dire, curieux, infidèles, passants).

    Les livres dont je vais essayer de parler (listés ici sans ordre, qu'importe) :
    Franck Herbert, Dune ; Homère, L'Iliade ; Dante, La divine comédie ; Gilgamesh ; K. Dick, Le maître du Haut-château ; Hugo, La Légende des Siècles ; Flaubert, Salammbô ; Steve Tesich, Karoo ; Laclos, Les liaisons dangereuses ; Auclair et Deschamps, Bran Ruz ; Emmanuel Merle, Dernières paroles de Perceval ; Christian Degoutte, Il y a des abeilles ; Cavanna, Les Russkofs ; Virginia Woolf, Mrs Daloway ; Pierre Michon, Corps du Roi ; Violette Leduc, La main dans le sac ; Julien Gracq, Le Rivage des Syrtes ; Marguerite Yourcenar, Les Mémoires d'Hadrien ; Eric Chevillard, La Nébuleuse du crabe ; Easton Ellis, Moins que zéro...

    Les livres dont j'aurais aimé parler :
    La femme de sable, Chloé Delaume ; Lydie Salvaire, BW ; Millet, La vie sexuelle de Catherine M ; Pauline Réage, Histoire d'Ô ; Melville, Moby Dock ; Simenon, Des inconnus dans la maison ; Peyo, Le schtroumfissime ; Annie Ernaux, La place ; Antonio Lobo Antunes, Splendeur du Portugal ; Colette, La Maison de Claudine ; Rimbaud, Une saison en Enfer ; Otomo, Akira ; Marcel Marïen, Figure de poupe ; Daniil Harms, Un tigre dans la rue ; Buzatti, le K ; Serge Brussolo, Enfer vertical en approche rapide ; Volodine, Biographie comparée de Jorian Murgrave ; André Breton, Nadja ; Howard, Conan ; Burroughs, Tarzan ; La Bible (L'Ecclesiaste) ; tout Rabelais, tout La Fontaine ; Umberto Eco, Le Pendule de Foucault ; Philip Roth, La tache ; Elfried Jelinek, La Pianiste ; Salinger, L'attrape-coeurs ; Henri Alleg, la Question ; Truman Capote, De sang froid ; Céline, Voyage au bout de la nuit ; Leo Perutz, Une nuit sous le pont de pierre ; Eco, Le Pendule de Foucault ; Pirandello, Henri IV ; Ionesco, Le Roi se meurt ; Conrad, au cœur des Ténèbres ; Mc Carthy, L'obscurité du dehors ; Chessex, L'Ogre ; Elfried Jelinek, La Pianiste ; et La Recherche, du petit Marcel, bien sûr…

    Dès que je la reprends, cette liste, je la trouve contestable. Elle change sans arrêt depuis deux semaines (la peur d'oublier un choc esthétique majeur et de devoir embrasser l'ouvrage injustement écarté en lui disant "Je te demande pardon"). J'aimerais vous y voir, tiens.

  • 3628

    En préparant une causerie sur "mes livres préférés", j'ai imaginé présenter les ouvrages au hasard, par « passerelles », car m'est venue, dans l'exercice, l'idée que nous recherchons, dans nos lectures, à perpétuer l'éblouissement perdu de la première vraiment importante pour nous, le choc esthétique initial, et que nous prolongeons, au travers des découvertes les plus variées, la lecture d'un immense ouvrage qui serait celui de notre vie. D'où le fait que nous rejetons ou adoptons tel ou tel texte, quelle qu'en soit la nature, parce qu'il est plus ou moins éloigné de ce récit séminal, abordé dans notre préhistoire.

  • 3627

    Sous la houlette du précieux Jean Mathieu, la bibliothèque de Saint-Haon-le-Châtel a imaginé un cycle de causeries intitulé « Mes dix œuvres favorites ». Cette semaine, je serai l'un des orateurs qui se sont succédé, mois après mois depuis janvier, pour exposer et expliciter leur choix. L'an dernier, les « causeurs » présentaient leur musée personnel d’œuvres artistiques (peintures surtout, sculptures et/ou installations parfois). Cette année, il s'agit d'évoquer des livres. La question se pose d'abord de savoir ce qu'est un livre et, si le terme d’œuvres, conservé pour intituler cette nouvelle série, permet d'élargir les choix (par exemple, je vais présenter le cycle de Dune comme un seul ouvrage, bien qu'il soit composé d'une dizaine de « livres »), l'exercice consiste bien sûr à plonger dans la masse des lectures d'une vie pour en extraire les ouvrages marquants. Il faudrait qu'il n'y en ait eu que dix ! C'est infernal, impossible, bouleversant, sans exagérer. Ma liste a changé constamment ; elle risque de se modifier jusqu'à la dernière minute. Dans ceux qui résistent à tous les atermoiements et repentirs, je m'aperçois qu'il y a peu de livres actuels, disons des dix dernières années, comme si les livres qui comptent vraiment pour moi se situaient surtout dans une zone du temps où mon cerveau adolescent recevait mieux leur puissance. Impossible de m'en tenir à dix, disais-je. C'est le paradoxe : si on me demande de choisir un seul livre (la question éternelle de l'île déserte), je crois que je peux le désigner (ne me le demandez pas là, tout de suite), mais dix ? J'admets que je m'en suis trouvé incapable. Il y en aura plus du double, hélas, dont des textes « fondateurs » (textes assez influents pour fonder des civilisations ou témoigner éternellement de leur caractère, comme l'Iliade ou l’Épopée de Gilgamesh). Face à ces monuments, quelle littérature mettre en lumière ? La plus intime, la plus infime, celle des ralliements minuscules, des remuements presque indicibles, la littérature qui, ai-je pu croire en la découvrant, ne parlait qu'à moi seul. Vanité du lecteur. Pour en savoir plus, venez partager ce gentil moment samedi 15 juin, à partir de 17h13 (pourquoi 13 ? : parce qu'un précieux ami m'a dit de l'attendre, il ne peut être au rendez-vous à 17 heures pile, l'heure promue initialement, alors… 17h13).

    Sinon, venez aux rencontres suivantes, basées sur le même exercice :

    6 juillet Bruno DUSSUD, Isabelle et Philippe PRAS
    14 septembre Jeanne PATFOORT et Gisèle LOIRE
    12 octobre Catherine PERARD
    9 novembre Dominique FURNON.

  • 3593

    Nous sommes en avril 2019. Je réalise ce fait anodin, en me levant. Et s'impose soudain un constat : il y a maintenant plus de cinq ans que, soutenu par ma douce, j'ai pu quitter mon travail pour me consacrer à l'écriture, exclusivement. Ai-je été à la hauteur du pari, ce que j'ai produit depuis valait-il tous ces sacrifices ? Voyons, faisons un point.

    Les romans, d'abord, publiés ou refusés, je les ai tout de même écrits :
    Les Nefs de Pangée (sortie septembre 2015, Éditions Mnémos). Prix des blogueurs SF 2016.
    La Vie volée de Martin Sourire (sortie janvier 2017 chez Phébus) Bourse d'écriture DRAC 2015. Coup de cœur Prix Claude Fauriel, finaliste prix du roman historique magazine Historia.
    Les Provinciales
    Cryptes
    Le Radical Hennelier (reprise et réécriture puis prolongement d'un court roman d'abord publié sur Kronix, cette version n'a plus aucun rapport, hors les premières pages)

    Pieds nus sur les ronces
    Mado
    Les Inconsolables
    Noire Canicule (titre provisoire. A paraître premier semestre 2020 chez Phébus)
    Demain, les origines. Vol.1. (en cours de lecture chez Mnémos)


    Théâtre :
    Pasiphaé, création premier trimestre 2015. Deuxième version en 2016.
    Minotaure. Création 2017
    Le sort dans la bouteille. (la pièce sera créée par François Frapier en 2019).
    Courage. Pièce écrite pour une classe de 2de au lycée Jean-Puy, à Roanne.

    Nouvelles :
    La Joyeuse. Editions Le Réalgar (2014)
    Ma life
    Nulle part, tout le temps (2016, in Un Tremplin pour l'Utopie. Sélection Prix Rosny-Aîné 2017)
    Etrangères (éditions Les Petits Moulins, 2018)

    Poésie :
    Nos Futurs et Lucifer Elégie. Ed. Sang d'encre, 2014.

    L'Exacte Joie. Livre pauvre, 2019. Illustré par Jean-Marc Dublé.

    Textes divers :
    Voir Grandir (mise en chanson par Jérôme Bodon-Clair. Sur scène en 2015)
    Paloma Courbeau pour revue Brasika Folio (2015)
    Où Roanne, Quand Roanne, Quelle Roanne ? (Colloque, avril 2015)
    A l'aplomb de la chair - texte pour Winfried Veit (avril-mai 2015)
    Portraits de Mémoire(s). Création 2016-2017. Articles pour le site et textes des chansons.
    Lettres-frontière 2016. Eté 2016.
    Winfried Veit, éclaireur infatigable (juillet 2016)
    La Messe d'or (pour le site patrimonial Lectura + Juillet 2016)
    20 ans Médiathèque Mably. Septembre 2016.
    Lettre Ouverte à l'autre que j'étais. Editions Le Réalgar, mars 2017.
    Salammbô, raté, comme un chef-d'oeuvre. Préface pour la co-édition « Merveilleux Flaubert » Mnémos- Les Moutons électriques. Juin 2017.
    Conférence : Art abstrait, retour aux signes. 2017.
    Conférence : Scènes de batailles ; Master Class 2017.
    L'avis de l'auteur (article pour le magazine Pages, avril 2018)
    Rives, Mines et Minotaure (texte écrit pendant la résidence Saint-Etienne. Publication prochaine par Le Réalgar)

    Contes :
    Le crocodile rouge. Pour l'illustratrice Maud Liénard. Inédit.
    Le vilain petit ballon ovale et La lubie de Monsieur Balèze. Pour le dessinateur Sarujin. Publication en juin 2019.

    Scénario de film :
    Joseph Déchelette précurseur de l'archéologie, 2017. Projet de réalisation pour 2019-2020.

    Scenarii de Bandes-dessinées :
    - Pour le dessinateur Cédric Fernandez :
    Cortés : trois albums.
    Les Mange-Failles : deux albums
    Complaintes des Terres du Nord : trois albums.
    Et des synopsis sur 14-18, Alexis de Toqueville, Che Guevarra, les Nefs de Basal. Le début d'un roman graphique pour le dessinateur Philippe Pellet, etc.
    - Pour le dessinateur Thibaut Mazoyer :
    A la droite du diable.

    Et un peu plus de mille notes de blog, je dirais. Voilà. Je crois que c'est tout. Bon...

  • 3592

    Je suis demain aux Intergalactiques de Lyon, avec une actualité particulière. J'ai le redoutable honneur d'être invité à participer à une table ronde dont le médiateur n'est autre que l'auteur de la fameuse chaîne Youtube Axolot (que je vous conseille, je suis fan depuis longtemps), en compagnie de luvan (on écrit comme ça, sans majuscule, j'aurai donc le plaisir de découvrir cette autrice et traductrice que, j'avoue, je n'ai pas encore lue car, découvrant son nom il y a deux jours, je n'en ai pas eu le temps), des youtubeurs de AlterHis et Confessions d'histoire (chaînes passionnantes également). Nous évoquerons les fins du monde dans l’Histoire : extinction des espèces, chutes des civilisations, et nous interrogerons sur ce que nous apprennent les épisodes historiques d’effondrement, de cataclysmes, et leur éventuelle influence sur la science-fiction. Pour ma part, n'étant pas un spécialiste, peut-être aurais-je l'opportunité de proposer une réflexion sur la singularité judeo-christiano-islamique, autour des notions de fins, de télos, de résolution. Notre préoccupation quasi originelle de l'idée de Jour dernier et de son influence sur notre foi absolue en une chute finale.

    Ce sera à 18h30, salle 2 de la MJC Monplaisir, 25 avenue des frères Lumière, Lyon 8è.


    Sinon, je suis en dédicace tout l'après-midi sur le stand des Indés.

     

    A vous voir.

     

     

  • 3556

    Ce samedi prochain 17 novembre à 18 h, la bibliothèque de Fleury accueillera Maryse Vuillermet.
    Il sera question de son récit sur les frontaliers qui partent chaque matin travailler en Suisse et chaque soir reviennent :"Frontaliers pendulaires, les ouvriers du temps", publié à la rumeur libre.

    L'an dernier, lors de a sortie de ce livre, je m'étais enthousiasmé :

    "L'auteure nous décrit, avec une précision de monteur de haute horlogerie, les attentes, les aspirations, les angoisses, liées à la condition des travailleurs « pendulaires ». On apprend des milliers de choses, c’est passionnant. Les descriptions du travail vertigineux des horlogers de luxe, la façon dont l'auteur détaille leur  recherche inconcevable de la perfection,  parviennent à nous faire toucher du doigt l'amour fétichiste que de tels objets peuvent inspirer. Je dois avouer que je comprends à présent qu'on puisse mettre 300 000 euros dans une montre. C'est un des effets imprévus de la lecture du livre de Maryse Vuillermet. Chaque métier est traité avec la même attention scientifique, combinée à une égale affection humaine pour les êtres. Cet équilibre maîtrisé fait de ce texte un récit passionnant, humain et pédagogique à la fois. Bouleversant et riche d'enseignements. Dans les derniers chapitres, le rêve éveillé d'un des protagonistes donne à voir la fin apocalyptique du système. Un avertissement car, nous dit Maryse Vuillermet en épilogue, « l'histoire ne s'arrête jamais »."

    Et apparemment, les responsables de la médiathèque ont apprécié également ce livre exceptionnel.

     

  • 3555

    Ce soir, 19 heures, à la Médiathèque de Mably, le groupe de lecteurs "Demain dès l'aube" dont j'ai le plaisir de faire partie, rendra son hommage à la littérature qui s'est emparée de la Grande guerre. Extraits d’œuvres de Barbusse, Céline, Rolland, Jaurès, Ball... et, en invité, un auteur bien vivant : Christian Degoutte, qui a récemment produit une série de textes autour d'une petite Vierge à l'enfant, venue de Verdun, passées entre de nombreuses mains (c'est en tout cas son hypothèse) pour être accueillie dans une chapelle de notre région. Ça s'intitule "Petite Mère", et cette prose superbe viendra donner le point de vue d'un auteur actuel sur ce drame de jadis, encore tellement présent dans la mémoire collective.

     

  • 3552

    Fête du livre ou salon des éditeurs stéphanois ? J'irai de ci de là, signer sur le stand G15 l'anthologie "Regards sur Roanne" de l'ami Pierre-Julien Brunet entre 1à et 12 heures, rencontrer mes nombreux ami(e)s dessinateur(trice)s et soutenir Laurent Cachard, rue de la République.

    Et puis, retour à la maison pour me remettre à l'ouvrage. "Demain, les origines" progresse, mais je suis encore loin, bien loin, de l'arrivée.

     

  • 3551

    Pierre-Julien Brunet évoque son anthologie littéraire de Roanne, travail remarquable dont il parle très bien au micro de Radio Val-de-Reins.

    cover.jpg"Roanne, regards d'écrivains" est une anthologie parue aux Presses universitaires de Saint-Etienne. Pierre-Julien et moi serons d'ailleurs dans cette bonne ville, samedi, à l'occasion de la Fête du livre, pour dédicacer l'ouvrage de 10 h à 13 heures, stand G15.

     

     

  • 3548

    Banniere-Spathul4.jpgA la Droite du Diable est un projet tenu depuis longtemps, souvent remis, repris, toujours conservé par Thibaut et moi comme un rendez-vous important qu'il ne faudrait pas manquer. Les choses auraient pu ainsi traîner et, peut-être, s'éteindre. Mais, bon sang, c'est que j'y tiens, à cette histoire !  2016-2017 ont été des années décisives, avec notre décision commune, le dessinateur et moi, d'en venir à bout, une fois pour toutes. Il faut ajouter l'apport essentiel, au niveau du story-board, d'Olivier Paire, alias Petelus, dessinateur original, ayant créé sa propre maison d'édition pour publier ses récits singuliers. La contribution d'Olivier a été déterminante, elle a donné l'élan nécessaire qui nous permet, aujourd'hui, de proposer notre album à la contribution de souscripteurs, via la plate-forme de financement participatif ULULE.

    L'histoire de A la Droite du Diable est située dans un pays imaginaire d'Europe. Le vieux tyran Spathül vit à l'écart de son propre pays, dans son immense palais construit tout à sa gloire. En apparence, tout semble se dérouler, autour de lui, comme depuis son accession au pouvoir, il y a des années. Spathül mène domestiques et ministres avec dureté. Capricieux, colérique, dépressif, il peut basculer soudainement d'un état euphorique à la fureur meurtrière, et connaît des accès de mélancolie et de désarroi. Le jeune Renzo - protégé par une femme de pouvoir trouble et ambiguë, amie de Spathül : Eva Krant- entre au service du tyran. Elle exige de lui qu'il trahisse son nouveau maître, alors que le garçon a des sentiments partagés sur Spathül. Sentant la fin proche, le tyran lui dicte ses mémoires tandis que chacun s'active pour opérer un basculement politique déjà amorcé en secret.
    On commence le récit avec des anecdotes plutôt grotesques, présentant le régime de Spathül sous un jour particulièrement ubuesque. Petit à petit, comprenant la comédie qui se joue autour de lui, et comme les sentiments de Renzo évoluent, le lecteur pourra ressentir lui aussi, toute l'ambiguïté des relations entre un valet, élevé au rang de confident, et son maître. On dit qu'il n'y a pas de grands hommes pour son majordome ; probable qu'il n'y a pas non plus de monstre pour ceux qui les côtoient. A qui doit-on fidélité ?

    Je vous reparlerai évidemment de ce projet pour en évoquer la genèse et quelques références dont le récit s'est nourri.

  • 3536

    Ce billet est publié avec l'accord de Laurent Cachard, auteur que j'aime et admire, frère d'armes au pays de la littérature. Il a eu l'élégance d'approuver la mise en ligne de ce ressenti (je préfère "ressenti" à « critique » car je ne suis pas critique littéraire), qu'il faut prendre avec toutes les précautions d'usage. Ressenti, car il s'agit d'une réaction personnelle, subjective (voire épidermique, comme on pourra le voir) : nombre de lecteurs de Girafe Lymphatique ont fait un retour exactement inverse. Beaucoup ont été émus, bouleversés, travaillés profondément et durablement par le texte de Laurent.
    Ce billet sera l'occasion d'un échange. Sur son blog ou ici-même, Laurent aura toute latitude pour s'exprimer, contrer mes arguments ou les réduire à un contre-sens éventuel*. Et, quoi que j'en dise, je vous engage à vous faire votre propre opinion sur le dernier livre de Laurent.


    Couv-Girafe.JPGPour être lymphatique, elle l'est, Clara Ville ! On a de ses envies de la secouer ! de la sortir de ses brumes océanes, où son père l'a laissée pendant trente ans… Et comme on a envie de prendre son père par le col à la fin, pour lui régler son compte ! Bon. Qu'est-ce que le dernier texte de Laurent Cachard, paru au Réalgar : une longue nouvelle, un court roman ? Allons-y pour roman, puisque le terme est revendiqué par l'auteur et son éditeur, en quatrième de couverture. L'histoire d'une femme dont le père a disparu pendant trente ans, la laissant avec sa mère dès l'âge de six ans, pour la retrouver (sans beaucoup d'efforts et pour des raisons obscures, une vague envie, peut-être, comme celle qui le décida à s'en aller) à celui de trente-six.
        Les nombreux personnages créés par Laurent Cachard, au fil de ses récits, sont parfois incarnés et aimables (je pense au Robert de La jouissance..., aux enfants de La partie de cache-cache, à l'homme qui patiente de Valse, Claudel ou au Gérard de Tébessa), parfois tellement hors sol et désincarnés que leur psychologie frise, à mes yeux de lourd terrien en tout cas, l'extraterrestorialité (et voici que se profile l'agaçant Paul Herfray de Le poignet d'Alain Larrouquis). Mon admiration fidèle pour le travail de Laurent Cachard a produit assez de preuves lisibles sur ce blog, pour que, exceptionnellement, je me permette de dire, très subjectivement, que je suis passé à côté de ce roman. Cette modeste recension est donc inspirée par un questionnement : qu'est-ce qui m'a échappé, que d'autres ont aimé, manifestement, si j'en crois les nombreuses réactions enthousiastes des premiers lecteurs ? Qu'est-ce qui m'a arrêté ?
    D'abord, un paradoxe. Clara ville, l'héroïne, nous est donnée, dès le portrait-préambule, comme « consciente de ses choix. » Or, attente, amours, désir d'enfant, départs, retours, ses choix m'ont semblé davantage dus au hasard ou à la volonté de l'auteur, qu'à celle de l'héroïne. Généralement, ils me sont restés absolument incompréhensibles, je dois l'avouer, l'absence du père n'étant le déclencheur spécifique d'aucun (un même profil, dans d'autres circonstances, aurait tout aussi bien pu traverser les mêmes épreuves, emporter les mêmes succès, prendre les mêmes décisions). Attention, qu'on me lise bien : cela ne m'est apparu qu'après réflexion, au terme de plusieurs jours passés à échanger avec ma douce sur nos lectures respectives, à laisser précipiter les effets du texte en moi. Je veux dire que cela ne nuit pas au plaisir de la lecture, car c’est un beau texte, soutenu par une tension permanente, traversé de nombreux moments de grâce, de vrais passages littéraires comme j'aime en trouver chez cet auteur. Simplement, je dois avouer mon incrédulité devant l'exposition de deux psychologies : celles du père et celle de sa fille, Clara. Leurs motivations, surtout. Un homme quitte île et foyer. Île (les îles sont les points d'ancrage dans l'errance des personnages, mais elles ne sont pas ou peu définies, on suppose Ouessant, on suppose un ou des Territoires d'Outre-mer...) et foyer (femme et fille qu'il semble aimer, en tout cas, rien de désastreux dans leurs relations), pour — si j'ai bien compris — travailler le Clair de Lune de Debussy. C'est limite suspect, mais pourquoi pas, l'auteur y croit, alors on le suit. On se figure alors un pianiste passionné à la Glenn Gould, abandonnant tout, concerts, famille et amis, pour s'exiler, et tenter d'atteindre, dans une ascèse absolue, la perfection de ses Variations Goldberg à lui : le joli poème musical de Claude Debussy (devenu, hélas, si mainstream, qu'il est aujourd'hui resservi avec chorale pour la bande-annonce du prochain Godzilla). L'art serait une cause d'abandon assez classe. Contestable mais supportable. Sauf que. Au lieu de cela, cet enfoiré fonde une nouvelle famille, pas plus brillante que celle qu'il a quittée sans explications, ne recontacte jamais sa fille, ne sait d'elle que les photos et informations transmises par son frère jumeau, pendant trente ans ! (Putain, mais : 30 ans ! trois fois dix ans, trois-cent soixante mois !) Et tout ça pour, enfin, quand père et fille se retrouvent, interpréter à son intention le fameux Clair de lune… en n'y mettant « aucune impression personnelle » en laissant « les thèmes s'imposer d'eux mêmes ». Trente ans à répéter ce machin, trente ans d'absence, un abandon familial caractérisé, sans pension alimentaire ni quoi, sans nouvelles, tranquille, tout ça pour ne même pas apporter le moindre remuement intime dans ce foutu morceau, pour le jouer exactement comme on l'écoute dans les ascenseurs et dans les magasins ? Hein ? Ah, pour être lymphatique, elle est lymphatique, la Clara ! « C'est pour ça que tu es parti, alors, brûle-t-elle de lui demander », mais je t'en foutrais, moi, de 'brûler de demander' ! Clara, qualifiée d'orgueilleuse, va s'installer et écouter bravement une interprétation terne, sans âme, et tout va bien, « comme si près de trente années passées n'avaient eu aucune incidence ». Ah ben merde ! Putain, mais Clara, va t'acheter un merlin, une tronçonneuse, une cognée ou une masse au Bricorama du coin et pulvérise-moi ce putain de piano, à défaut de défoncer le crâne de ce paternel de mes deux, d'écrabouiller à la pince rougie au feu ses petits doigts de virtuose de supermarché ! Je vois que ça, moi. Mais je suis un sanguin. Sûrement. Oui, je suis. En tout cas, je me suis coltiné physiquement à des types qui en avait fait beaucoup moins.
        Laurent Cachard avoue depuis longtemps son amour pour le cinéma de Rohmer et, pour un lecteur comme votre serviteur, sa Clara a des airs de Marie Rivière espérant l'apparition du Rayon Vert, évanescente si on veut être gentil ; charisme aussi épais que ses lèvres, si on l'est moins (j'avais écrit : « si on veut être juste », mais ce serait injuste). Il faut donc s'arrimer coûte que coûte au qualificatif qui l'accompagne, dès le titre : lymphatique. L'orgueilleuse que l'on nous a présentée explique peut-être qu'elle n'a pas cherché à retrouver son père (activement, je veux dire, et à cet égard, sa mère accepte son sort de femme reniée, sans regimber davantage, mais quel est ce monde de spectres ?). Lymphatique, donc. Soit, nous précise par exemple l'ami Robert : « apathique, lent, indolent, mou » de quoi, déjà, exciter l'agacement, par réaction. La Girafe présente des personnages, père, femme, fille, oncle, etc. en délicatesse avec la réalité des autres. D'île en île, ils sont eux-mêmes des îles, complexes à aborder, récifs décourageants, terres stériles auxquelles on pourrait facilement renoncer. Une panoplie d'êtres qui se satisfont du désamour - et de l'absence, y compris à eux-mêmes. Malgré ses actes, et l'acte fondateur de son départ, il n'est pas évident que le père soit un monstre égotique ; il est plutôt apprécié de son entourage et il est probable qu'il ne se déteste pas. Quel regard ont les personnages sur leur propre identité ? On ne le saura pas. Seul le regard des autres pèse et influe. C'est étrange. Les seuls à s'aventurer hors des rives de leur île, hors d'une zone repérée (personnages secondaires, ils ne sont pas exploités), sont les fils surfeurs du père (d'un second lit, comme on dit si mal), capables, eux, de prendre la mer et de se confronter aux éléments et donc, à la vie vraie. Ou encore le second compagnon de Clara, colérique et alcoolique, un mauvais, dont la fonction sera de féconder notre héroïne. Lui, par ses failles, sa cruauté, ses limites, fait relief. Les autres personnages sont confinés dans leurs atermoiements insolubles, négligeables, cérébraux... rohmériens, quoi. On a le sentiment de rencontrer, l'un après l'autre, des condamnés que leur peine ne révolte pas.
        Rappelons que, lymphatique ou pas, la girafe (l'animal) a deux cœurs. Notre Clara bénéficie peut-être, allégoriquement, de ce petit prodige de la nature. Un cœur pour elle, mystérieux, inaccessible, et un cœur pour les autres, qui battrait sans affolement. Un cœur en hiver, pour se référer à un autre cinéaste. Ou bien, l'entreprise est-elle de s'interroger sur la difficulté d'un romancier à cerner son héroïne, et les interventions d'un peintre (personnage fictif où l'on est tenté de deviner la présence bien réelle de Franck Gervaise, somptueux interprète des paysages de Ouessant, qui illustre au trait ce récit), sont là pour rappeler cette difficulté, voire cette impossibilité. Et c'est peut-être cela, la clé : une vie, même observée à la loupe, même créée de toute pièce, est une affaire trop vaste pour être pensée, y compris par le pouvoir de la littérature. J'y vois un constat, infligé par l'auteur à lui-même comme un défi personnel. Celui qu'il s'évertue à relever dans son prochain opus, son roman russe monumental dans lequel une certaine Aurelia a longtemps résisté à son auteur, défi dont nous savons bien qu'il triomphera.

    Girafe lymphatique, Laurent Cachard, accompagné de dessins de Frank Gervaise. Editions Le Réalgar. 82 pages. 11 euros.

     

    * La réponse de Laurent Cachard est à lire sur son blog. Le lien ICI :

    http://laurentcachard.hautetfort.com/archive/2018/09/14/reponse-a-un-forcene-6084622.html

  • 3522

    Sangliers.jpgC'est ce soir, à 19 heures, à la librairie Lune et l'autre de Saint-Etienne, 19 rue Bérard, que j'aurai le plaisir de vous faire partager mon enthousiasme pour le formidable roman d'Aurélien Delsaux, "Sangliers", en présence de l'auteur.

    Enfin, un roman ample, ambitieux, riche tant du point de vue de la forme, du style, que du contenu. Enfin, enfin, un monument dans ce paysage littéraire de nains, une épopée nécessaire au milieu de cette théorie de récits timides, prudents, égotiques, souvent cyniques parce qu'incapables de grandeur.

    Enfin, enfin, de la littérature, bordel ! (je m'excuse).

  • 3513

    Cafe-Touba.jpgBeaucoup la découvriront avec cet album, mais Léah Touitou ne débarque pas de nulle part. A 30 ans juste passés, elle a suivi un parcours personnel, exigeant, exemplaire, une traversée en solitaire avec pour seules armes son talent et son infatigable attention aux autres. Entrée dans le milieu professionnel avec des illustrations, des albums pour enfants, des films d'animation, le mode d'expression qui lui permet le mieux de faire connaître son univers, reste la BD qui lui avait valu d'être publiée dès l'âge de 16 ans. Aujourd'hui la « petite pousse » des éditions Ikon & Imago est devenue une auteure reconnue, éditée par Jarjille, excellente maison aux racines stéphanoises, ce qui n'est pas pour nous déplaire. Le premier album de ce qui pourrait être un diptyque, voire un triptyque, s'intitule Café Touba. En 2011, Léah imagine et conçoit un parcours artistique en Afrique, dont elle connaît déjà le Cameroun. Cette fois, de nombreux pays de l'ouest du continent seront traversés, chaque escale donnant lieu à des ateliers de dessin, de BD, de fresques, de films d'animation, etc. Pour Léah, tout d'abord, l'odyssée est affaire collective, impensable en solo. Elle se démène, contacte associations, institutions, particuliers et professionnels... Un vif enthousiasme accompagne d'abord « Caravane d'images », le nom de son projet. Beaucoup d'encouragements, de soutiens inconditionnels, d'accolades à la vie à la mort (enfin, j'imagine ce genre de chaleur très superficielle) sauf que, de dizaines d'aventuriers prêts à s'envoler pour l'Afrique, la veille du départ, Léah se retrouve bel et bien seule. Elle ne renonce pas (ce serait mal la connaître) et, la peur au ventre de se lancer dans une telle 'performance', elle atterrit à Dakar, au Sénégal, sa première étape. Son travail sur place, les trajets, les rencontres dans les villages, les écoles, chez l'habitant, loin du Sénégal touristique (et des « mamans cadeaux » européennes qui viennent chercher sur ses plages la chair athlétique des garçons pauvres du pays), est le sujet de ces 110 planches en noir et niveaux de gris. Et c'est un régal, une jubilation, une déambulation étonnée, drôle et tendre, au contact d'inconnus dont on se ferait facilement de grands amis. Léah Touitou restitue la langue, les attitudes, les expressions au plus juste. Elle n'est pas la « toubab », la blanche qui observe et juge, elle est de son temps, notre toubab, elle ne croit pas détenir la vérité occidentale. Pétrie d'auto-dérision, toujours en retrait, simple invitée au service d'un projet, (collectif cette fois : tout le monde, y compris une vieille femme du village, participe à la réalisation d'une fresque élaborée avec les enfants d'une école), elle ne sort de sa réserve que si on la pousse à participer à un jeu ou à une fête. Femme accueillie dans un monde différent, ses hôtes la guident et lui expliquent l'histoire ignorée des Européens, la grande histoire africaine, les puissants et vastes empires d'antan, « Est-ce que, parce que ce n'est pas écrit dans vos livres de blancs, c'est faux ? » Le lecteur partagera quelques leçons de vie aussi, dont chaque vrai voyage intime est prodigue, quand un homme dit, parce que notre voyageuse s'impatiente d'attendre une voiture : « Hé, en Europe vous avez la montre, nous on a le temps » ou quand elle remarque une élève métisse et que le professeur de l'école prononce : « Les enfants métis sont toujours beaux. La preuve que Dieu aime les mélanges ». Les carnets de l'auteure, croquis pris sur le vif, détails annotés à la façon des cahiers d'explorateurs, ponctuent et enrichissent la narration, ne sont jamais gratuits. Vous saisit aussi, au détour d'une anecdote qui trouve sa conclusion à la toute fin de l'album, l'émotion, celle qui étreint, vous noue la gorge soudain, et vous réconcilie avec l'humanité. La BD de Léah Touitou, comme le café Touba du titre, aux grains de café grillés, c'est fort et ça donne de l'énergie pour la journée (au moins).

     

    N.B. : Léah Touitou sera à la médiathèque Tarentaize de Saint-Etienne le 2 juin pour un atelier autour de la BD.