Mon petit Rachid, je ne sais pas si tu t'appelles Rachid et tu ne liras sans doute jamais ce billet, mais c’est plus facile quand on s'adresse à quelqu'un de lui donner un nom, et puis tout de même, je voudrais t'expliquer. Tu viens de m'appeler au nom de la société « Ouverture 3D » ou un nom original de ce genre, pour me conseiller (je suppose) de faire changer les fenêtres de la maison. Très bien. Quand tu t'es présenté comme « Monsieur Lefaure » avec un accent à couper au couteau, j'admets que j'ai pouffé. Je ne voulais pas te vexer. Je suis désolé. Je ne sais pas comment convaincre tes patrons de ne pas tenter de cacher ton identité, sous prétexte que le Français moyen ne s'intéressera pas à des fenêtres vendues par un nord-africain, mais bon. J'ai pouffé, donc, mais pas contre toi : j'ai pouffé de la bête grossièreté du procédé, et tu t'es vexé, tu m'as dit : « Pourquoi vous rigolez, monsieur, vous vous foutez de ma gueule ? » avec le timbre excédé de qui s'est fait remballer systématiquement pendant les quatre heures de son boulot de merde. Dans ta colère, tu as raccroché sans que je puisse m'excuser. Je suis désolé. D'autant plus que, les appels étant enregistrés, tu vas sûrement avoir droit à une remontée de bretelles (non, ça doit s'appeler un debriefing) et que ta colère envers moi va alors enfler jusqu'à la haine. Je t'en prie, mon petit Rachid, c'est pas moi qu'il faut haïr. C'est pas moi le salaud dans l'histoire. Moi, j'étais un gros père fatigué de sa journée qui a ricané devant une démonstration supplémentaire de l'absurdité de ce monde. Un monde où on dit à un type, pour vendre une fenêtre : « Rachid, tu t'appelleras monsieur Lefaure. » Ça, ça devrait vraiment te mettre en colère.
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Monsieur Lefaure
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Total Western
L'indien et le cow boy s'affrontèrent. Pendant ce temps, leurs chevaux se regardaient, ennuyés de participer à ces jeux puérils. En tout cas, dans ce vacarme, impossible d'échanger un avis sur la fraîcheur de l'herbe ou le charme du vent sur la prairie. Ces choses essentielles.
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Patience
Tellement attentiste que ses opinions prenaient de la mousse, côté nord.
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La suite dans les idées
La première idée née du premier cerveau artificiel fut, comme on pouvait le prévoir, tout à fait conforme aux idées du cerveau qui l'avait conçu.
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L'apparition
Et puis, se voyant ridicules avec leurs crevettes autour du cou, ils décidèrent d'inventer la lettre a.
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Les dits du Labo
Cadeau : le texte déclamé en pédalant, vendredi soir, au Labo de la Livatte. Texte inspiré par les photos de marc Bonnetin, visages et dos, nuques et faces. Tout cela mis en son et en musique par Jérôme Bodon-Clair.
Pile ; Assez d'énergie pour tenir la Face en miroir.
Reste dans l'ombre, expose son revers au soleil
Face ; Assez de clarté pour en donner à Pile
Pile ; Tout le corps est Pile, tout supporte Face, tout est déterminé par Face
Face ; Reçoit le monde, conduit le jour jusqu'aux plantes des pieds
Pile ; Qui est discret, par force
Face ; Qui s'exhibe, par nature
Pile ; Le Soi qui se dérobe
Face ; Que l'on veut enrober,
Face ; Que tant de tranchants veulent faire rejoindre Pile.
Pile. Face.
Pile. Ce qui s'appelle Pile. L'un des pôles de la personne. Pile au nord, Pile des perdants qui plient sous l'épée. Dos pâle, col sans hâle. Sur le revers, pile-poil épilées, ancre d'échine des vertèbres empilées de la tête aux épaules qu'on hausse. Toute la nuque est énucléée, rasée, hérissée, dressée, stressée, méprisée, la risée du matin, fait la gueule dès qu'on l'engueule, tournée, boude, courbe, dégage, de dos, fin du dos, sommet du dos mais sans ailes hélas, se faufile et file.
Laissons là Pile d'ascètes. Mettons un terme à Pile et passons en Face.
Car en face, de l'autre côté, sur l'autre rive, passé le seuil des oreilles et des tifs, sur l'avers à voir, à boire, la face, à poil et pelure, à découvert, moitié velue et moitié nue, moitié voulue et moitié niée, la face sans peur s'épanche et rit, sape les sagesses trop sûres et se régale de sa farce, peaufine ses phrases féroces, fait de franches fatrasies, fait face fière, s'affirme, affiche sa frimousse féline, fait la fête, farandole, festoie, se fiche de soi et se fend la fiole, fait des figures affriolantes de faunes frémissants, fait volte-face et finalement fascine. C'est fou mais ça, ça fout les foies à des fêlés de la foi. Forcément, car c'est trop de face, trop de femme, trop de chair femelle et d'humaine fêlure, trop de présence, trop de vie, face obscène, face offerte que des fondus foudroient et fouettent, que ces frères fervents se figurent convoitée par d'autres, convoitée comme un con ouaté, comme une fesse, une foufoune, alors sous de telles foudres les forces défaillent, la face affolée effarée s'efface et se voile et se cache se scelle et s'éclipse, se fait face de lune. Ou bien, c'est aussi effrayant : soumise à la fièvre des fenestrons et des foules, à la folie des fascismes fashion, la face enfin se farde et se floute, s'effeuille en photos sulfureuses, se vautre dans les frasques que financent des trafiquants, s'enfonce sous le factice des faux-cils et les fastes foutrement falsifiés.
Il faut sauver la face ! Il faut sauver la Face !
Sauvons la face fauve des sagesses éphémères. Songeons pour ce faire aux faces défaites des défunts, aux reliefs flasques des aïeux, affligés d'infortune, tous gisant sous le fardeau froid des cénotaphes, sans fanfreluches, sans frayeurs, sans fantaisies, inflexibles et blafards. Faisons aux fades et aux peaux hâves des fêtes de fadas, foutons le feu aux fatwas des faussaires. Il faut faire flancher la fébrile farce des fidèles forcenés autant que la frénésie des people frivoles et des riches tête d'affiche. Vlan, dans leur face à tous, gifle les furieux et claque les futiles ! Fonce fissa et fends les faux-semblants des salafistes ; fous les fards félons au fond funèbre des flacons, défends les fondations des formes sans fantasmes, fais saillir les faces enfin sans effets, fais front. Exhibe ton faciès et luis des feux des astres. Resplendis ! Splendides visions de visages, de vies vraies, de rire de fous-rires et de sourires. Dévoilés, les lèvres veloutées, la ride véloce à venir ou venue et le vague des veines qu'on voit sous le vernis du derme. Et puis merde, et qui daigne damner l'épiderme, donne des mots aux émois maniaques de Mars, les machos soumettent les masques et les muqueuses aux sangles et aux cilices, sinon les vouent au sang et au supplice, les moustaches font des taches aux frimousses, font souche aux Femen, font touche-touche aux hymens, attachent les charmes, s'alarment des désirs des dames, déclenchent les larmes des drames, s'agacent, crament carrément la grâce des gazelles, clament à leur guise les gammes des crimes que les calames déguisent, aiguisent leur glaive à la gorge glabre de prétendues aguicheuses.
Mais les regards toujours vers eux tournés triomphent, les images de faces surgies de sous le tissu ou lavées de leur grimage, faces insurgées éplorées ou sèches levées devant les sabres, les visages clairs débarrassés de maquillage, les yeux ouverts, les têtes dénudées, les joues sans fard, les cils sans khôl, les fossettes, les pommettes, les mentons, les fronts, les nez et les creux, les tempes venues au jour, les temps venus, les dents montrées, les faces dévoilées et crues, sans apprêt sans artifices, à peine nées vous disent : foutez-nous la paix.Lien permanent Catégories : actu, Art, Ecrire, Musique, rencontres avec des gens biens, Théâtre-spectacles 0 commentaire -
Notre labo
Ce soir, à partir de 18h30, à Roanne, 17 rue Camille benoît, au deuxième étage de l'ancienne école primaire de la Livatte, les compagnies Dynamo, Micro et Nu inaugurent ensemble un lieu de création, ouvert par la mairie, et qu'elles partagent. Appelons-le Le Labo de la Livatte. On lui trouvera un nom plus tard, mais enfin, Labo, ça définit bien ce que l'on a envie d'y faire. Tenter, chercher, croiser, mélanger, touiller, détonner. A cette occasion, sur une musique de Jérôme Bodon-Clair, devant un montage photographique de Marc Bonnetin, j'aurais l'angoisse de débiter en pédalant et en public, un texte écrit pour l'occasion : « Pile/Face ». Aussi, Dynamo et Micro, nos partenaires et amis, s'adonneront à de courtes prestations. Il s'agit de permettre de faire entrevoir quel type de travail nous faisons et les pistes que nous explorons.
On espère vous voir nombreux.(le visuel est signé Marc Bonnetin.)
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Et sinon, ça va ?
Quand je conclus une lettre ou un courriel par « porte-toi bien » ou « prends soin de toi », ce n'est pas une formule, je le pense vraiment, je VEUX que vous preniez soin de vous. Par pitié, faites attention à vous, les amis, par pitié, prenez soin de vous. Marre des deuils. Marre !
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La chanson du chauffeur de car
Je suis le chauffeur de car
Je conduis les gens endormis
Je suis le chauffeur de car
Je les ai à ma merci
Il y a les gamins qui vont à l'école
Il y a des mamies
Il y a les gamins qui rigolent
Et un type qui lit
Celui-là, je l'aime pas bien
Alors pour l'emmerder
Je mets RTL et Europe 1
Zemmour et Ruquier
Radio Scoop, NRJ,
les grosses têtes et les grandes gueules
Tout ce qui contre le livre agit
Je lui mets à fond dans la gueule
Je suis le chauffeur de car
Je n'aime pas le type qui lit
Je suis le chauffeur de car
Je lui pourris la vie -
Coup dur
Je ne sais pas, je ne sais plus, il n'y a plus d'espoir. Le monde est au bord du gouffre, plus rien ne sert à rien, tout fout le camp, c'est la fin.
On m'a offert « Féfé de Broadway » avec Jacqueline Maillan.
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Anapurna
Énorme chantier de réécriture en ce moment (en fait, depuis deux semaines). Après une entrevue avec mon nouvel éditeur, Frédéric Weil, de Mnémos, je me coltine une nouvelle ascension avec ce monstre de 600 pages (format édition) sur les épaules. Coupé, recomposé, retouché, repensé, refondu par endroits, re re re... J'espère enfin mettre un point final à ce manuscrit qui a attendu quinze ans pour trouver preneur. Un texte qui vient d'un temps où le monde du livre me semblait aussi accessible qu'une retraite à 50 ans. Un nouvel éditeur, oui, éditeur enthousiaste à qui je dois bien ce travail en profondeur de tout ce qui constitue le récit, forme et fond. A la droite du Diable sortira en septembre 2013. Il ne plaira sûrement qu'aux lecteurs d'une SF exigeante et hors norme (il y en a, je fus l'un d'eux, à l'époque), mais je suis tellement heureux que ce roman « inclassable » (dixit Frédéric Weil) parvienne enfin au jour, que je veux bien prendre le risque de déplaire ou de surprendre mes lecteurs fidèles. Aucun d'entre vous, qui m'avez lu jusque là, ne me reconnaîtra dans ce bouquin, je vous préviens, mais je sais qu'un certain public le recevra dans la jubilation. En 2014, retour aux récits « sérieux » si j'ose dire, et à l'écriture que vous savez. On peut bien s'octroyer quelque récréation, hein ?
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Le Radical Hennelier reprend
Oh pis non.
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Sam
Quand les frères siamois rentrent tard, l'un des deux dit : « C'est à c't'heure ci qu'tu rentres ? » et l'autre éclate de rire. C'est rituel, ça ne mange pas pain. Vous pouvez pas comprendre.
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Evacuer le problème
Les frères siamois ont ce genre de problème. Les urinoirs sont un peu trop distants les uns des autres. Quand quelqu'un entre dans les toilettes, il voit un type en train de pisser et un autre qui se tient tout contre lui. Pour ne plus être embêtés, les frères siamois ne fréquentent que les bars homos, et encore, ceux qui sont assez libéraux.
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Des secrets en commun
Sur son lit de mort, Chang avoua à son frère siamois qu'il était un agent du KGB. Son frère admit en retour qu'il travaillait pour la CIA. Mais comme ils étaient en réalité agents doubles, cela les réconcilia.
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ALIROULU 2
Notre dernier pilote pour l'émission Aliroulu (cliquer sur le texte en gras précédent. Je le dis, parce que certains ne savent pas. Et oui. Sur la page qui s'ouvre alors, descendre un peu : la vidéo est sous la bannière. Je le dis parce que certains ne descendent pas. Si, si.) Toujours les judicieux conseils du carnet à Spirales, à Charlieu, le conseil d'une lectrice (l'excellent Peste & Choléra de Patrick Deville), et l'interview de Dominique Iacovella des éditions La Rumeur Libre.
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Chang et Eng au cinéma
Les frères siamois, pour regarder un film en 3D, ils ferment chacun un œil.
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Ménage à trois
Vous aurez mal compris, madame, s'excusèrent les frères qu'elle avait fait mettre nus : on ne nettoie pas les vitres avec une peau de siamois.
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Proverbial
Deux frères siamois avertis ne sont guère avancés.
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Permanente
Les frères siamois ne vont plus chez ce coiffeur. Marre de l'entendre répéter la même plaisanterie : « Alors, ces messieurs ? La raie au milieu ? »