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actu - Page 2

  • 3770

    En ce moment, si le Web pouvait s'accorder au silence de nos rues...

    (et disant cela, je participe au bavardage, je sais bien).

  • 3769

    De retour des courses, ma douce me rapporte le constat étrange qu'elle a pu faire : dans le supermarché, pas de musique, les gens vont lentement, parlent doucement, sont extrêmement polis. Comme si l'apnée générale avait la vertu de nous faire reconsidérer l'efficience de nos activités, nos bruits, nos gesticulations d'antan, et révélait leur vanité. Tant d'effets inattendus qu'il faudrait commencer à les lister. Trop paresseux pour me charger de l'exercice, j'en appelle à la bonne volonté des autres confinés.

  • 3768

    Aucune analyse pertinente à disposition. Je m'étais promis de lire beaucoup ; j'écris un peu. Hors ces activités ou non-activités tournées vers ma petite personne, bien sûr, j'écoute, je lis, je m'informe. Cependant, la seule scrutation du quotidien est passionnante. On n'a pas tant d'occasions, sur une vie, de traverser un moment historique. Alors, me retenant d'en penser quelque chose, je me contente d'observer les grandeurs et petitesses. Je comptabilise plus de petitesses étonnantes que de grandeurs exemplaires, il faut bien le dire, mais peut-être est-ce que je ne regarde pas du bon côté... On peut estimer, avec tant d'autres, que cette crise transformera le monde (en bien, veut-on croire, l'alerte étant chaude). Je n'en suis pas si sûr. Dès que nous aurons repris nos habitudes d'avant, les mêmes biais produiront les mêmes effets.
    En fait, je lis dans les "journaux de confinement" qui fleurissent un peu partout sur le Net, l'opportunité, pour chacun, de simplement renforcer ses convictions, quelles qu'elles soient. Si un changement, ici, était perceptible, on pourrait imaginer une transformation à venir de la société. Cette inertie de réflexion, lestées par nos attendus, accable bien des élans optimistes.

  • 3766

    La crise due au coronavirus accable l'obsédé, avide d'attouchements : ses mains impuissantes, inutiles, battent l'air à la recherche de corps qui gardent leurs distances. Cette frustration provoque parfois, dans les cas extrêmes, panique, fièvre et gêne respiratoire, et par conséquent accueil aux urgences. Le procédé qui permet aux hôpitaux de rejeter ces sujets non contagieux est secret, mais on sait qu'il a causé plus de démissions d'infirmières que l'épuisement du personnel de soins dans les derniers jours.

  • 3764

    Et puis, l'épidémie cessa. Mais personne ne voulut retourner au boulot.

  • 3758

    En tout cas, pour le confinement à domicile, le vieil ermite que je suis est fin prêt.

  • 3757

    Un rituel. C'est un rituel, et ça ne se discute pas. Ponctuellement, Kronix évoque la sortie des livres de Cachard, et Le Cheval de Troie analyse scrupuleusement les nouveaux romans de Chavassieux. Un pacte tacite, conclu à la naissance éditoriale des deux. Je dois admettre que Kronix est quelque peu débiteur, dans l'histoire. Les billets de Laurent étant nettement plus riches et fouillés que les pauvres recensions dont je suis capable. Je sais à peu père écrire, mais pas du tout communiquer les causes qui me font aimer un texte. Un véritable handicap, qui s'élève d'un cran quand il s'agit de parler de poésie. Le déséquilibre augmente encore avec cette analyse de "Noir Canicule" par Laurent Cachard, ici.

    C'est comme toujours fin, pertinent, amical (sans jamais être complaisant, l'honnêteté fait aussi partie du pacte). Bref, merci Laurent, et je n'en dis pas plus, parce que je suis un peu ému quand je le relis, à vrai dire (et me voici encore incapable de dire... enfin, voyez, on n'en sort pas).

     

     

     

  • 3756

    Une des toutes premières critiques à propos de "Noir Canicule" me fait vraiment chaud au cœur. Sur le blog de cannetille, la lectrice qui a parfaitement compris le sens et les thèmes du livre. J'en suis tout chamboulé.

    Elle écrit : "Cette canicule a au final des accents vaguement apocalyptiques, ressentis dans leur chair et dans leur âme par des personnages atteints dans leur intégrité et leurs fondamentaux. Elle est la représentation au sens propre de leur surchauffe personnelle, dans un monde qui doute et se sent à la dérive, vers un inconnu inquiétant et dangereux. 
    Etrange et dérangeant, voici un livre dont on sort pas indemne et qui laisse des questions plein la tête, tant cette histoire reflète le mal-être d'une société de plus en plus sujette à la peur, rationnelle ou non, de ne pas maîtriser son avenir."

    En plus, elle ne divulgâche pas. Merci, chère lectrice inconnue.

  • 3755

    Adèle se barre, Virginie enrage, Natacha réplique, Stéphanie tente de faire la part des choses. Pendant ce temps, les mecs se taisent, mains dans le dos, en regardant leurs chaussures.

  • 3752

    Hier soir, nous célébrions l'ouverture d'un chantier d'importance qui va, Cédric Fernandez (au dessin), Franck Perrot (à la couleur) et moi (au scénario), nous embarquer pour une collaboration de deux ans, au bas mot : la réalisation, pour Glénat, d'une BD en deux volumes sur la conquête du Mexique par Hernan Cortés. Un projet lancé il y a une dizaine d'années sous l'impulsion de Cédric, et qui a mis tout ce temps pour trouver un éditeur.
    Hier, avant de déboucher le champagne, tandis que je transférais de la documentation sur mon ordinateur, Cédric et moi nous amusions du nombre de fichiers contenus dans le dossier qui, par thésaurisation, résume notre collaboration : 11 titres. Et tous d'un bon niveau, je vous assure. De la piraterie fantaisiste à l'adaptation littéraire, d'un récit d'histoire contemporaine à un drame shakespearien ayant pour cadre la Scandinavie du VIIIe siècle en passant par la mythologie grecque, nous avons exploré tous les thèmes qui nous interpellaient. Le plus étonnant, encore, est la durée que l'ensemble symbolise : une vingtaine d'années. Dire que nous sommes têtus serait un euphémisme, vous l'avez compris, mais est-ce bien cet entêtement qui s'est révélé payant ? En partie seulement : le facteur déterminant est que Cédric et Franck assurent depuis pas mal d'années des réalisations qui font des succès de librairie (Saint-Exupéry, Les forêts d'Opale, Les Faucheurs de vent, bientôt Notre-Dame de Paris) et que les éditeurs leur font confiance, désormais. Je ne suis donc qu'un invité, reconnaissant de la chance qui lui échoie. Sans Cédric, je sais que j'aurais pu m'échiner encore des années sans le moindre résultat. L'aventure commence donc, et nous entrevoyons l'énormité du défi. La reconstitution d'une histoire aussi exotique et lointaine, la richesse graphique que nous voulons atteindre, l'ambition du récit, nous font considérer ce diptyque comme un enjeu particulier. Pour le reste, si vous lisez ce billet comme un hommage à mon ami dessinateur qui a si fidèlement tenté de me faire intégrer ce milieu pendant tout ce temps sans rien lâcher, vous avez raison.

  • 3750

    « Le sort dans la bouteille » est une commande, une pièce écrite à l'origine pour être interprétée par un seul comédien : François Frapier (qui fut naguère, un exceptionnel Dédale, dans « Pasiphaé »). J'avais imaginé pour lui un personnage, mauvais et impatient, houspillant le public qui ne s'installe pas assez vite, et presque pressé d'en finir. François aurait interprété tous les rôles, commentant les faits et les actes, et sommant le public d'approuver ou de protester.
    L'histoire qui inspire ce spectacle est bien connue des romorantinais. C'est un fait-divers de la fin du XIXe siècle, en Sologne : l'assassinat d'une pauvre vieille par sa fille et son gendre, paysans convaincus de se débarrasser du sort qui s'acharne sur eux, en la faisant brûler vive comme une sorcière. Les deux finiront décapités, sur la guillotine installée devant l'hôtel de ville de Romorantin.
    La très belle idée de François a été de chambouler le parti pris initial. Il a confié « Le sort dans la bouteille » aux élèves de son « atelier 360 degrés ». Deux poignées de personnalités, un concentré de jubilation et de curiosité, qu'il a emmené dans ce projet pendant plus d'un an. D'abord, il les a invités à considérer le texte comme une matière à creuser, à malaxer, à domestiquer, à s'en servir aussi de malle au trésor : allez y chercher des pépites, des colliers, des masques, y fouiller les intentions, les mots, les cris, les éclats et les ombres. Une démarche déstabilisante pour qui aborderait le théâtre de façon conventionnelle : distribution des rôles, apprentissage, exploration des personnages, costumes et décors... Là, les comédiens, tous amateurs, ont d’abord dû errer dans l'épaisseur du verbe, comme s'y baignant, s'y égarant parfois. Période difficile, m'ont-ils confié. Difficulté voulue par le metteur en scène. Et puis, lentement, la pièce a émergé, récit choral, voix dépliées, reprises, personnages échangés, prières, colères, peurs, haines, cocasseries et drames… les comédiens se sont appropriés les mots.
    J'étais récemment invité à la première représentation du texte, une forme hybride entre interprétation et lecture, une forme vivante, en voie d'achèvement. Expérience passionnante. On ne voit plus tel ou tel, tous les personnages sont comme fragmentés et se reconstituent sous nos yeux, par la magie de l'incarnation à plusieurs.
    La salle de la MJC était pleine, la chaleur vite étouffante. L'idée de faire brûler une mèche de cheveux dans un des rares moments « mis-en-scène » de la pièce (un rituel de sorcellerie dans la pénombre), a coloré le moment d'une âpreté bienvenue, tout à fait cohérente avec le propos.
    Pour le reste, la troupe s'est démenée, s'est amusée, a capté l'attention et suscité les réactions espérées, rires déployés ou gorge nouée. C'était bien. Et prometteur, car ce n'est qu'une étape : l'expérience sera poursuivie jusqu'à effacement du texte, appropriation et incarnation. Au delà d'une simple interprétation, grâce au travail en profondeur entrepris par François et sa troupe.
    Vous pensez bien que, pour un auteur, assister à cette ré-génération, ressemble à une déclaration d'amour. Et comme chaque fois qu'on a dit m'aimer, j'ai d'abord été incrédule, avant d'être soulevé de reconnaissance.
    Merci François, merci les amis.

  • 3747

    Au détour de la lecture d'un article, il peut arriver qu'on tombe sur une information dont on ne voudrait pas s'encombrer mais qu'une mémoire docile inscrit en nous pour des années. Par exemple, j'apprends un jour que, sur les conseils de Carla, Nicolas Sarkozy s'est entraîné à déféquer sans uriner pour muscler son périnée. Voilà, c'est fait, cette anecdote dont je me contrefous est gravée à jamais en moi. Et en toi, désormais, infortuné lecteur.

  • 3742

    Voilà. Disons, début mars ?

     

    Chavassieux_Noir_canicule.jpg"Nous sommes en 2003. Lily est taxi. Elle accompagne un couple de vieux agriculteurs sur la route de Cannes, en pleine fournaise. Et si la canicule se prolongeait indéfiniment ?

    Sur l’autoroute, les bolides klaxonnent de loin, fusillent le rétroviseur d’appels de phare et passent en trombe.

    À mesure que la température monte, les personnages se dévoilent, entre amour et violence. Lily songe à sa plus grande fille, Jessica, que l’adolescence expose aux premières déconvenues sentimentales. À son ex-mari, qui l’a quittée pour une femme plus jeune. À leurs anciens jeux érotiques...

    Il y a quelque chose de pourri dans l’atmosphère. La vie semble se résumer à une peur de souffrir.

    Et le lecteur est loin d’imaginer ce qui l’attend…"

     

    (C'est la quatrième de couverture. Elle donne bien le ton, je trouve)

  • 3741

    J'apprends dans l'excellent documentaire en deux parties « Musulmans de France » qu'un moment marquant dans l'histoire des musulmans vivant dans notre pays, est celui où, pour toute réponse à la Marche pour l'égalité et contre le racisme dans les années 80, s'est créé le mouvement « Touche pas à mon pote ». Un camouflet, selon les témoins du documentaire. Pourquoi ? Parce que les marcheurs voulaient une réponse d’État, pas un câlin de militants de gauche ou de sympathisants à leur cause, parce que les relais de « Touche pas à mon pote » étaient considérés par les jeunes musulmans comme un club de privilégiés, condescendant envers les petits beurs de banlieue et se voyant comme des protecteurs. De plus, le détournement (supposé) de la main de fatma en pin's « Touche pas à mon pote », a été très mal vécu. Je l'avoue : j'ai porté le pin's en question. J'avais 23 ans. L'arborer m'a d'ailleurs permis, par les réactions suscitées, de savoir à qui j'avais à faire dans mon entourage, notamment professionnel. Mais je n'aurais jamais imaginé que ceux que je voulais « défendre », voyaient mon engagement et celui de mes pairs, comme une insulte. Décidément, l'enfer est bel et bien pavé de bonnes intentions. Comment ne pas récidiver ?

  • 3740

    couvHB.pngEst-ce qu'une forme littéraire, longuement élaborée au fil des ans, très aboutie, ne fait pas prendre à son auteur le risque de se trouver démuni face à certains enjeux ? Je m'explique : j'ai souvent dit ici mon admiration pour le travail d'Hervé Bougel, en tant qu'éditeur bien sûr (les éditions Pré#Carré, c'est lui), mais aussi en tant que poète (« Travails » ; « Les pommarins ») et auteur de textes en prose (« Tombeau pour Luis Ocana », par exemple). L'obsession de l'auteur, si l'on veut, est l'économie, et cette économie de moyens et de mots (« quand on veut dire quelque chose d'essentiel dans la vie, ça tient en peu de mots : Ta gueule, Je t'aime, etc. » dit souvent Hervé Bougel) conduit à une sorte de netteté, presque de sécheresse (non pas de stérilité, entendons-nous bien). L'ambition de son dernier ouvrage « Une inquiétude », parue aux éditions Mazette, l'oblige à définir les contours de ce sentiment aussi incertain et diffus par les moyens d'une écriture qui a eu pour exigence principale de se débarrasser des scories et des séductions, de tout lyrisme, pour mieux dire les choses avec simplicité et... netteté. La lecture de « Une inquiétude » me fait me poser la question qui ouvre ce billet, aussi naïve soit-elle (car pourquoi une écriture serrée et aiguisée serait-elle contraire, a priori, à l'exploration de sentiments confus ?). C’est pourtant cet écart (ce hiatus ?) que j'ai ressenti. C'est un beau texte, mais dont la rigueur m'a tenu à distance de ses enjeux.
    Bougel place d'emblée dans la bouche de sa comédienne (car c’est un texte qui devra être porté sur scène, et c'est un élément important sur lequel je reviendrai), un constat : l'inquiétude est une angoisse commune, « simple, ordinaire, banale » ; « pas un drame, pas un malheur ». Comment la définir, « cette chose silencieuse et cachée » dont on ne connaît ni la force, ni la forme ? Comment « nommer cette chose par ce qu'elle n'est pas » ? Il ne s'agit donc pas de saisir « une » inquiétude particulière, mais son principe-même. Alors, on multiplie les synonymes, les équivalences : « malaise », « renoncement », « trouble », « mouvement », « angoisse », pour tenter de cerner le phénomène. On échoue. Le monologue explore dans une deuxième partie la solution provisoire qui s'impose : l'attente. Puisque définir est impossible, puisque saisir est difficile, reste à patienter « sans espoir, sans sommeil ». Une attente qui frôle l'apparence de la mort. « Je suis un caillou » dit-elle. Le troisième monologue approfondit cette idée d'une attente aux parages de la mort, où le corps accepte de devenir tertre et tombe « mains croisées sur mon ventre », livré à la dévoration des petits insectes. Elle s'interroge, avec l'auteur : « peut-être un mot m'a-t-il manqué ? » Question cruciale.
    Le dernier monologue fait surgir les sensations physiques, « j'entends tout battre en moi », le corps retrouve le froid, et la langue de Bougel, l'efficience de sa clarté. Ce quatrième monologue (le texte est sous-titré « Quatuor ») se clôt sur l'évidence de la présence, l'indiscutable existence physique qui permet ou impose de se penser « c'est moi, / c’est là que je suis / là que je vis (…) là où j'ai la patience d'être moi. » Ce n'est peut-être pas un mot qui lui manquait, mais la reconnaissance de sa simple présence au monde.
    Alors, ce qu'est l'inquiétude, selon Bougel ? Le laps compris entre l'angoisse de la perdition, et les retrouvailles avec sa densité de chair. C'est en tout cas ainsi que je l'ai compris(e).
    Une dimension essentielle doit être rappelée, et mérite un prolongement de cette brève évocation : le texte est écrit pour être porté par une comédienne, et accompagné au violoncelle. On peut donc estimer que l'expérience de la seule lecture papier ne lui rend pas justice. Car c'est ici que la « netteté », l'apparente froideur de certains passages, deviennent un atout : il y a dans ces lignes toute la place voulue pour qu'une comédienne les incarne. Ces mots, ces vers dépouillés, si sobres qu'ils semblent simplistes : « mon cœur serré / est en peine / en tristesse » prendront alors une puissance qu'une lecture silencieuse ne permet pas de percevoir. Je veux dire que Hervé Bougel a produit un véritable texte de théâtre et, qu'à ce titre, aborder « Une inquiétude » sous sa forme publiée, si c'est nécessaire, ne constitue qu'une approche de l’œuvre telle qu'elle devrait être vécue. C’est peut-être là que se situe, à la réflexion, l'écart que j'évoquais plus haut. Non pas un écartèlement entre forme littéraire et motif, mais une déperdition de sens et d'intention entre la dureté de vers égrenés sur papier, et leur profération sur scène.
    On a donc hâte d'en juger lors d'une mise en scène, soutenue par une bonne comédienne.

    « Une inquiétude (le quatuor) » Hervé Bougel. Editions Mazette. 50 pages. 10 euros.

     

  • 3739

    D'accord, je ferais mieux d'écrire, mais si je passe pas mal de temps sur Youtube, c'est au contact de chaînes que j'estime d'utilité publique, ou sinon, au moins, passionnantes. J'ai décidé de vous faire un petit florilège.

    D'abord, il y a les youtubeurs zététiciens qui s'évertuent à nous offrir les outils critiques pour trier le bon grain de l'ivraie au milieu du déferlement d'informations auquel nous sommes confrontés quotidiennement. Toutes ces chaînes sont soigneusement réalisées, elles suivent une déontologie claire (liens vers les articles et les sources en description, prises en compte des critiques...)

    Le premier de tous, reconnu par ses pairs : Hygiène mentale. Dissection des biais de confirmation, des mille-feuilles argumentatifs, explications sur la charge de la preuve, les graphes bayésiens, l'argument d'autorité, etc. Une véritable leçon d'éveil pour tout citoyen.

    Défékator (on défèque sur les fakes), n'est pas le plus élégant, il utilise parfois un humour pénible, mais son auteur s'empare de fakes, de vidéos, de rumeurs, de légendes urbaines, et surtout décrit les techniques qui lui permettent point par point, de remonter aux sources,  de situer, de dater, et démonte ainsi les mèmes les plus sophistiqués. Au passage, on apprend toutes les possibilités d'utilisation de la puissance de Google. Si ces techniques étaient apprises dès le collège, le complotisme n'aurait pas la même capacité de nuisance.

    La Tronche en biais. Vled Tapas et Acermandax coopèrent pour déconstruire les propos pseudo-scientifiques qui polluent la toile. Leurs émissions sont parfois très longues, densité et sérieux du travail obligent. On peut prolonger le plaisir de se sentir moins bêtes en lisant leurs ouvrages, nombreux.

    Il y a pas mal de Belges intéressants, sur Youtube comme ailleurs. A l'écouter, Mr Sam. est l'un d'eux. Ses "Points d'interrogation" sont toujours bien écrits, rigoureux, comme tous ceux que j'évoque ici.

    Max est là aborde des rivages de Youtube qui, sans lui, me seraient restés inconnus : des enfants jetés en pâture par leurs parents, des crétins incultes qui donnent des leçons de magouille, des arnaqueurs, des influenceurs inconséquents, vantant les vertus de contrefaçons, etc. Le travail de ce type-là devrait être suivi par les pouvoirs publics, je vous le dis.

    Toute cette communauté qui a pour but de ne pas s'en laisser compter et de décortiquer les méthodes des charlatans et profiteurs de la crédulité des autres, viennent parfois au secours d'un de ces vaillants combattants de la bêtise. En l'occurrence, récemment, Clément Freze, mentaliste de métier, avait piégé un médium célèbre : Bruno (qu'il ne se permet jamais de traiter de tricheur, mais la démonstration est éclatante). Le médium a fait "striker" sa vidéo, aussitôt reprise et relayée par les zététiciens du web, dans une magnifique illustration de l'effet Streisand.

    Les émissions scientifiques de qualité se font rare sur les chaînes de la TNT (il y en a encore, mais on peut s'estimer trop peu nourri). Je vous livre ici quelques unes de mes adresses favorites. Vous pouvez y aller, c'est vraiment du tout bon.

    Dirty Biology qui vous amène parfois à nous interroger sur les limites de notre identité (jusqu'à quel point, biologiquement, sommes-nous nous-mêmes ?), Le Vortex (plusieurs Youtubeurs, dont certains cités plus haut, cohabitent et combinent leur savoir pour compléter, enrichir, argumenter, préciser un sujet. C'est drôle, c'est vif, c'est passionnant), Micmaths (de Mickaël Launay, c'est assez pointu, pour de la vulgarsiation, mais ça reste accessible, même pour un incapable comme moi), e-penser, Science étonnante (bon, je ne suis pas souvent au niveau, mais pendant quelques minutes, j'ai l'impression de comprendre et je me dis qu'il en reste toujours quelque chose...) Nota Bene (célèbre chaîne d'histoire aujourd'hui, mais que je suis depuis ses débuts). Axolot explore l'étrange mais refuse le sensationnalisme, il voyage parfois et ses "escales" sont de véritables guides des chemins de traverse. Astronogeek est un dur à cuire et un fort en gueule, il peut facilement s'énerver contre les journalistes approximatifs aux articles putassiers, et il choisit souvent les titres de ses vidéos pour piéger les complotistes (la terre est plate, on n'est jamais allé sur la lune, etc.), pour démontrer exactement l'inverse de ce que les visiteurs ont cru trouver chez lui. Mais démonstrations rigoureuses, sourcées, réalisation sans effets. Comme tous les zététiciens évoqués ici : du beau travail.

    Il y en a beaucoup d'autres, tout aussi riches et passionnants, mais ils sont en général en lien avec ceux qui précèdent. Une véritable communauté de la pensée critique, vitale en ce moment.

    Je finis avec deux chaînes littéraires des plus pertinentes, l'une est orientée vers le public enseignant et les élèves : Mediaclasse. Les livres des différents programmes, leur résumé, des méthodes pour les analyser, même la voix de l'auteur et l'iconographie pour accompagner le propos...  la perfection est de ce monde. On pourra aussi se régaler avec L'alchimie d'un roman, chaîne d'un certain JP Depotte, qui décortique les œuvres, classiques surtout mais pas que, en s'appuyant sur une théorie des quatre éléments. Ça fonctionne, c'est vivant, pertinent, intelligent, une excellente initiation à l'analyse littéraire.

    Voilà, c'était un post un peu particulier aujourd'hui. Depuis le temps que je suis ces auteurs, je trouvais dommage de ne pas faire partager mon plaisir. Partout, décidément, il y a des gens qui œuvrent pour le bien commun.

  • 3736

    Préférer croire en un dieu improbable plutôt qu'en un changement climatique prouvé. J'en connais !

  • 3734

    « J'ai fait venir une clim' pour mon bureau, dit-elle en se forçant à rire. Sauf que j'ai passé toute ma journée en rendez-vous extérieurs et je me sens crade. Gluante. En plus, ça encombre. Maintenant, si je mets l'appareil en route, je vais prendre froid. — C'est absurde, dit Nicolas après un temps. Tout ce qu'on fait est absurde. — Je ne crois pas. — Non, bien sûr, parce que tu fais des choses importantes. » Elle émit un gloussement. « Ça va, me cherche pas. Fait trop chaud. — Un boulot qui mérite qu'on travaille au frais. — Si tu veux. — On a vraiment eu peur pour Pierre. Maman était... — Tu as assuré. Merci. » Elle avait perçu le reproche sous la phrase, il le savait. Il lui était reconnaissant de ne pas s'être offusquée, de ne pas avoir bondi sur cette pique. Il avait été injuste. « Une épreuve, souffla Nicolas. J'ai trouvé ce que c’est, cette canicule. Une ordalie. — Une ordalie ? — Une brûlure qu'on s'infligeait pour prouver sa bonne foi. Si la brûlure guérissait dans un court délai, c'est que Dieu attestait de ton innocence. — C'est débile. — C'était la vérité d'une époque. Elle était indiscutable. Nos morts sont indiscutables. La canicule est indiscutable. Le fait que nous y soyons tous pour quelque chose est indiscutable. — Tu plaisantes ? C'est discutable. Tu vas pas me ressortir tes histoires de réchauffement climatique ? — Non, rassure-toi. C'est ma vérité, ce n'est que ma vérité indiscutable. — Indiscutable. — Comme les appareils qui rafraîchissent et contribuent au réchauffement, comme tous ces objets… » Il se tut. Livia marmonnait un air à la mode. Elle lui laissait la parole ; cela lui arrivait parfois. Elle avait envie de quelqu'un en veine de bavardage, ce soir. Nicolas tombait pile. « Tu te rends compte qu'ils ont tous un nom ?, reprit-il vivement, comme inspiré. Tout porte un nom, c'est effrayant. Les objets que l'on nomme. Cette manie de définir la moindre chose. » La frappe sur le clavier avait repris, elle n'était déjà plus là. « Rien n'échappe à notre frénésie de taxonomie. On définit tout, jusqu'au cloaque du moindre insecte, la substance du moindre microbe, jusqu'au fragment le plus infime du temps. C'est une façon d'assécher le monde. Et on n'a qu'un nom pour la canicule. Alors que ceux qui ont succombé à l'ordalie... — Dis-donc, ça cognait à Roanne... — La confusion de cadavres comme disait Flaubert, tous ces anonymes. Et tous ceux des siècles à venir. La foule est innommable. — Dieu est innommable. » Il grogna. Elle aurait toujours le dernier mot.

     

    Noir canicule. Extrait. Sortie en mars, chez Phébus.

  • 3719

    Il y a comme ça, une dizaine de personnes qui s'escriment depuis plus d'un an sur un de mes textes. Un inédit, inspiré d'un crime sordide du XIXe, en Sologne. Le metteur en scène, François Frapier, me tient régulièrement au courant de l'avancée du travail, des lectures, reprises et choix. On s'achemine vers une création théâtrale complète, l'an prochain. Pour l'instant, je ne sais de l'interprétation de mon texte, que ce que François a bien voulu m'en dévoiler. L'autre soir, au téléphone, tandis qu'il préparait sa troupe à prononcer haut et fort la pièce sous la forme d'une lecture, j'ai entendu des voix d'hommes et de femmes, s'exclamer dans la bonne humeur, pour que j'écoute, au-delà de mon interlocuteur privilégié, leur appétit, leur énergie, leur entrain à s'approprier les mots que je leur ai confiés (leur reconnaissance ?). J'apprends maintenant que la première lecture s'est très bien passé. Ma reconnaissance éternelle aux amateurs qui veulent bien plonger sur une si longue période au cœur d'une seule œuvre ; ma reconnaissance aux professionnels qui endossent un tel chantier… Je pense ici aux metteurs en scène et, simultanément, aux éditeurs. Mon éditeur qui me dit, quand je le remercie, pour atténuer son mérite : « Tu sais, Christian, je suis grassement payé pour ça. » Je suis éperdu d'amitié pour les engagements des uns et des autres.

  • 3716

    Il est très rare (circonstances plutôt qu'indifférence) que j'anime un rencontre autour d'un livre. Celui-ci est très particulier. Il s'agit d'une anthologie. Une savoureuse et riche recension des écrivains (morts ou vivants), qui ont écrit sur ma bonne ville, Roanne. Des surprises : Laurence Sterne, David Ponsonby (compositeur élève de Nadia Boulanger), de grands noms (Tournier, Sabatier, Saint-Exupéry, Barbara, Arsand, Ponge...), des oubliés (Montforez, Mercier...) et d'actuels, dont l'excellent Christian Degoutte que j'ai évoqué sur ce blog nombre de fois.

    Pierre-Julien Brunet a accompli un travail assez incroyable. Je lui ferai dire l'origine, les recherches, la réalisation, la récompense enfin, la publication de "Regards d'écrivains". Son complice Dom Thoral, sera là pour parler de son regard de photographe sur la ville. On va se régaler, je vous le dis. C'est ce soir, à 18 heures, au Jardin de Papier, rue Maréchal Foch, à Roanne, justement.

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