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  • Nouvelles vérités d'Hérald

    "On nous avertit aujourd’hui sur les gamins, la télé, la violence, et les troubles du sommeil. Moi, Ken le survivant ne m’a jamais empêché de dormir. En revanche une chanson de Chantal Goya, un sentiment précoce de frustration lié à l’insulte faite à une intelligence naissante, et crac, une envie de meurtre à quoi, 8 ans et demi ? Relativisons un peu le débat."

     On l'attendait tous : la quatorzième fournée des vérités d'Hérald est enfin disponible (depuis quelques jours déjà, mais j'avais d'autres sujets à poster, avec mes excuses...).

    Réjouissez-vous !

  • Réponse d'un éditeur

    "Le manuscrit N° 24243 reçu le 14/11/2007
    est non retenu."

    C'est ainsi que, en cette minute, j'apprends via le site des manuscrits d'Albin Michel que je peux aller me brosser. Un de plus. Un de moins.

  • Marche de protestation virtuelle à Bali

    En fait, il s'agit d'une formule pour désigner une pétition, qui tentera de peser sur la réunion des puissants de ce monde à Bali, concernant les mesures à prendre pour le climat. L'une des originalités de cette pétiion, à part l'idée de marche virtuelle, est la représentativité de chaque pays. Allez-y, histoire que la France n'ait pas l'air trop désinvolte par rapport au sujet.

    A toutes fins utiles je vous livre le lien :

    http://www.avaaz.org/fr/virtual_march_bali/98.php/?cl_tf_sign=1

    (près de 600 000 marcheurs sont déjà en place). La marche commence demain.

  • Florence Foster, fifres et autres fanfares catastrophiques

    Avant tout, pour illustrer cette note, cliquez ici, et régalez-vous avec ces 3min.40 de stupéfiant. Attention tout de même : c'est de la pure.

     Voilà, j'espère que vous êtes remis. Vous venez d'écouter Florence Foster Jenkins qui, au début du XXème siècle, fut assez riche pour croire qu'elle avait du talent et assez sympathique pour que personne ne songe à la détromper. Elle se produisit de nombreuses fois, notamment après l'âge de 60 ans quand, enfin orpheline, elle put s'adonner pleinement à sa passion de la pratique musicale que son entourage, parents et mari compris, avait tenté de décourager. Ses disques calamiteux sont aujourd'hui, à n'en pas douter, des collectors recherchés. Des amis de l'humanité ont livré à Youtube un de ces cataclysmes sonores. Qu'ils soient bénis.

    Naguère, j'animais une émission de radio locale (dans les années 80 pour tout dire, à la libération des ondes. Vous n'avez pas connu, ça, vous), traditionnellement ponctuée de la séquence du "disque le plus nul". Les rayons de notre petite radio me fournissait à ce niveau un matériau riche et varié mais, vous savez ce que c'est, on est toujours à l'affût de la nouveauté.

    La plus ancienne association de ma ville se trouve être une fanfare, que l'illusion appliquée à son propre état lui a permis de qualifier de "philharmonique". On y voit pourtant un contingent classique de cuivres stridents, de tambours à contre-temps et moults flutiaux et percussions hasardant un air à l'oreille plutôt qu'à la partition. Tout cela sous des casquettes à visière de chefs de gare.

    Cette excellente formation s'est décidée un jour à franchir le pas que des visées trop modestes retenaient jusque là : enregistrer un disque de musique classique symphonique. Il en résulta un vinyle 33 tours absolument dément, de la même veine rugueuse que notre amie Florence. La Mairie de l'époque avait préacheté plusieurs centaines de cette production, pour financer le projet qui, sans cela, n'aurait bénéficié d'aucune subvention. D'abord destiné à être offert en cadeau à nos villes jumelées, dès la première écoute, l'idée fut abandonnée : les liens entre pays étaient encore trop fragiles pour se permettre un incident diplomatique. Les centaines de pochettes dorment donc quelque part, attendant qu'un malotru en saisisse un, le numérise, et le difuse sur le net, pour la grande gloire de notre ville.

    Ce fut évidemment mon choix, lors de sa sortie, pour ma séquence du "disque le plus nul". Un triomphe. Entre tous ces morceaux massacrés, j'eus l'embarras du choix, mais il me semble que je passai "Ainsi parla Zarathoustra" de Richard Strauss. Exécuté par la fanfare comme les militaires birmans exécutent leurs opposants : salement, bruyamment, impitoyablement.

    Ce qui me rappelle l'histoire d'une autre fanfare. Dans un petit village italien, un minuscule comptable passait dans les rues sans soulever l'intérêt, n'adressant la parole à ses congénères que pour dire bonjour. Lors de son décès, on découvrit d'abord qu'il était extraordinairement riche et sans héritier. Son testament indiquait pourtant qu'il souhaitait léguer toute son énorme fortune à la fanfare du village. A une condition : chaque année, à la date anniversaire de sa mort, la minable fanfare devait se rendre sur sa tombe et jouer à la perfection une oeuvre classique, choisie par lui, et particulièrement inaccessible à autre chose qu'à un orchestre symphonique de niveau national. Un huissier, assisté d'un critique professionnel, devait assister à la prestation et déterminer si, oui ou non, la fanfare méritait l'héritage.

    Cela se passait dans les années 60. Je ne sais pas si la fanfare essaie encore aujourd'hui, mais j'imagine le sourire enterré du vieux misanthrope, définitivement vengé des dissonnances dominicales infligées par la fanfare, sa vie entière.

  • Ma deuxième vie

    cb617a9e4955d8568398764e85122132.jpgJe m'emmerde sur second life ! Mais je m'emmerde !!!

    Enfin, disons que je laisse ce soin à mon avatar.

    Kargo Tae, que j'avais laissé pendant un an sans nouvelles, m'attendait, surhumainement patient, avec son débardeur, sa jeunesse, sa carrure, sa beauté androgyne (de dos, au premier plan de la photo -en gros, vous l'aurez compris, une antithèse), et s'est remis à arpenter les décors anguleux de Second Life dès la première sollicitation de souris. Pourquoi cette reprise ? Parce que, grâce aux conseils de Lorenzo Soccavo, j'ai appris que je pouvais rejoindre une communauté francophone : Gaïa. Nous voilà bien, nous voilà entre nous, entre francophones, entre gens du même monde qui peuvent se comprendre. Terrifiant, cette manie grégaire, même dans un monde virtuel où, a priori, aucune limite ne devrait être posée. Au lieu de ça, les internautes ont répliqué l'univers con qui les entoure dans la vraie vie : nudité interdite, armes interdites, terrains interdits, obligation de propreté, présence de l'argent, etc. Y a-t-il (y aura-t-il) une île anarchiste sur second life ? Je crains bien que non. Dire que la possibilité d'un monde virtuel était l'occasion de créer une belle utopie... La seule occasion même, puisque les utopies réelles se heurtent aux contingences réelles. Quelle limitation de l'esprit, quel manque d'imagination !

    La même intolérance vis-à-vis de l'étranger est reproduite ici. Dès mon arrivée sur Gaïa, une accorte avatar(e) approche : "Hello", jusqu'ici tout va bien, je suis capable de saisir un dialogue, je réponds, dis que je m'emmerde, elle me répond "lol", ce que je comprends, puis suit un "pk ton pseudo ?" j'ose demander : "PK ? Pardon, en Français ça signifie ?", la jolie avatar(e), tellement abasourdie par mon inculture webesque, fait mine de s'évanouir, dans une posture façon dame aux camélias. "Ok", dit Kargo Tae, "Je vois que la tolérance pour ceux qui ne savent pas est la même dans les mondes virtuels que dans le nôtre. Salut" j'ai volé pour aller m'emmerder un peu plus loin.

    J'en appelle à mes potes qui connaissent mieux que moi les modes de communication sur Second Life : vous n'auriez pas envie de créer un groupe anarchiste pour foutre un peu la zone dans leur monde parfait de merde ?

  • S'auto-éditer

    Promis juré, jamais je ne m'auto-éditerai ! Enfin, c'est que j'ai toujours dit jusqu'à présent, trouvant honteux d'en venir à cet expédient pour -nom de dieu- imposer enfin ce que j'écris aux autres. Ce serment, je l'ai fait souvent, je l'ai même assorti de l'encouragement suivant, à mes amis : « Si un jour, j'édite mes propres livres, je vous autorise à me cracher dessus ! »

    Cependant, cependant... Depuis quelque temps, et comme les réponses des éditeurs se succèdent dans un refus unanime, je dois avouer que je m'interroge. J'écris depuis plus de dix ans très régulièrement, j'ai derrière moi une demi-douzaine de romans, des pièces de théâtre, des poèmes, des nouvelles et des scénarii par dizaines... L'écriture est ma vie et mon sang, je ne saisis rien du monde sans l'avoir transcrit par le moyen de mon écriture. Et quand j'assiste à la parade d'écrivaillons que tout le monde considère comme des écrivains parce qu'ils se sont payés l'impression de leur unique livre... J'enrage, et me questionne.

    Dois-je m'auto-éditer, obtenant par ce biais ridicule la notoriété d'un véritable auteur, pour qu'ensuite la chance me soit donnée d'être publié autrement ?

    Je n'en suis pas là, mais il se trouve que j'y réfléchis avec un sérieux dangereux. Je sais que cette décision prise le serait contre moi-même, m'infligerai une blessure que ne pourrait cicatriser que la reconnaissance de mon travail, enfin disponible. Etre lisible, pour un auteur, c'est tout de même une finalité qui mérite certains sacrifices, non ?

  • Révélations sur Cloverfield

    Je vous le dis en passant : le 10 décembre, j'aurai des infos exclusives sur "Cloverfield".

    Voilà voilà voilà....

  • La dimension des miracles

    f916060d6f1a42638987fb8cbe97e469.jpgDe Robert Sheckley (avec une vilaine couverture de Siudmak).

    Ce livre a une histoire. Il y a fort longtemps, un jeune étudiant travaillait pendant l'été dans un Office HLM, balayait les cages d'escalier, chassait les rats de derrière les poubelles, dans le local ultime des vide-ordures à 6 heures du mat' (ça vous apprend la vie).

    Bon, c'était moi, d'accord, on ne va pas poursuivre vainement sur le ton indirect. Dans une des poubelles pleines, je découvre, avec un ou deux San-Antonio, ce livre. A l'époque, gros lecteur de SF, je lisais beaucoup d'anglo-américains : Huxley, Wells, Asimov, Clarke, Herbert, Van Vogt, Bradbury, De Camp, Spinrad, Brunner, Bloch et King (plutôt fantastiques d'ailleurs), K. Jetter, K. Dick... mais je ne connaissais pas Sheckley.

    Je découvre un ton neuf, drôle, un conte philosophique à la manière de Voltaire, mais avec l'invention délirante et non-sensique de l'école anglaise. L'histoire est celle du médiocre Carmody, bureaucrate fallot, seulement doué dans le pérorage philosophico-dérisoire, capable d'ergoter sur tout et n'importe quoi, de discourir à perte de vue sur n'importe quel sujet qu'il ne connaît pas. Bref, Carmody est diablement humain et fichtrement proche du gamin que j'étais, raisonneur et bavard (comment, toujours ?). Rentré chez lui, prêt à s'offrir un petit whisky dans son fauteuil, il assiste à la matérialisation d'un extra-terrestre venu lui annoncer qu'il vient de gagner au grand Sweepstake intergalactique, et qu'il doit venir avec lui au Centre y retirer son Prix. Carmody accepte. A l'autre bout de la galaxie, Carmody reçoit donc son Prix (et quel prix !), mais ensuite... personne n'a envisagé son retour à la maison. Comment ce petit factotum insignifiant va-t-il rentrer sur la Terre ? D'autant plus qu'il ne suffit pas de remettre les pieds sur la Terre "Où", c'est-à-dire la terre à l'endroit où elle se trouve, mais aussi la terre "Quand", c'est-à-dire au bon moment, et enfin la Terre "Quelle", la bonne terre, celle de Carmody. Et le temps presse : perdu dans l'espace, Carmody est poursuivi par un prédateur généré spontanément, selon la loi de l'Univers qui veut que toute créature possède son prédateur, dans le but exclusif de manger du Carmody. Une course contre la montre s'engage.

    Ce livre, je l'ai lu à l'époque une bonne dizaine de fois. Ce qu'il disait du monde, ce qu'il disait de l'humanité, ce qu'il disait du destin, sous ses dehors d'aimable aventure, me touchait profondément. Surtout la fin. Et puis, un jour, je l'ai prêté, je ne sais même plus à qui. Le je-ne-sais-plus-qui ne me l'a jamais rendu. J'étais bien triste.

    Il y a quelques mois, lors d'un festival de la SF, bien connu par chez nous, je retrouve "la dimension des miracles" sur l'étal d'un bouquiniste. Je soupçonne même, compte-tenu de certain pli, certaines usures singulières, qu'il pourrait s'agir du mien, revenu sous mes yeux au terme d'un périple indicible. Je l'ai donc acheté et relu, à haute-voix, pour la délectation de ma douce. J'ai retrouvé Carmody, l'ai découvert plus bavard que je ne pensais, mais l'émotion était toujours là.

    je n'ai jamais rien lu d'autre de cet auteur, redoutant qu'il ne se répète dans ses autres livres.

  • 1 film, 1Mo

    Pointer un lieu sur Google earth, activité anodine. Mais avez-vous pensé aux autres ?

    http://www.latelelibre.fr/index.php/2007/11/1m06-google-earth/

    D'accord, le billet est un peu court, mais que voulez-vous, il ferait beau voir que je sois soumis sur Kronix, à la même course au rendement qu'exige la vie professionnelle (vous noterez que je n'ai pas écrit : "ma" vie professionnelle. C'est que mon métier ne connaît pas la contrainte de l'efficacité à tout prix. Je sais, c'est enviable).

  • Temps immémoriaux

     Difficile de déterminer quel atavisme prévaut dans la construction de notre propre psychologie et des choix qu'elle engendre. J'explique. Je considère souvent les actes, les arts, les grandes questions de l'existence, à l'aune de temps immémoriaux, dans une fourchette de cinq à cinquante mille ans. Ma première préoccupation est de comprendre si cette disposition à ne voir la vie que comme une agitation dérisoire au regard de l'éternité est originelle et m'a inspiré mon amour pour la préhistoire et les vastes échelles géologiques, ou si ma précoce fréquentation de sites préhistoriques, de terrains renfermant des fossiles, m'a apporté cette distanciation millénaire. Je ne peux pas répondre, d'où l'intérêt de la question. Seules les questions des civilisations demeurent, leurs réponses sont effacées (ne vous emballez pas sur cette dernière phrase -si vous l'avez lue- elle est absolument inintelligente, n'a aucun sens, bien qu'elle semble en avoir, c'est mon côté Christian-Bobin-pour-rire).

    Quoi qu'il en soit, en prenant pour mesure de telles ères temporelles, la plupart des actes des hommes semblent vains, l'art n'en parlons pas (bon ou mauvais, avant-gardiste ou suiviste, deux-mille saisons qui passent mettent tout le monde à égalité), et finalement, à la réflexion, la seule entreprise qui signe la réussite des hommes à travers le temps, c'est leur procréation.

  • L'avenir du livre

    Changement de cap : j'ai décidé de poster cet article plus tôt que prévu. Restons dans l'actualité.

    Le mercredi 28 novembre, à la médiathèque de Roanne, devant une petite assemblée qui ne comptait ni libraire (sauf ma copine), ni imprimeur, ni éditeur, ni directeur de journal, ni graphiste, ni aucun professionnel des métiers du livre, le prospectiviste Lorenzo Soccavo a donné les clés de la révolution qui nous attend : celle du livre électronique.

    Lorenzo Soccavo ne l'a pas dit l'autre soir, en conclusion de sa conférence, mais on l'a tous pensé très fort : « ne nous racontons pas d'histoire, le livre-papier, c'est fini ». Retardé d'année en année pour cause de coût et des multiples résistances des industries traditionnelles en place, le livre électronique arrivera tôt ou tard, et remplacera, à quelques exceptions près, le livre-papier. Que cette révolution prenne trois ou dix ans, autant dire que nous y sommes. Il existera toujours de beaux livres imprimés, comme il y a toujours des disques produits en vinyle, mais l'ère de la chaîne graphique est bel et bien en passe de s'achever. On peut crier, se lamenter, renâcler, trouver toutes les bonnes et belles raisons qui font qu'un livre est un objet sans équivalent, n'empêche, la prochaine génération n'en verra probablement plus que dans les réserves protégées de musées et de médiathèques, et chez quelques particuliers amateurs. Le ton que j'emploie pourrait vous laisser croire que je me réjouis, mais tel n'est pas le cas : j'ai été graphiste, illustrateur, j'écris, je lis, j'ai travaillé dans le milieu de l'imprimerie, j'achète quand je peux des éditions anciennes. J'aime le livre, je suis sensible à sa beauté, à son toucher, à tout ce qui en fait un objet de culture différent et unique. Mais je refuse de me voiler la face. Le livre-papier, à 95 %, est condamné. Il en fut ainsi quand le papyrus remplaça la tablette d'argile, quand l'écrit passa de la forme rouleau à la forme codex, quand l'imprimé chassa le manuscrit, il en a toujours été ainsi. La seule inconnue, c'est la vitesse de la révolution. Mieux on y sera préparé, mieux cela vaudra.

    D'abord, quelle est cette révolution ? Pas seulement la transmission de l'écrit via l'ordinateur, mais un support nouveau : le papier électronique, sur quoi le texte n'est pas un scintillement de pixels, mais bel et bien une encre, l'encre électronique. C'est le premier point. La page que vous lirez s'affiche sans rétro-éclairage, elle est blanche, le texte est d'un beau noir stable. S'il n'y avait pas la vitre de protection, on pourrait croire à un papier glacé, d'épaisseur normale (le premier artiste sur papier électronique a exposé il y a peu à Paris : sans vitre de protection, les dessins ressemblent à des lavis d'encre de chine sur papier). La feuille de papier électronique est d'ailleurs, dans l'appareil, ce qui coûte le plus cher, le reste est d'une technologie équivalente à une bonne calculatrice. Le coût d'un reader oscille de 300 à 600 euros. On peut charger, par un port USB ou grâce à une connexion wifi, l'équivalent de plusieurs centaines de livres (du format d'un livre de poche, un reader pèse 150 grammes environ). Encore en noir et blanc, l'encre électronique en couleurs existe à l'état de prototype, mais c'est évidemment une question de mois avant sa mise sur le marché.

    Les premiers média en lice sont les journaux, qui ont déjà entrepris le virage informatique. Avec un abonnement, vous aurez la dernière édition sur l'appareil, enrichie de toutes les possibilités de liens, hypertextes, vidéo, sons, qu'offre l'hybridation technologique papier électronique/web. Les guides touristiques suivront logiquement (Le GPS reconnaît votre position, vous signale immédiatement, à la page que vous ouvrez, le restaurant du coin, l'expo à voir, vous enseigne sur l'historique du monument devant lequel vous vous trouvez, etc.), ainsi que tous les dictionnaires, pavés genre « code civil », plus pratiques sous cette forme évidemment, etc. Idem pour toute la littérature "documentaire" : thèses, mémoires, synthèses de colloques, essais, etc. quel est l'intérêt de les imprimer sur papier ?

    Les publicitaires avertis, je suppose, de la révolution en cours, doivent se frotter les mains : les affiches dans les sucettes D... pourront se mettre à jour toutes seules, changer en cours de journée. Les affichages de prix dans les magasins se modifieront automatiquement.

    Le cartable électronique va enfin trouver son véritable médium. Les éditeurs scolaires sont, j'espère, au fait des dernières technologies. Ils seront parmi les premiers touchés.

    La littérature. Ah. La littérature. Que va-t-elle devenir ? Que vont faire les éditeurs ? Comment livrer au téléchargement sans se faire pirater, les ouvrages sortis ? La question se pose déjà via le net, et concerne surtout les best-sellers, comme pour la musique. Mais le e-book va accélérer le phénomène. Dans un premier temps, les libraires vendront des livres électroniques avec -pourquoi pas ?- un catalogue de classiques déjà disponibles. Mais ensuite, comment éviter que la spécificité de ce matériel, mi-informatique, mi-culturel, échappe aux rayons informatiques des grandes surfaces ? Quid du prix unique pratiqué en France, quid des taxes différentes, relativement au support et au contenu ? Quelle protection est-elle envisageable pour les métiers du livre, dans un contexte européen ? Mondial ? (en Chine, les librairies électroniques sont déjà nombreuses).

    Le livre électronique conforte la distinction entre le médium et le discours. Pour moi, un livre est autant un objet qu'un texte. Un texte passionnant sur le net, n'a pas le poids du même sur papier, sans jouer sur les mots. Oui, il y a des cas où le contenant donne une force au contenu. Le journal de Renaud Camus, pavé annuel très attendu, aurait-il la même aura en édition électronique ?

    En tant qu'écrivain inéditable (je pouffe), je sais que je peux vendre en ligne une version pdf de mon travail. En vendre peut-être davantage qu'en version papier, mais je sais que mes romans ne se liront pas de la même façon, imprimés sur un beau papier ou sortis d'une imprimante laser. J'ai longtemps considéré que l'essentiel était de dire, peu importe le moyen. Mais l'expression gagne une force par la technique la plus propre à la magnifier.

    Mais mes réticences sont celles d'une génération qui a grandi avec le livre, avec le romantisme du livre, et même, osons le dire, sous l'ombre tutélaire du Livre. La génération suivante s'accomodera sans sourciller d'une manipulation légère, pratique, et de l'absence de rayons de bibliothèque à la maison.

    Tout de même, un angle sous lequel on peut se réjouir : l'éco-bilan du papier électronique, tout plastique qu'il soit, est nettement en sa faveur. L'industrie du papier, la chimie des encres, sans parler de l'abattage des arbres (aspect ressassé mais pourtant négligeable : 4% du papier utilisé l'est pour imprimer des livres. Le reste, c'est de l'emballage), sont un désastre pour l'environnement.

    Quant au coût humain, social et industriel, certains secteurs vont souffrir dans la décennie qui vient. Un cataclysme ? C'est possible. En tout cas, une industrie sinistrée comme le fut celle des mines ou la sidérurgie. Que faire, à part se préparer ? Ce qui est inquiétant, c'est qu'on a entendu aucun politique se formuler à ce sujet. La politique de l'autruche ?

    A voir, cette étonnante vidéo. Imaginer les 50 années à venir. Curieusement, je trouve les perspectives évoquées assez timides : elles ne tiennent pas compte des deux prochaines révolutions : l'ordinateur quantique et les nanotechnologies.