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  • L'infatigable maillet contre l'infatigable burin

    D'autres religions ont abattu les idoles des précédentes. Que reste-t-il des dieux gaulois, des sites aztèques, des statues de Médine ? Les générations d'iconoclastes sont spontanées et sans cesse renouvelées. Ne change que l'ampleur de leur tâche, car leurs efforts font face à une spiritualité infatigable, créative, prolifique, accumulée par les siècles et pareillement régénérée que leur haine. 

    Mais enfin, il serait prudent d'enterrer Lascaux.

  • Plairil l'iconoclaste

    Le vent qui naguère berçait ses rêves ambitieux, l'entourait à présent d'une moqueuse sarabande. Plairil se plaignait d'avoir tout perdu et le vent vint ricaner à son oreille Perdu ? Perdu quoi ? Qu'as-tu fait ? Qu'as-tu construit que tu aurais perdu ? Il proférait, indigné, des réponses plus hésitantes à chaque souffle : « Un monde, j'avais construit un monde », mais le vent poursuivait ses moqueries, Où est ton monde ? Nous ne l'avons pas vu. Et pourtant, pourtant... il arrachait ses vêtements : « Aveugles ! Voilà pourquoi ! Il était entre mes mains. Je le tenais. À quel tribunal me plaindre de l'injustice qui m'est faite ? » mais des rafales emportaient ses lamentations, il s'exaltait, vociférait pour traverser le chahut hostile de l'air : « Tout s'était plié sous la puissance de ma réflexion, ma voix avait remplacé la voix des autres, leurs bouches délivraient mes paroles, leurs gestes étaient ceux que j'avais enseignés, leurs pensées étaient celles que je leur dictais. Comment peut-on dire que ce monde n'a pas existé, que je n'ai rien créé, et qu'il ne m'a rien été enlevé ? » Où est-il, ce monde ? Répétait cruellement le vent. Et Plairil en réponse était incapable de le montrer, de prouver qu'il eût jamais été. Ses paupières clignaient, sa bouche béait, ses yeux écarquillés tentaient de retrouver au milieu du chaos, les bribes de ce qu'il avait construit. S'il ne reste rien, c'est qu'il n'y avait rien, se gaussaient les tourbillons autour de lui. « Là ! » Il désigna les trous où avaient été plantées autrefois les dents d'Odalim qui ornaient l'esplanade. « Je les ai fait supprimer ! » Et bien, dit le vent, c'est cela, ta preuve ? Plairil considéra les trous. « Ce manque... » les mots affaiblis lui furent arrachés des lèvres par une bourrasque et jetés, inertes, loin dans la tempête qui se levait.

     

    "Les Nefs de Pangée" Extrait. A paraître en septembre chez Mnémos.

  • Sur la scène de la vie

    L'étau se resserre. Chez le boulanger, au supermarché, à la mutuelle, et même chez le docteur à présent. Les mêmes propos, unanimes : salauds de pauvres. Pas dits de cette manière, mais enfin, chacun, du haut de ses compétences économiques pointe le vrai problème qui plombe notre bonne société : le coût des pauvres et des étrangers. Parallèlement, notre dégoût s'épaissit, la sensation de notre impuissance, d'être cernés par une bêtise galopante. Comment ça se termine, déjà, « Rhinocéros » de Ionesco ?

  • Ouverte ou fermée

    Dans un premier temps, on peut croire en la supériorité du panneau coulissant sur les portes qui encombrent, lourds panneaux qui pivotent, opaques, grinçants. Mais combien de Vaudeville avortés sans cette trappe qui claque ?

  • Relire

    Ce qui est agréable, dans la préparation d'une rencontre, c'est de relire le travail de l'auteur qu'on va interviewer. Surtout quand son œuvre est de ce niveau. En l'occurrence, celle de Laurent Cachard, en prévision de sa venue du 14 mars à la bibliothèque de Fleury-la-Montagne. Je réalise qu'au bout du compte, c'est un cadeau que je me fais à moi-même.

  • L'autre rentrée

    Et donc, la sortie des Nefs de Pangée, initialement prévue en décembre, est avancée pour septembre, me dit mon éditrice. Ce qui signifie que les semaines qui viennent vont être chargées. Mais au bout, paraît-il, un bel objet cartonné, une sortie plus fracassante que de coutume. Pour moi, surtout, la bonne nouvelle est de boucler une publication plus tôt que prévu. De pouvoir songer au chantier suivant dès le mois d'avril.

  • Entre soi et soi

    Aujourd'hui, on tente de nous convaincre que chacun a tout intérêt à devenir lui-même. Être soi, la belle affaire ! N'est-il pas plus difficile et souhaitable de devenir celui que nous projetons d'être ? Soi, mais en mieux ? S'évertuer. Je passe ma vie à ça. Je ne veux surtout pas être le pitoyable petit moi-même, tellement contraint par ses faiblesses et ses retards, ses lacunes et ses peurs.

  • Pas forcément l'orage, mais une élégante condensation

    Tiens, en bonus aujourd'hui, si vous alliez faire un tour chez Marlène Tissot ?

  • Nous n'irons pas tous au Paradis

    Je comprends pourquoi certains croient encore en l'enfer. Ou, en tout cas, jouissent d'y croire, ne serait-ce qu'un moment. Il ne s'agirait pas d'un lieu où l'on serait damné pour les fautes vénielles que nous avons commises, mais d'un endroit où ceux qui nous empoisonnent la vie souffriraient pour l'éternité. Ô les assistantes sociales implacables, Ô les médecins méprisants, Ô les comptables véreux, Ô les mandataires avides, Ô les élus crapuleux, Ô les cul-bénis hypocrites, Ô les bourgeois cauteleux, Ô les fonctionnaires sans cœur... Hurlez dans les marmites, embrasés jusqu'à la gueule ! Sentez le fer des fourches médiévales s'enfoncer dans vos chairs écorchées, humez le parfum de vos langues qui brûlent, la consommation de vos souillures, le délitement renouvelé de vos nerfs !
    (respiration, atténuation du vertige, retour à la terre)
    L'enfer n'existe pas, c'est bien. Mais se projeter le film des malédictions jetées à nos tortionnaires, parfois, aide à la sauvegarde de notre santé mentale. Exercice bien inoffensif. Ne surtout pas se l'interdire.

  • En deux temps

    affiche rencontre 14 mars .jpgCe sera donc le samedi 14 mars 2015. La bibliothèque de Fleury-la-Montagne est ravie d'accueillir Laurent Cachard. J'ai le redoutable honneur d'animer le premier temps. En deuxième partie, le récital Littérature et musiques, mis au point par Laurent et ses complices, parfaitement rôdé. Un moment que je vous conseille de partager, parce que c'est une forme subtile, élégante, riche, originale et peut-être, de l'aveu de l'auteur, une des dernières occasions d'y assister. Alors, vraiment, ça vaut le déplacement.

  • La bonne adresse

    Dans La Vache, la deuxième sourate du Coran, il est clairement expliqué que les mécréants le sont par la volonté expresse de Dieu (« Quant aux incrédules (...) Dieu a mis un sceau sur leurs cœurs et sur leurs oreilles ; un voile est sur leurs yeux »). Si on se demande bien dans quel but, on peut en tout cas se réjouir que l'athée ne soit en rien responsable de sa philosophie et puisse même exiger du croyant le respect le plus haut, ayant bénéficié, contrairement à lui, de l'attention particulière de son créateur.

  • Ecouter Voir

    Depuis quelques jours, Jérôme Bodon-Clair est entré dans une seconde phase pour notre beau projet "Voir Grandir". Il a dores et déjà créé toutes les musiques, soit une quinzaine de morceaux. Album, concerts, mise en scène, il commence maintenant à explorer des pistes de promotion de ce travail. La compagnie Nu sera sans doute partie prenante, mais aussi les musiciens et plasticiens de Sonar. Vous pourrez suivre les progrès de cette incroyable aventure sur cette page, d'abord, appelée à s'enrichir au cours du temps. Les morceaux présentés sont des maquettes (déjà superbes, selon moi) mais des maquettes. J'espère qu'il en mettra d'autres en lignes, mais il ne veut peut-être pas tout dévoiler tout de suite. En tout cas, de chaque chanson, je suis fier, et ému.

     

    NB : le vidéo-clip "Nos Futurs" présent sur le site était un des deux morceaux "pré-historiques" à Voir Grandir, venus de cette expérience qui nous a, non seulement inspiré, mais imposé une suite.

  • Minotaure. C'est parti !

    Je suis de ce monde. Je suis de là. Je suis là. Je suis entré là. Entré un jour dont je n'ai pas mémoire. Un jour. Entré un jour. Entré, je ne sais pas si c'est le mot. Entré. Un jour. Je ne sais pas si c'est le mot.
    Je suis entré un jour dont je n'ai pas mémoire. Je suis là. Depuis que j'ai ouvert les yeux je cours sous le couvercle d'un grand feu sec ou sous la paume d'un vide noir piqué de petits feux.
    Je cours sous l'un ou l'autre. Sous le grand feu ou sous la paume noire. Je ne sais pas si ce sont les mots, le feu, la paume.
    Mon monde est un chemin que je connais mais qui parfois m'échappe, un sentier, une piste coupée d'angles. Avec des pièges qui font mal.
    Des fois, je jette mes cornes aux parois, elles font des traces brunes et sanglantes que je retrouve sur mon chemin, après, longtemps après, des feux et des paumes passés.

     

    Extrait. Minotaure. Ecriture en cours.

  • Homme, humus et On

    L’homme s’est longtemps considéré -étant seul juge- comme l’aboutissement de la création, et les mots témoignent de cette ambition. Revenons dans le passé lointain pour dépoussiérer la racine indo-européenne Ghiom, la terre. Les Grecs y puisent le mot khtôn de même sens, qu’on retrouvera dans chtonien et autochtone. Les latins fabriquent un « homo », littéralement « né de la terre » (idem pour l’Adam hébreu, issu également du sol), dont on retrouve la facture terrienne dans l’humus et aussi, souvenons-nous en, dans l’humilité. Le genre humain, lui, est entièrement représenté, le savez-vous, quand vous dites ou écrivez « on ». Car dans « on » il y a l’ « homme ».
    Grecs et latins ont puisé dans le Ghiom indo-européen (terre), leur khtôn et homo (voir plus haut). La logique inverse est possible : le Wiro indo-européen qui désigne l’homme en tant que principe masculin, a abouti au world anglais et au welt allemand : le monde. Il reste encore un peu de l’humain wiro dans le werewolf (le loup-garou anglais), dans la virilité, la virago et même la vertu (du latin virtus, courage, force). Enfin, une autre racine : Ner, le guerrier, a donné les préfixes andro et anthro, et les prénoms André (viril) et Alexandre (qui protège les hommes).

     

    Et c'est la 2400ème note, les amis.

  • Aujourd'hui

    Il y avait la guerre. Elle allait durer des années. Ils espéraient qu'elle cesse un jour, ils étaient persuadés qu'elle cesserait un jour. Et nous voici, vivant cela. Nous adaptant au quotidien de cette guerre-là comme nos aïeux s'adaptèrent au quotidien de la leur. Sans grand espoir qu'elle finisse. Notre temps, désormais, est un temps de guerre. Et nous allons nous y habituer.

  • Demain

    Voyons, anticipons. Une coalition d'extrême-droite sera installée à l'exécutif. Les citoyens, libertaires, défenseurs des droits de l'Homme, etc. attachés aux libertés, devront affronter les effets de lois sur tous les fronts, on ne saura plus où donner de la tête. Assez vite, les premiers blocages apparaîtront, les premières manifestations, réprimées dans le sang. En moins d'un an, des camps pour opposants et d'autres, spécifiques, pour les musulmans, auront été construits un peu partout en France. Et là, nous saurons, nous verrons qui sont les justes d'aujourd'hui.

  • On ne prête qu'aux riches

    Disons-le encore une fois, pour que la vérité s'impose : l'invention de l'eau chaude est bien antérieure à Léonard de Vinci (qui n'a pas inventé l'eau tiède non plus).

  • Utopique

    Dans Voir Grandir, une des chansons donne à entendre la voix d'un homme qui raconte à son bébé toutes les merveilles que le monde va lui offrir. « Je ne t'en dis pas plus, tu ne me croirais pas », dit le père, qui énumère les beautés de ce monde. La couleur de l'album est majoritairement optimiste, enfin j'ai essayé, en violant ma nature. Mais pour cette chanson, la première version a semblé un peu courte, et il m'a fallu ajouter des éblouissements à la liste de merveilles évoquées. Le mal que j'ai eu ! A chaque image survenue, je me disais : « Mais non, c'est pas vrai, ou ça ne le sera plus d'ici que tu grandisses, mon petit. » Si j'écrivais : « La barrière de corail » aussitôt, je me disais : en train de crever ; si j'écrivais « Les lucioles dans les arbres », je me mordais les lèvres : en train de disparaître. Etc. etc.
    Il s'est apparemment passé la même chose pour les auteurs de SF, sollicités il y a deux ans par une célèbre maison d'édition des littératures de l'imaginaire, quand celle-ci a proposé à des auteurs d'écrire des nouvelles sur l'Utopie. Avec l'idée que, pour une fois, il s'agirait d'une utopie « qui marche ». Résultat : Deux auteurs seulement ont réussi à se plier à l'exercice. Dont moi. Et quel mal j'ai eu, là aussi, pour imaginer des lendemains qui chantent ! Dans un premier temps, ce retour décevant a fait capoter le projet. Cette nouvelle devrait être publiée finalement (date non précisée), et vous verrez que, même en jouant le jeu de l'utopie qui fonctionne, elle n'est pas forcément optimiste. Le temps n’est plus aux utopies, le temps est au désespoir, au constat de la destruction dégueulasse de tout. Et, comme disait l'humoriste-écolo Marc Jolivet l'autre jour à la radio : « Je soutiens Nicolas Hulot parce qu'il fait le maximum, mais franchement, je n'y crois plus. C’est foutu. » Va énoncer des merveilles à tes gamins, maintenant, sans avoir l'affreux sentiment de leur raconter des conneries...

  • Questions qui tuent

    Au cours de la dernière rencontre à laquelle j'étais invité, il y eut deux « questions qui tuent » : qu'aimeriez-vous qu'on sache de vous ? Et Que voudriez-vous demander à vos lecteurs ? J'ai été embarrassé et surpris dans les deux cas. Je ne sais plus ce que j'ai répondu à la première mais je sais ce que j'aurais dû répondre à la seconde. « Lecteurs, lectrices, soyez exigeants avec nous. Demandez-nous le meilleur. Mais n'oubliez pas qu'en retour, nous serons exigeants avec vous. » Voilà ce que j'aurais dû dire. AU lieu de ça, j'ai parlé de confiance. C’est mou du genou, la confiance, c’est trop peu. On parle littérature, là, zut !

  • Mutatis mutandis

    On oublie parfois que la taupe n'est que la forme larvaire d'un autre organisme. En fouissant, tout au long de sa vie, elle grandit, s'allonge, se métamorphose et progresse simultanément vers la mer où, enfin, elle débouche après sa longue migration, sa mutation achevée. Et voilà l'otarie qui rejoint les flots. On n'a toujours pas compris par contre, comment l'otarie parvenait à s'introduire dans nos jardins pour enfouir les nymphes dans nos pelouses.