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Ecrire - Page 16

  • Au laboratoire

    Depuis mardi, et jusqu'à la fin du mois, les comédiens de la compagnie NU sont à la tâche. Ils travaillent chaque jour dans nos locaux de la Livatte, à Roanne, pour intégrer le texte et les chansons de Pasiphaé, qui sera jouée d'abord au Théâtre de Roanne le 9 janvier. Pour une fois, il semble que je vais pouvoir réaliser un vieux fantasme : découvrir la pièce la soir de la première. En attendant, Aurore Pourteyron, François Frapier (en remplacement de Philippe Noël qui ne pouvait finalement pas être là) et François Podetti, ont engagé les répétitions de cette « farce musicale » qui, quelle que soit sa réception, aura marqué un tournant dans les productions de la compagnie. Et, oui, je travaille déjà sur la prochaine, Minotaure, qui sera une autre forme, une chose poétique plus proche de l'installation d'art contemporain que du théâtre. L'autre nom de la compagnie c'est « laboratoire », alors on expérimente, que voulez-vous. En attendant, je travaille des jours entiers sur « Les Nefs de Pangée » et, surprise, j'ai l'impression que ça va être un roman plus intéressant et riche que je pensais.

  • Tu écris

    Tu ne cesses d'écrire, tu enchaînes roman sur roman, texte sur texte, parce que tu crains que, à l'occasion de la moindre suspension, se révèle le désenchantement du monde, tu crains que n'apparaisse l'épopée vulgaire et dérisoire qu'est la vie.

  • C'était en Charybde...

    C'était à la librairie Charybde, le 24 octobre dernier, un enregistrement de la soirée par nos libraires, mis en ligne, et que je découvre. Pour les fans exclusivement (ça dure plus d'une heure).

     

  • Voir grandir "Voir Grandir"

    Quelle frustration ! Je ne peux pas, je ne peux pas mettre en ligne ce qui motive cette énorme frustration, mais je vous assure, je suis tout ébaubi : le compositeur attitré de la compagnie Nu, le musicien de chacune de mes pièces en fait, travaille en ce moment sur la mise en chanson d'une série de textes que je lui ai dédiée. Cela s'intitule « Voir Grandir » et vous avez pu avoir un aperçu des thèmes via Kronix, qui en a publié quelques extraits. Chaque semaine ou presque, Jérôme Bodon-Clair m'adresse les fichiers de ses somptueuses maquettes, qui sont à chaque fois un tel régal, un tel régal... Ah, j'ai hâte de pouvoir vous faire goûter ses mélodies, ce travail hors-normes, prélude à un « vrai » album !
    L'aspect original de cette production tient dans la manière dont nous avons abordé sa construction. Après la superbe expérience musicale de Jérôme sur « Nos Futurs » et « Lucifer Elégie », nous sommes convenus qu'il ne fallait pas changer de méthode et j'ai donc écrit les textes de l'album sans tenir compte d'une possible mise en musique, d'une versification, rimée ou pas. Une sorte de poésie brute, telle que vous la découvrez dans les billets intitulés « Voir Grandir », sur ce blog. C'est à partir de ce matériau non conventionnel que Jérôme travaille. Et cela donne forcément une forme différente, des mélodies qui épousent la musique du texte, enfin une vraie découverte pour nous tous. Et ce n'est pas fini : l'autre comparse de la compagnie Nu, Marc Bonnetin, va au final s'emparer de tout ça et imaginer des sortes de vidéo-clips (là aussi, forcément en marge des clips existants). Tout ce travail, avec des bribes d'écriture préparatoire, des infos, des photos, sera l'an prochain mis en ligne sur un site dédié. J'ai hâte de vous faire partager cette merveilleuse aventure, cette histoire aussi amicale qu'artistique.

  • Voir Grandir

    Et vous, que dites-vous ? Quelles sentences mûrissez-vous dans les lignes archaïques ? Et nous. Nous. Tant pis, nous resterons à l'abri. Tant pis. Aveugles, sourds, autruches, pas indifférents mais égoïstes, pas détachés mais conscients de ne rien pouvoir. Ô les temps redoutables, Ô les désastres que vous préparez ! Allez au massacre, faites-vous mal, rejetez-nous dans l'impuissance. Vous ne nous épargnerez pas, je le sais, mais venez tard, laissez-nous un peu de répit. Que nous soyons repus de tous nos festins quand vous viendrez enfoncer la porte.

  • Voir Grandir

    Quel adulte, quelle fée, quel apôtre ? Grandis, allons grandis ! Fais vite, j'ai hâte de te connaître. De savoir la personne dont tu n'es que l'amorce. Une personne vraie. Je me réjouis de découvrir celle que tu seras, avec qui je jouerai sur les mots, à qui je conterai mes joies. Une personne tout entière, avec ses grandeurs et ses failles. Grandeurs et failles qui ne seront pas miennes. Dépasse-moi, sois grand, allons grandis ! Grandis et montre-moi, dis-moi ce que tu penses, partage, fais-moi tes confidences. Que j'apprenne de toi, que tu me dises demain. Demain qui t'appartient, demain que tu comprends, demain qui est ton monde, déjà, où je suis un enfant.

  • Relativiser

    Je l'avoue, il a pu m'arriver tout récemment, de m'inquiéter du trop de chantiers d'écriture que j'ai à gérer. Produire, entre autres, un roman qui soit « un livre ambitieux, à la hauteur de Mausolées » (dixit mon éditrice), d'ici le mois de juin 2015, et enchaîner avec un roman « historique » dont j'ai promis le manuscrit pour décembre de la même année à mon autre éditeur, cela génère des moments de panique. Et puis je me souviens des temps où être seulement édité était de l'ordre du fantasme, et je me remets au travail, dix heures par jour, avec enthousiasme et une sorte de reconnaissance.

  • En attendant

    Godot chante généralement en Anglais. Godot est extrêmement talentueux, Godot est un bosseur infatigable, et c'est la moindre de ses qualités. En ce moment-même, Godot s'empare d'une série de textes dont Kronix a dévoilé quelques extraits. Godot mitonne ce que je serais tenté d'appeler un bijou, une perle, une merveille. L'élaboration d'un album est un long long voyage, un périple, une odyssée. Un autre partenaire rejoint l'aventure et va apporter la magie de ses images. Au terme de tout ça, je suis très confiant, je suis sûr qu'on va vous épater. Vous l'avez compris, Voir Grandir sera le beau projet de 2015, après Pasiphaé et avant Les Nefs de Pangée, autant de façon pour moi d'aborder l'écriture, et de rencontrer des gens de qualité. Je vous tiens au courant, bien sûr, d'ici la fin de l'année je pense, un site dédié vous contera les escales de cette grande traversée.

  • La sanction des artifices

    Dans le roman sur lequel je travaille (encore situé dans l'Histoire), je vais me permettre de faire ce que je m'étais plus ou moins interdit dans "L'Affaire..." : mettre en scène des personnages ayant existé. Ce seront des personnages secondaires, mais tout de même, il faut que je me fasse une opinion sur Marie-Antoinette, son architecte, Louis XVI, etc. Comment faire ? Car je m'étais jusque là censuré en arguant qu'il est impossible et prétentieux de croire qu'on peut le moins du monde accéder à la vérité d'une époque, surtout si elle est lointaine (même proche, même une génération, et encore dans notre propre archéologie : suis-je vraiment sûr de ma façon de penser quand j'avais douze ans ?). En fait, la solution que j'ai adoptée est que tous les personnages du roman -et ce que nous pouvons savoir de leurs pensées et réactions- seront passés par le filtre du regard d'un personnage qui lui, est fictif.
    Je crois que ça se tient.

  • Le piège

    Accablé de prix célébrant son écriture chantournée et laborieuse, loué pour l'apparente moralité de ses propos et l'élévation de ses thèmes, cerné par de vieux érudits satisfaits de voir en lui le dernier représentant d'une veine romanesque vouée à disparaître, l'écrivain sauta sur la table du salon du livre et se mit à hurler : « Je ne suis pas mort ! »

  • Voir Grandir

    On n'évite pas les ombres, quand le soleil est bas, on n'évite pas les ténèbres des gouffres. Y'a pas que des saillies, il y a des abysses, de mauvais précipices. Des fois ça grouille et tu es pris de doute. Est-ce bien là que je vis, à ça qu'on me destine ? Des fois, le soleil est plus fort et l'ombre plus opaque. Alors mon doux péril, ma ressemblance, le froid t'enveloppe, alors la peur applique sur ta nuque la mouillure de ses lèvres. Ce n'est pas que l'on soit mauvais. C'est qu'on est bête. C'est que la clarté sur nos têtes allonge sur la terre de noirs épouvantails. Et pour quelques uns, les silhouettes étendues sont un désir de cadavre. Il faudra faire avec. Les ombres t'accompagnent, elles font des grimaces qui ne te ressemblent pas. C'est pourtant toi, petit, crois-moi, c'est pourtant nous, tout aussi bien. Il faudra faire avec.

  • Aurélia et le cerisier

    Un rendez-vous réussi, c'est rassurant, cela donne à croire qu'on peut parfois contrôler la vie, lui faire les cadeaux promis, tels qu'imaginés longtemps avant. C'était sous le cerisier, c'était tout à l'heure, et c'était comme prévu, un verre de blanc frais à la main, avec le soleil pour compagnon. Il s'agissait de préparer la rencontre du 16 octobre, au Tramway à Lyon. Une idée de Laurent Cachard, m'invitant dans sa librairie préférée. Une bonne idée, donc.
    Forcément, tandis que Laurent, venu expressément chez nous pour cette raison (et grand merci à lui), évoquait les questions qu'il poserait et que j'esquissais les réponses qu'elles m'inspiraient, nous échangions des réflexions parallèles et complices, et réalisions cette évidence : les mêmes contraintes romanesques et historiques placent les auteurs face aux mêmes interrogations. C'est que Laurent, dans le même temps, pense à son travail actuel sur Aurélia, qu'il achève en ce moment-même. Ce que lui dis de mon « Affaire », du processus qui a présidé à son écriture, fait écho aux problèmes qui fondent son actualité scripturale.
    Des livres certainement très différents, deux univers, et un impeccable renvoi d'expériences. La rencontre d'aujourd'hui était très belle, elle augure d'une belle soirée, le 16.

  • Voir Grandir

    Je ne t'en dis pas plus, tu ne me croirais pas, je ne t'en dis pas plus. Grand ouvert garde-toi, tout prêt à te confondre, à t'étonner de tout. Une planète entière t'offre de quoi aimer, c'est beaucoup, cette offrande, Grand ouvert garde-toi, tout prêt à te confondre. Des cieux frangés de palpitations vertes, un givre de banquise couché sous les étoiles, une sonate, les jeux d'eau dans la villa d'Este, une pavane dédiée à une infante, des cors qui appellent Siegfried et des trains de nuit inaltérables, une tempête, un champ de blé, une rivière sous le vent, des déserts cuivrés, des cathédrales et des forêts, des géants sous les flots, ils ont pensé à tout, les âges d'avant toi, ils ont tout fait pour t'épater, en prévision du jour. Je ne te dis pas tout mais je peux te dire encore. Des palettes enivrées de colère ou des marbres laiteux, des danses africaines, des chants réinventés, des chorales, des cascades, des bleuets, des précipices et des sommets, des soleils endormis sur la grève, et les trésors à venir, ils ont pensé à tout, les âges d'avant toi. Je ne t'en dis pas plus, tu ne me croirais pas, je ne t'en dis pas plus.

  • Au Mots Doubs, le temps dure - 2

    Le lendemain, je reprends mon poste de travail. Je salue gentiment le staff de vendeuses qui ne me propose toujours pas de café mais ce n'est pas grave. Bougel apparaît, me demande ce que je suis devenu, hier, il m'a cherché partout entre les plateaux de toasts, a vérifié sous les tables, pas de Chavassieux. Je lui explique sinon mon agacement, en tout cas, ma préférence pour les pizzerias exilées. Bougel s'étonne que je sois peut-être moins mondain que lui, ce qui serait remarquable.

    Une femme s'arrête devant ma table, demande si j'ai « des romans d'amour » ; je ne m'attarde pas à lui dire que, peut-être, tous les romans sont des romans d'amour et la dirige vers mon voisin de gauche, dont le livre peut entrer dans cette catégorie. Le garçon se fend d'un début de pitch mais la dame l'interrompt après cinq secondes : « ça ne me plaira pas » et tourne les talons brusquement. Nous éclatons de rire. Un moment complice.

    Au téléphone, comme la veille, ma douce se désole pour moi. Je considère surtout ce précieux week-end, autant de temps d'écriture, jeté aux orties.

    Et puis, comme je m'obstine à griffonner sur mon calepin, s'approche une jeune femme. Elle m'annonce d'emblée qu'elle a crevé son budget aujourd'hui et qu'elle ne pourra pas acheter mon livre, mais que me voir écrire à la main l'a touchée. Je la rassure sur le fait qu'aujourd'hui pas plus qu'hier, il ne m'est paru urgent de vendre mes livres. Nous entamons un échange qui va ensoleiller ma journée. Les réponses que je fais à ses questions, ce que je lui dis de l'écriture, de mes choix de vie, les mots que je mets derrière le titre de mon livre, tout cela la bouleverse, et elle fond en larmes. Je crois que je ne suis pas loin d'être aussi bouleversé qu'elle. Elle décide finalement d'aggraver son dépassement de budget et achète deux livres, que je lui dédie avec une sincère émotion. L'un est pour un oncle et sur l'autre, j'ose déclarer que sa venue a expliqué la mienne, et que j'ai bien fait de venir. C’est un peu mélo mais le contexte, la beauté de ce partage, peuvent pardonner cet élan. La jeune femme repart, mes voisins sont silencieux, ils ont assisté à l'échange et sont remués eux aussi.

    Je note dans mon calepin que je pense à ceux que j'aime, à cet instant.

    Après le repas, je traîne pieds nus dans la pelouse du parc, le long du Doubs aux eaux transparentes. J'aime ce contact, je m'y livre dès que je peux, où que je sois. Je m'allonge dans l'herbe. Des nuages d'orage accumulent leur masse sur la moitié du ciel. La rencontre de tout à l'heure m'a rasséréné. Sur le stand, mon rentable voisin est parti. Je fais un sondage dans son ouvrage. Ma brève lecture est une confirmation. L'orage crève, la pluie gronde sur le toit de toile, le chapiteau fait chambre d'écho. L'effet hypnotique que produit sur une personne assise, la noria des visiteurs, est décuplée par le grondement qui enveloppe les lieux. Je flotte dans un éther blanc, coloré de silhouettes qui défilent.

    Corinne Desies-Dalloz, la charmante libraire de la Nouvelle libraire de Poligny a fait le chemin (pour la deuxième fois, apprends-je) pour me rencontrer. Elle veut me recevoir en novembre (nous avons choisi le 12 de ce mois, ce sera la saint Christian et pourquoi pas), et nous discutons un peu. Ce qu'elle me dit de sa librairie et sa façon de la conduire m'évoque irrésistiblement celle de ma douce. Corinne sera reçue dans quelques heures par France Bleu pour parler de « L'Affaire des Vivants » avec mon éditeur, Lionel Besnier, revenu expressément dans ce but. Lorsqu'ils seront au micro tous les deux, je serai dans le train. J'aime bien l'idée qu'un livre soit « défendu » autrement que par son auteur, qui n'est pas forcément le plus légitime pour ce faire.

    Sur le stand, Jeanne Labrune ne tient pas en place, je la vois sortir sans arrêt de son poste, marcher rapidement dans les allées puis revenir derrière ses livres.

    Une maman approche, tenant sa fillette devant elle. « Elle voudrait vous poser une question ». La petite qui doit avoir dix ans, prononce timidement une phrase que je ne saisis pas dans le brouhaha. Sa mère traduit : « Elle veut écrire un roman et elle aimerait avoir des conseils ». Pourquoi est-elle venue s'adresser à moi ? Je dois être le seul auteur désœuvré, je suppose. « Est-ce que vous travaillez tous les jours ? » je lui dis que oui, justement, pour écrire un roman, c'est la formule que j'ai choisie. « Mais même si tu n'écris pas, mets-toi au travail quotidiennement, ne serait-ce que pour relire ce que tu as écrit la veille, avec un esprit critique. Interroge chaque ligne, chaque mot que tu as écrit. » Après quelques conseils du même tonneau « fais lire ton travail, sois humble, accepte les critiques, enrichis ton vocabulaire, enlève les doigts de ton nez », ponctués d'encouragements, j'énonce un principe fort répandu : « Et surtout, lis, lis beaucoup. » Ce qui me vaut les remerciements de l'auteur-éditeur-agent littéraire à côté de moi, qui voit constamment s'adresser à lui de jeunes écrivains qui écarquillent les yeux quand il ose leur demander ce qu'ils lisent, ce qu'ils aiment lire, quel livre ils ont lu récemment. « Lire, pourquoi faire ? »

    Oui.

  • Tranquillou

    Moi, vendredi dernier : « La mise en musique des textes fonctionnait à merveille, ça donne envie de faire tout un album, non ? »
    Jérôme : « Allez, c’est parti, envoie les textes ! » (une formule plus élaborée mais vous avez le sens du propos, là)
    Oliv', la semaine dernière : « J'ai un projet de court animé avec toi et François costumés en guerriers barbares, ça te dit ? »
    Moi : « Ah ben ouais, super ! » (je m'exprime de façon assez triviale, parfois...)
    Cédric, tout à l'heure : « Je reprends les projets BD. Je me remets sur Cortés, il faut qu'on revoit le design des persos des Nefs de Pangée, il me faudrait un scénar sur une histoire de pirates, il faut qu'on se voit pour le projet jeunesse (top secret), et je vais reprendre le dossier Enthéide... »
    Moi : « Oui, ben tranquillou bilou, je vais bosser ce Week end, je suis en dédicaces mais je devrais pas être débordé » (mon langage devient de plus en plus trivial)
    François, la semaine dernière : « Pour Minotaure, il faudrait que ce soit une sorte de rêve suspendu, quelque chose d'abstrait... de musical et d'abstrait ; »
    Moi : « Oh, c'est une très bonne idée, ça, François ! Je m'y mets tout de suite. » Le même, le même jour : « J'ai un projet de série télé sur (sujet top secret), ça te dirait de bosser dessus ? »
    Moi : « Passionnant, ça ! je m'y mets. »
    Moi, avant-hier : « Daniel, laisse tomber pour le roman que je t'ai passé. Il faut que je le reprenne. A la réflexion, quelque chose ne va pas. Par contre, si tu peux me faire un retour de lecture... »
    Daniel : « D'accord, je vais le relire. Je te dis ça. »
    Frédéric, il y a un mois : « Les Nefs de Pangée, pas compliqué : J'adore. Je te rappelle pour en parler plus précisément. »
    Moi : « ... »
    Philippe, lundi : « Ne prends pas trois ans à écrire ton prochain roman, ne te laisse pas oublier par ton éditeur. Un conseil entre nous. »
    Moi (in petto)  « D'accord, il a raison, allez hop, je m'y mets. »
    Vincent, hier : « Je peux t'indiquer quelques éditeurs si tu veux, pour ce roman, là... »
    Moi : « Oui, je l'ai entièrement réécrit, je ne sais pas, merci, je vais peut-être le proposer, mais il faut quand même que je jette un nouveau coup d'œil... »


    mais vous savez, il m'arrive de refuser du travail, aussi.

  • Extrait

    On l'a cueilli sur le bord du chemin, pas loin des roues du carrosse, ou était-ce une calèche découverte, un de ces attelages légers qui prenaient de l'Angleterre le goût de la vitesse, ou encore une lourde berline, tonitruante, à trois paires de chevaux, énorme, de ces attelages que rien n'arrêtait, qui fonçaient dans les rues précédés de fantassins endurants ou de chiens immenses, jetés en avant-garde pour affoler la populace qui devrait s'écarter vite si elle voulait échapper à la mort aveugle lancée au galop derrière eux. C'était aux franges d'un petit bourg anonyme. Il y avait cet empressement de gueux accourus comme ils font à l'entour de toute pompe sait-on jamais, des fois qu'une bénédiction et quelques écus tomberaient des bourses, des fois que la manne fuserait parmi le crottin, semé avec une pareille désinvolture du cul des chevaux ou de la paume des dames – avec un soulagement moindre dans ce dernier cas – ou agglutinés là seulement pour voir, tant c'est beau, tant c'est un spectacle tout cet apparat, les cavaliers chamarrés, les postillons en livrées impeccables, la brillance des harnachements, le tonnerre des chevaux bien bouchonnés et des essieux bien graissés, des fers solides qui font gicler la caillasse.

     

    Extrait d'un roman (sans titre pour l'instant) en cours d'écriture.

  • Voir grandir

    On te rassasiera. On va t'en foutre, tu verras, jusqu'à la glotte. Tu vas en bouffer. Tu vas en crever. On va te goinfrer de tout ce qu'on fait, parce qu'on ne sait que faire. On ne sait que faire, depuis qu'on a décidé qu'on savait faire. On ne sait plus défaire, on ne sait plus refaire, on fait. On fait. On fait partout, beaucoup, on fait on fait, on fèque, on défèque, il faut tout le monde pour absorber tout ça, et tous ensemble, malgré tous nos efforts, on n'en peut plus, on est gavés, on est repus, on crie grâce, n'en jetez plus, ça va comme ça. Mais on ne sait pas faire, on s'affaire, on s'enferre, on s'enterre, on continue de faire.

  • Se sortir les doigts

    J'explique donc que pour moi , un roman est une longue stratification, que les personnages prennent relief et profondeur dans le temps de l'écriture, que mon prochain roman, à peine commencé, va me demander deux, trois, quatre ans. Mon interlocuteur, fin observateur de la vie littéraire depuis plus de trente ans me dit « méfie-toi que ton éditeur ne t'oublie pas, pendant ce temps-là ». La réflexion me frappe. Oui, finalement, maintenant que j'ai tout mon temps disponible et si je travaille à fond, il est bien possible que je le torche en un an, un an et demi, ce bouquin...

  • Les grosses mains dans les poches, avec des bretelles

    Je suis aujourd'hui à Lyon, au milieu d'un aréopage d'écrivains de premier ordre, où je vais parfaire mon image d'auteur rustique. Pensez à moi.

  • Hum

    Normalement, ça vient tout seul. Il suffit de poser quelques mots et le reste s'enchaîne sans difficulté. Au bout de quelques phrases un sens apparaît, et j'obtiens un billet de Kronix. Mais, comme on le voit ici, ça ne marche pas à tous les coups.