Le chat observe l'oiseau dans la cage. Il rêve. C'est inatteignable, c'est une utopie. Mais il patiente, s'enferre dans sa patience, et la patience devient l'objet de son attente, lui donne sons sens. Il me semble en le regardant, après avoir dit au chat, encore une fois : « C'est pas la peine de t'exciter, tu l'auras jamais », que l'obstination du chat à croire que la cage pourrait s'ouvrir un jour, dit quelque chose de notre condition.
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L'affût
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Au bout de la route
Jacques Josse est allé chiner dans les archives de la Camarde, a sorti le dossier "au bout de la route" et concocte en s'appuyant sur ce panorama ricanant de fins grotesques, stupides, terribles, une tragédie enlevée et sobre (je crois qu'on a notre lot d'adjectifs, là). C'est vif, superbe, ça laisse un goût de désolation. La mort, comme l'inspiration, comme le Roi dirait Michon, vient quand elle veut.
Ce dernier opus des nouvelles publiées par la Galerie Le Réalgar, est superbement illustré par des gravures de Scanreigh (qui ne doit plus se souvenir qu'il fut mon prof aux Beaux-Arts il y a très très longtemps).
"Au bout de la Route" Jacques Josse, 40 pages, 8 EUROS.
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Académie
Le maître de Lascaux regardait la paroi. « Tiens, je peindrais bien un taureau, ici. » Ses assistants soupirèrent. Le Vieux était incapable de peindre sans modèle. Il allait falloir capturer et convaincre un taureau sauvage de venir au fond de la grotte et de ne plus bouger, ça allait encore être coton.
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"Comme si tu étais là"
Mes « Nefs » sont parties hier chez mon éditrice, après une énième relecture critique (on ne se refait pas). Maintenant, je m'octroie enfin une pose, avec lecture (L'inauguration des ruines, de Jean-Noël Blanc, aujourd'hui) et écoutes de documents qui m'intéressent. Je me régale notamment avec ces cours d'assyriologie du collège de France, offerts par la grâce du Net, à tout béotien qui voudrait se cultiver un peu. Le conférencier, Dominique Charpin, évoque dans son discours inaugural, une anecdote que je trouve magnifique : En Mésopotamie, le courrier fonctionnait très bien, et les bibliothèques royales retrouvées en conservaient un nombre impressionnant. Leur support presque indestructible a permis qu'elles nous parviennent en nombre. Les tablettes d'argile circulaient, transmettaient des informations sur le quotidien, les petites choses de la vie. Parmi les dizaines de milliers de lettres mésopotamiennes sur argile, l'une d'elles dit l'émerveillement d'un des tout premiers lecteurs (nous sommes au début de l'ère de l'écriture). L'auteur répond à la lettre d'un ami en lui disant notamment, que ses mots « faisaient comme s'il était là, à côté » de lui. Un étonnement, une jubilation semblable à celle que nous avons pu éprouver lors de nos premières conversations via webcam. Le pouvoir d'évocation de l'écriture, sa capacité à cristalliser une présence, malgré l'éloignement physique. Je suis très sensible à ces passerelles développées bénévolement par dessus des périodes immenses (là, on parle de -3800 ans BP). Et pendant ce temps, des crétins détruisent par le feu leur propre patrimoine.
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C'est curieux, cette manie qu'ont les écrivains, de faire des phrases.
Quand j'écris certaines phrases, dans un roman par exemple, il arrive que, à cause du rythme, de ce que vivent les personnages, et sans doute aussi à cause de mon goût pour l'exercice stylistique que cela représente, les phrases en question n'en finissent pas. Je ne cherche pas à les réduire alors, au contraire, mais je m'acharne à les rendre lisibles, limpides, malgré leur apparente complexité, c’est un des aspects qui me fait aimer ce moment, quand j'écris certaines phrases, dans un roman par exemple, il arrive que, à cause du rythme, de ce que vivent les personnages, et sans doute aussi à cause de mon goût pour l'exercice stylistique que cela représente, les phrases en question n'en finissent pas. Je ne cherche pas à les réduire alors, au contraire, mais je m'acharne à les rendre lisibles, limpides, malgré leur apparente complexité, c’est un des aspects qui me fait aimer ce moment, quand j'écris certaines phrases, dans un roman par exemple, il arrive que, à cause du rythme, de ce que vivent les personnages, et sans doute aussi à cause de mon goût pour l'exercice stylistique que cela représente, les phrases en question n'en finissent pas. Je ne cherche pas à les réduire alors, au contraire, mais je m'acharne à les rendre lisibles, limpides, malgré leur apparente complexité, c’est un des aspects qui me fait aimer ce moment, quand j'écris certaines phrases, dans un roman par exemple, il arrive que, à cause du rythme, de ce que vivent les personnages, et sans doute aussi à cause de mon goût pour l'exercice stylistique que cela représente, les phrases en question n'en finissent pas. Je ne cherche pas à les réduire alors, au contraire, mais je m'acharne à les rendre lisibles, limpides, malgré leur apparente complexité, c’est un des aspects qui me fait aimer ce moment, quand...
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Méta
Et donc, grâce à Hélène Gestern,auteure de "Portrait d'après blessure", j'apprends que les interventions à la première personne dans "L'Affaire des vivants" ressortent de la métalepse narrative: "La narratologie qualifie de métalepses les diverses façons dont le récit de fiction peut enjamber ses propres seuils, internes ou externes. Gérard Genette y voit une « figure par laquelle le narrateur feint d'entrer (avec ou sans son lecteur) dans l'univers diégétique».
Je vous laisse méditer là-dessus et je retourne à mes Nefs, qui, décidément, refusent de me laisser un peu de répit (et ça, je ne sais pas, ce doit être une prosopopée, je dirais).
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Respect
"Moi, je n'y connais rien, mais il avait des arguments tout à fait pertinents."
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Aujourd'hui, à Saint-Haon-le-Châtel
C'est la seconde fois que la bibliothèque de Saint-Haon-le-Châtel me fait le plaisir et l'honneur d'une invitation. Et c'est toujours un joli temps de rencontre. Jean Mathieu animera ce moment prometteur (pour moi en tout cas), et nous réfléchirons ensemble sur les notions d'Histoire, ce qu'est la littérature relativement à la culture de masse, ce que c'est que d'écrire. Autant de sujets qui dépassent le seul propos de "l'Affaire des Vivants", qui a motivé cette invitation. C'est à 17 h, aujourd'hui, à la bibliothèque de SAINT-HAON-LE-CHÂTEL (Loire).
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Paroles et plumes, ce soir.
Ce soir, à 20h30, je suis l'invité du cercle de lecture « Paroles et plumes » de Saint-Germain-en-Laye (ville où j'ai déjà eu le plaisir d'être reçu en librairie et dont la bibliothèque pour tous m'accueillera le 10 février). Je ne serai pas seul. Un autre auteur, Hélène Gestern, sera présente pour évoquer son dernier roman « Portrait d'après blessure », paru chez arléa. L'intérêt d'une telle rencontre est, peut-être, qu'il n'y a pratiquement aucune passerelle entre son récit (l'incidence d'une photo de presse sensationnelle sur la vie d'un homme et d'une femme, et tous leurs proches), la forme qu'il prend, son style et le mien. Justement, je crois que ce sera enrichissant. On me dit d'avance qu'il y aura du monde, mais si vous voulez venir, c'est au 3 rue de la République, pas loin du RER.
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Corrige-moi
Ma grande chance est d'avoir une lectrice à domicile. Si d'aventure, vous avez lu mes derniers romans et que vous leur avez trouvé certaines qualités de clarté, sachez que, sous cet aspect en tout cas, c'est en grande partie à elle que vous le devez. Les raccourcis trop abrupts, les phrases trop complexes, ma douce les relève impitoyablement (ce que je lui demande, d'ailleurs). Après, je reste maître de mon livre, et il m'arrive de passer outre ses recommandations, mais je tiens compte de son avis. Et là, par exemple, il est évident qu'il manque un chapitre vers la fin de mes Nefs. J'étais allé un peu vite en besogne, me disant que, au bout d'un tel volume, le lecteur a surtout envie d'en finir vite. Apparemment, non. Ce qui est bon signe.
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Pas beau de bouder
Lors de sa création, l'iguane a bien remarqué l'accueil gêné des autres animaux. Aucune acclamation, aucune manifestation de ravissement comme ça avait été le cas pour le cheval ou le chinchilla. On ne lui reprochera donc pas son air constamment renfrogné et son sentiment d'avoir été l'objet d'une injustice qui se poursuit encore.
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Proust, visionnaire
Ne l'oublions pas, Marcel Proust, très en avance sur son temps, présente le baron Palamède de Guermantes, tenant devant lui un panneau : « Je suis Charlus ».
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A bon port
Les Nefs de Pangée abordent les rivages des derniers chapitres. Gros chantier, rondement mené, grâce à une écriture acharnée. Huit heures d'écriture par jour produisent en moyenne quatre pages : en cent jours, à ce rythme, tu ponds un roman. Pas compliqué. Amusant, fatiguant, prenant, mais rassurant de voir que je peux venir à bout d'un gros volume sans trop souffrir. Le métier, mon petit, le métier... Bilan pour l'instant : quelques pages dont je ne suis pas mécontent, des scènes puissantes, je crois. La mise à l'épreuve de ma capacité à décrire du spectaculaire. Pas évident, ça, le spectaculaire, le monumental, l'épique, sur papier. C'était l'idée. Vendu à mon éditeur comme : L'Iliade + Moby Dick + Salammbô x Cecil B. de Mille, ce qui l'avait alléché, le projet original était un diptyque. Les difficultés de l'édition aujourd'hui lui ont fait préférer un seul volume rassemblant les deux initialement prévus. Un gros volume. A l'heure où j'écris ces lignes, il me reste trois courts chapitres à écrire. Soient trois jours. Quand ce billet sera posté, j'espère être dans la relecture critique bicéphale (la mienne et celle de ma douce), c'est-à-dire la phase avant envoi à ma chère impitoyable éditrice, Stéphanie. En attendant son retour, vous savez quoi ? Je ne vais pas m'attaquer au chantier suivant. Je vais m'accorder une pose. Et lire ! Beaucoup. La récré, quoi.
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Puisque j'te dis qu'c'est lui !
La bizarrerie des gens... Il m'est arrivé plusieurs fois que, pendant une dédicace, une personne fasse la queue, se plante enfin devant moi : « Vous ne seriez pas le Christian Chavassieux qui était à telle école, à tel endroit à tel moment ? » Oui, réponds-je, heureux que, de si loin, on se souvienne de moi, qu'on soit curieux de ce que je fais, etc. « Merci, je voulais être sûr(e) » et la personne se retire, sans un mot de plus. Simple vérification, on peut cocher la case, c’est bien lui, bon qu'est-ce qu'on mange ce soir ? Voilà. J'en suis toujours un peu interloqué.
Il y a un mois, je reçois lettre et documentation jointe d'un « emboucheur et affineur de charolaises ». La plaquette présente l'entreprise du monsieur et la lettre, très chaleureuse, évoque un lointain passé commun, tel collège, etc. Sur le même ton amical, voire empressé, le monsieur poursuit en disant tout le plaisir qu'il a eu à lire mon dernier bouquin, qu'il est très heureux de voir ma « médiatisation » (oui) et que ce serait très chouette de se revoir. Il a manuscrit soigneusement son adresse mail pour que je lui réponde, au moins, par ce biais. Ce que je m'empresse de faire dans les minutes qui suivent, par politesse, par égard pour son gentil mot, en le félicitant pour sa réussite, sa belle plaquette et en lui disant que, bien sûr, s'il veut qu'on se revoie, il y a telle ou telle disponibilité, à lui de voir. Les jours, les semaines passent. Pas de retour. Bon. Peut-être n'a-t-il pas reçu le mail. L'actualité, Pasiphaé, l'écriture intense, je laisse cela au second plan. Et puis, tout de même, il faut bien que je lui dise, s'il n'a pas reçu mon message, que je n'ai absolument pas dédaigné ses souvenirs et son gentil courrier. Je téléphone. Il décroche, je me présente, « Ah salut » me dit l'emboucheur. Je commence par « Je suppose que tu n'as pas dû recevoir mon mail... » et j'entends l'affineur : « Si si, bien sûr, je l'ai lu deux fois. » Il n'ajoute rien. Mais rien. Je reste sans voix (sauf intérieurement : Putain, mais tu pouvais pas me répondre en retour : bien reçu, pas le temps, trop de boulot, je t'appelle... Enfin, donner un signe de vie ?). Après quelques minutes d'échanges absolument désincarnés, je raccroche. Abasourdi. Et je réalise qu'en fait, je viens d'être confronté au même phénomène que les personnes qui viennent s'assurer que le type qu'ils ont vu dans le journal, oui, c'est bien celui qu'ils ont connu il y a longtemps. Vraiment, vraiment bizarre, non ? -
La première f(a)ille
Lors de mon passage au concours d'entrée à l'Ecole des Beaux-Arts de Saint-Etienne (je vous parle d'un temps...), j'étais un garçon pataud et complexé. M'intimidaient surtout les filles, toutes plus belles et sérieuses les unes que les autres. Sérieuses, oui. Belles mais glaçantes. Les impétrantes ne souriaient pas, le sourire devait avoir quelque chose de l'ordre de la soumission, de l'allégeance au système, enfin une idée comme ça. Bref, les filles étaient engagées, militantes, hautaines et austères. L'une des épreuves était la présentation d'un dossier. J'avais honte de mes petits dessins, mais enfin, le jury ne fut pas l'assemblée sarcastique et cruelle qu'on m'avait préparé à voir.
Tout se passe bien. Je n'en mène pas large pour autant. En fin de journée, je revois une fille avec qui j'avais échangé quelques mots le matin. Belle brune, sévère, austère, etc. Vous avez compris. Elle vient de passer l'épreuve, je lui demande comment ça s'est passé. Elle ricane : « Ces cons ! Je leur ai montré des dessins politiques. Y'en a un qui m'a demandé ce que ça voulait dire ! Le con ! Je lui ai dit que s'il était pas capable de comprendre un dessin politique, fallait qu'il s'interroge, lui, pas moi. Ah, le con ! » J'étais très admiratif d'une telle force de caractère. Je n'osais rien ajouter, de peur qu'elle me montre les dessins et que je sois moi aussi, (si peu politisé à l'époque) rangé dans la même catégorie que le prof qui avait osé contrarier la jeune femme.
Finalement, je fus reçu. Pas revu la fille. Les cons avaient renoncé à lui infliger leur ignorance crasse. J'ai commencé à questionner mes préjugés. Est-ce que quelqu'un qui a une grande gueule est forcément plus intelligent que moi ? -
C'est vendredi aussi
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C'est vendredi
Sa mère lui avait bien dit : ton histoire d'amour avec la petite sirène se terminera en queue de poisson.
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Demain
Demain, à 18 heures, rencontre autour de « L'Affaire des Vivants » à la Bibliothèque de Commelle-Vernay (Loire), animée par l'ami Christian Degoutte qui a eu la gentillesse d'accepter ce rôle difficile. Il a bien travaillé le bougre, a trouvé des passerelles et des points d'interrogation pertinents. Je pense que ça devrait bien se passer, en toute simplicité.
Nous vous espérons nombreux. -
Paroles de Gord
"Nous avons été élevés dans la conviction que l'espèce humaine se différenciait des autres par son goût pour la destruction, par sa perversité. En fait, dans notre manière de voir les autres espèces, il ne manquait qu'un peu de patience ou de temps. À la fin, nous aurions fait le constat qu'elles n'étaient en rien différentes de la nôtre. C'est ce monde, la complexion de cette nature, qui produit l'amour du meurtre."
Extrait de "Les Nefs de Pangée" à paraître en décembre chez Mnémos.
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Je suis chagrin
Cette incompréhension apparemment irréductible entre ceux qui veulent pouvoir blasphémer si le cœur leur en dit, sans contraintes, et ceux qui deviennent hystériques dès qu'on s'amuse avec leur foi. Je dois donc faire mon mea culpa.
Je confesse que je me suis gaussé de Claude François, avant et après sa mort, et de la façon la plus cruelle qui soit. Je le regrette sincèrement. Si ça peut les soulager, j'invite tous ses fans à cracher sur le dieu des athées, ça m'apprendra.