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kronix - Page 8

  • 3718

    Il fut convaincu que la meilleure technique de drague était de devenir un puissant homme politique ou une grande star de cinéma. Enfin, c'était la théorie. La mise en pratique dépassa de loin sa patience et il se résolut au viol, certes moins glamour, mais plus dans ses capacités.

  • 3717

    Ce soir-là, ils avaient appris que Donald Trump viendrait dans la région pour inaugurer l'extension du golf voulu par le président de l'agglomération. Celui-là même qui, descendant du curé d'Ars, avait une parenté avec le chanteur Vianey. Ils s'engageaient solennellement à déféquer nuitamment dans les trous dudit golf. Il avait été aussi question de location de manteau de fourrure, viatique nécessaire à dépasser les files d'attente d'un fameux pâtissier. Et de pas mal d'autres choses compliquées à cerner. Enfin, le réveil du lendemain matin avait été un peu difficile.

  • 3716

    Il est très rare (circonstances plutôt qu'indifférence) que j'anime un rencontre autour d'un livre. Celui-ci est très particulier. Il s'agit d'une anthologie. Une savoureuse et riche recension des écrivains (morts ou vivants), qui ont écrit sur ma bonne ville, Roanne. Des surprises : Laurence Sterne, David Ponsonby (compositeur élève de Nadia Boulanger), de grands noms (Tournier, Sabatier, Saint-Exupéry, Barbara, Arsand, Ponge...), des oubliés (Montforez, Mercier...) et d'actuels, dont l'excellent Christian Degoutte que j'ai évoqué sur ce blog nombre de fois.

    Pierre-Julien Brunet a accompli un travail assez incroyable. Je lui ferai dire l'origine, les recherches, la réalisation, la récompense enfin, la publication de "Regards d'écrivains". Son complice Dom Thoral, sera là pour parler de son regard de photographe sur la ville. On va se régaler, je vous le dis. C'est ce soir, à 18 heures, au Jardin de Papier, rue Maréchal Foch, à Roanne, justement.

    Affiche_RencontreDedicace_Brunet_22nov2019.jpg

  • 3715

    Quand tu écris, parfois, une certaine dynamique du récit contamine la syntaxe ou la ponctuation, et tu mets en place naturellement une forme singulière. Aucune volonté de révolutionner quoi que ce soit, simplement la ponctuation que tu as imaginée est enclose dans ton projet littéraire. Et puis, vient le temps fatidique où ton travail va passer sous les fourches caudines du correcteur ou de la correctrice. Là, c'est autre chose, il faut réguler, édicter tes propres lois, celles, inconscientes, intuitives, que tu as utilisées -et générées- dans le même temps. Et donc, ton éditeur te demande de poser noir sur blanc tes propres règles. Pourquoi, par exemple, n'utilises-tu pas toujours la forme [: "] ? Exercice salutaire. Ce qui donne, pour "Noir Canicule", le prochain :

    On mettra deux points ouvrez les guillemets [ : " " ] seulement quand la phrase qui précède la réplique contient une expression, un mot, un verbe, induisant l'idée de prise de parole directe ('une voix les stoppa' ; 'elle ajouta' ; 'la main ponctuait chaque mot' ; 'prendre à témoin')

    Attention à certains cas, comme p.5 du manuscrit. ' Il grogna pour faire comprendre sans le dire "Qu'est-ce que t'en sais" ' Je ne mets pas [ : ] avant les guillemets, malgré le verbe 'dire', parce que le personnage ne 'dit' pas ce qui suit. Il n'y a pas de prise de parole.

    La réplique s'achève par [."] quand la phrase qui la suit contient une expression, un mot, un verbe, induisant l'idée de prise de parole effectuée. ex. : [' "on va pouvoir y aller." Sa voix avait arpenté la gorge...' ]

    Enfin, il y a des cas où les paroles, les répliques, sont incluses dans le récit, sans s'en distinguer. Laisser ainsi, SVP. L'idée est celle d'une certaine distance de narration. Les phrases entre guillemets "sonnent", prennent un relief qui, dans les cas où je les ai retirés, nuiraient au rythme et à l'atmosphère que j'ai souhaité créer.

    Il reste la problématique des majuscules en début de phrase entre guillemets, que je laisse à l'appréciation du correcteur ou de la correctrice.

     

    Voilà, c'était un bref passage en coulisses. Merci de votre attention.

  • 3714

    Les livres commencés s'accumulent. Les notes sur les carnets sont poussives. L'écran ne s'allume plus que pour de vagues enquêtes… Des périodes qu'on aimerait ne pas traverser ou mieux : ne pas connaître. Dont l'expérience récurrente assure pourtant qu'elles sont, à terme, fécondes. Patienter, lové dans les sombres draps de la mélancolie. Patienter. Et, comme disait Paul (merci à Françoise pour ce rappel) :
    « Ces jours qui te semblent vides
    Et perdus pour l’univers
    Ont des racines avides
    Qui travaillent les déserts
    [...]
    Patient, patience,
    Patience dans l’azur!
    Chaque atome de silence
    Est la chance d’un fruit mûr!"

  • 3713

    La chasse au naturel exige réflexes et patience, quand l'animal fugitif s'est caché et surgissant soudain, revient au galop.

  • 3712

    Le chef pirate avait enterré le trésor. Que son équipage avait aussitôt remonté au jour. Par mesure de rétorsion, le chef enterra l'équipage, cette fois. Qui ne reçut aucun secours du trésor, cet ingrat. Indifférent au sort de ceux qui l'avaient aidé, le trésor se blottit contre le cou du pirate en ronronnant. C'était un joli trésor aux petites oreilles rondes et au poil soyeux. Le chef pirate décida de l'appeler désormais « ma crotte », de façon à ce que ne se reproduise plus ce genre de malentendu, à l'avenir. Et il l'enterra pour de bon.

    (Les blogueurs sont des extraterrestres comme les autres, il faut leur accorder d'être parfois fatigués, le lundi).

  • 3711

    « Et le prix Maurice Chamois de Boïeldieu est attribué à… (suspense, silence attentif de l'assemblée) Josiane Chamois de Boïeldieu ! » (Brouhaha, applaudissements clairsemés).

  • 3710

    Vous pouvez me retrouver aujourd'hui, au salon du livre de Chazelles sur Lyon, à partir de 10 heures. Je serai sur le stand de la librairie "Le sens des mots". Ce salon est le point d'orgue d'un événement plus long, une "Fête du livre" commencée le 7 novembre. Alors, festoyons et lisons !

    C'est à la "Chapellerie".

    A vous voir.

  • Nouvelle critique des Nefs de Pangée

    Jolie recension des Nefs de Pangée sur le site "Présences d'esprits" (qui est aussi une importante revue, dans le domaine). Justement, l'auteure (une certaine Marie Renée Lestoquoy) en a, de l'esprit. Je lie sa chronique bienveillante. C'est par .

    Un roman qui a plus de 4 ans, qui continue d'exister, d'être partagé et commenté... On va pas se plaindre, hein ?

  • 3708

    Courageux celui qui captura le tigre pour l'anniversaire du maharadja. Héroïques ceux à qui incomba de l'emballer dans du papier cadeau.

  • 3707

    Je demande à la pharmacienne des suppositoires contre la chute des météorites. Elle s'étonne : « Des suppositoires ? La chute des météorites ?
    - Oui.
    - Qu'est-ce que vous me chantez ? » ricane-t-elle.
    Je lui désigne alors la publicité qui nous surplombe et vante l'efficacité d'un anneau qu'on enfile à je ne sais quel doigt et est censé anéantir les ronflements. Je lui retourne sa protestation : « Qu'est-ce que vous me chantez ? »

  • 3706

    - « Et, à part l'écriture, votre passe-temps favori ? »
    - « M'occuper de ma douce. »

  • 3705

    La colère nous épuise. La nôtre et celle des autres. On aspire à une paix qu'on se refuse soi-même, qu'on n'obtiendra que par extrême lassitude, au bout de nos révoltes. Il s'agira donc d'un abandon, d'une défaite, et voilà qui nous met encore en rage. Vivants ?

  • 3704

    Elle rentrait chez elle après le travail. Il y avait une manif de gilets jaunes. Elle est restée prudemment à distance mais c'était son chemin. Une balle de LBD dans les jambes l'a fait s'écrouler. Les policiers se sont précipités sur elle et lui ont fracassé le crâne à coups de matraque. Des séquelles à vie, maintenant. Elle n'a que 19 ans. On pourrait même se satisfaire d'une justice qui punirait les coupables. Sauf que, même ça, elle n'y aura pas droit.
    Ce matin, j'avais prévu d'écrire une chanson d'amour. Ça va être difficile.

  • 3703

    Je marche dans la rue. J'entends derrière moi une voix de femme : « Allez, on marche. Allez ma petite ! » que je comprends comme les encouragements d'une mère à sa fille. La voix approche, et toujours : « Allez, Maria, marche ! Ne traîne pas. Il faut pas s'écouter si on veut avancer dans la vie. C'est dur mais c'est comme ça. Allez ! » La voici à ma hauteur ; elle me dépasse vivement. Elle est seule. Une petite bonne femme seule, dans un vieux manteau gris, gestes saccadés, à qui l'on a dit que, si elle avait perdu dans l'existence jusque là, si elle était au chômage, si on l'avait battue, si elle s'était retrouvée à la rue, c'était par manque de volonté. Alors, elle s'assène à elle-même les mots de sa malédiction. Ils ont gagné, les salauds.

  • 3702

       Elle abordait un paysage étonnamment verdoyant. À perte de vue, des collines couvertes d'herbe neuve, d'arbrisseaux, de hampes bourgeonnantes inclinées sous la pluie et, dans les fonds, le triomphe indiscuté des renouées, regroupées en massifs impénétrables, clapotant sous le martèlement des gouttes. Elle comprit qu'elle croisait la trajectoire d'anciens grands incendies que des essences pionnières tentaient de reconquérir. Au cours de son errance, elle avait caboté le long de régions contaminées où la vie ne reviendrait jamais. Ici, comme c'était le cas parfois, la terre n'avait pas encore renoncé. Les hommes délaissaient ces paysages incapables de les nourrir, de les désaltérer ou de les abriter. La concentration urbaine avait cela de bon que de vastes contrées délaissées s'ouvraient aux nouveaux nomades. Les pas de Grace faisaient craquer la couche superficielle d'humus et s'enfonçaient dans une pâte charbonneuse, vestige de l'embrasement, en des places que l'orage avait dénudées.
      Il se fit alors une obscurité plus profonde que celle causée par les lourds nuages au dessus d'elle. Une nuit grondante et mugissante, un déplacement d'air sinistre. Elle songea aux représentations de la Faucheuse, ses grandes ailes noires balayant le crépuscule. Elle regarda, sans en comprendre d'abord la nature, le nuage épais et sombre qui passait là-haut, tellement compact que la pluie en fut dispersée, arrêtée par l'obstacle. Et le nuage s'abattit sur la terre, ensevelit les collines et les vallons. Au contact du sol, la masse charnue qui le constituait se révéla et Grace, assaillie, sursauta et se débattit à grands gestes désordonnés. Des sauterelles. Par millions. Une marée, un éboulement, une submersion dans un grouillement innombrable. Sensation d'asphyxie, de plongée dans une matière toxique. Les insectes ne s'intéressaient pas à elle. Après une courte panique, elle se raisonna et se résigna à marcher au milieu de ce tourbillon assourdissant. Le temps qu'elle traverse un vallon, gagne le relief suivant et domine à nouveau le paysage, le nuage de sauterelles, repu, s'était soulevé, élevé dans le ciel mouillé, l'avait dépassée pour se précipiter plus loin vers l'ouest, abandonnant un sol ravagé. Elle reçut avec une immense tristesse la vision de cette terre rendue à sa stérilité, saccagée à peine avait-elle relevé la tête. Elle étendit la main, déclama avec solennité : « par mon pouvoir, moi, Christosa, l'Incarnée, la Ressuscitée... » émit un ricanement sinistre et reprit sa marche, d'un pas rapide, avec la volonté de vite laisser derrière elle le chagrin qui l'empoignait.

     

    "Demain, les origines". Extrait.

  • 3701

    On m'a traité de réac, de trotskyste, de syndicaliste, de laxiste, de philosophe, on m'a même traité d'écrivain. Quel sérieux on m'a prêté !

  • 3700

      Mina appelait sa mère quotidiennement, plusieurs fois ; elles étaient très liées. Alors deux jours sans nouvelle de sa fille, Martha était très inquiète. On ne l'avait pas vue non plus à son travail. C'était une indélicatesse impensable chez elle. Il n'y aurait aucun secours du côté de la police, la mère le savait : « votre fille est majeure, elle a le droit de partir sans prévenir personne », lui rétorquerait-on. Après une enquête infructueuse auprès des hôpitaux, Martha se rendit à Paris où vivait Mina. Elle avait la clé de l'appartement. Car c'était le sien. Martha avait décidé de vivre en province auprès de son compagnon ; Mina venait de trouver cet emploi dans la capitale. La solution était évidente : lui prêter son appartement déserté, plutôt que de le louer. Le concierge de l'immeuble confirma qu'on n'avait pas vu la jeune femme depuis plusieurs jours. Il ne s'était pas inquiété : une belle fille comme ça pouvait découcher quelque temps. Martha pénétra dans l'appartement. Tout était en ordre, propre. Aucune trace de lutte ou de cambriolage, pas d'effraction. Comme si sa fille était partie après avoir fait un ménage consciencieux, sans précipitation. Martha savait qu'elle devrait s'en sentir apaisée. Pourtant, un sentiment de panique commençait à la gagner. Elle appela son compagnon, demeuré chez eux : « Je vais rester ici, au moins cette nuit. On ne sait jamais, elle va peut-être rentrer. » Le crépuscule. Martha ne parvint pas à manger. L'appartement silencieux. L'obscurité. Elle erra un temps sans but entre les pièces avant d'aller se coucher dans la chambre de Mina.
      Un dernier coup de fil à son compagnon. Elle : des pleurs d'angoisse. Lui : des paroles rassurantes. Chacun dans son rôle. Le sommeil enfin, qui la saisit. Et puis, dans la nuit, Martha se réveille brusquement. Elle est en sueur. Une pensée a surgi, qui l'a jetée hors des rêves. Le rappel d'une sensation, plutôt. Dans la soirée, alors qu'elle était assise ici, elle avait échappé un stylo de son sac à main. Il avait glissé sous le lit ; elle s'était penchée pour le ramasser. Il lui revenait seulement maintenant, mais avec quelle autorité, que ses doigts, en saisissant le stylo, avaient touché quelque chose. Et maintenant, la sensation de ce quelque chose venait de s'éclairer dans ses pensées : ce pourrait bien être une masse de cheveux. Les cheveux du corps de Mina au dessus duquel elle dormait depuis quelques heures.
    Elle éclaira, se précipita. C'était sa fille, nue martyrisée, torturée, violée, étranglée.

    Tuée par le concierge, qui n'avouerait que des semaines plus tard.

  • 3699

    "Je peux tout expliquer !" s'exclama-t-il quand elle entra dans la chambre et le découvrit nu, dans les bras d'une femme, également nue. Et en effet, l'épouse n'aurait pas pu comprendre sans ses explications que la jeune femme avait été enlevée par une expédition punitive de Ouïgours, décidés à venger la mémoire du chef de leur groupe, tué par le patron de celle-ci, qui était sa secrétaire, un patron malfaisant qui la tenait sous sa coupe à cause d'un chantage à propos d'une vieille histoire familiale, c'est dire qu'elle ne l'aimait pas, d'ailleurs elle avait félicité les Ouïgours de leur acte de résistance et de l'exécution dudit patron, mais ils ne voulurent rien savoir, l'emmenèrent avec eux comme on soustrait un témoin gênant pour la suite des opérations car ce n'était pas fini, l’entraînèrent jusqu'à la frontière où ils avaient le projet de l'exécuter à son tour dans un garage en banlieue selon une méthode très barbare et affreuse, une spécialité de ces contrées. Elle parvint à s'évader par les égouts et, comme elle savait que le groupe avait des chiens, elle dut abandonner ses vêtements espérant, plongeant son corps — très beau, gracile, souple, elles sont toutes comme ça dans ce pays — dans l'eau noire des égouts, échapper à ses poursuivants. Bien lui en prit ; elle sema Ouïgours et limiers de cette façon et parvint, exténuée, ici où, paumée et on le serait à moins, elle sonna à la porte, et qu'il la trouva tandis que ("tiens-toi bien ma chérie, c'est là que ça devient incroyable"), la fièvre qui l'avait obligé cet après-midi à ne pas aller travailler, l'avait soudain quitté et que, transporté de bien-être après cette soudaine guérison, il se promenait nu pour s'assurer qu'il était totalement remis ("on fait comme ça chez nous, mais si, je t'ai déjà expliqué ce principe"). Ce qui fit qu'elle lui tomba à moitié évanouie dans les bras. Comprenant immédiatement son état, et pendant qu'elle lui racontait son aventure dans un français approximatif, il la doucha, la sécha et entreprit de la réchauffer. Lui n'avait pas eu le temps de s'habiller avec tout ça et, sentant le retour d'un peu de fièvre, avait jugé que son corps serait une source de chaleur plus efficace que n'importe quel truc d'appoint. Voilà.