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Matières à penser - Page 20

  • Marche

    Monter, descendre, oui, mais longer, traverser, prendre la tangente... L'usage de l'escalier limite les envies d'aventure.

  • çui qui dit qui est

    Dans La Vache, la deuxième sourate du Coran, il est clairement expliqué que les mécréants le sont par la volonté expresse de Dieu (« Quant aux incrédules (...) Dieu a mis un sceau sur leurs cœurs et sur leurs oreilles ; un voile est sur leurs yeux »). Si on se demande bien dans quel but, on peut en tout cas se réjouir que l'athée ne soit en rien responsable de sa philosophie et puisse même exiger du croyant le respect le plus haut, ayant bénéficié, contrairement à lui, de l'attention particulière de son créateur.

  • Rencontre avec Michèle Goldstein-Narvaez

    C'est ce soir à partir de 19h30 à la Brasserie Saint Philibert - place Saint Philibert - à Charlieu que j'aurai le plaisir de participer à une  rencontre avec Michèle Goldstein-Narvaez, auteure de "Nous attendons de vos nouvelles", dont je vous avais parlé ICI.

    La soirée est organisée par la librairie Le Carnet à Spirales, à Charlieu, et son responsable, Jean-Baptiste Hamelin, sera également présent (nous ne serons pas trop de deux pour aborder ce livre et ce thème intimidants).

  • A l'usure

    Comment percer le flanc d'une haine toute faite d'un bloc ? Il faut bien espérer que dans la cuirasse subsiste quelque défaut. Et s'il n'y en a pas, il faut attendre la fatigue. Car la haine demande de l'énergie. Son carburant est la peur. La peur vient de l'inconnu. Il suffit que l'inconnu entre dans la vie, se fasse connaître, s'installe. La bête s'accoutume. Il est même possible que la présence de l'autre lui plaise. Le bloc de haine s'use et s'épuise. S'estompe, disparaît. On ne sait bientôt plus pourquoi et comment la bête s'était construite. Tout rentre dans l'ordre. Enfin, bref, je veux dire, pour le mariage des homos, il faut tenir bon.

  • Sans ciel au dessus

    Athée, en prière tout de même, une manière de concentration pour mieux supporter les colères du monde, et dans cette concentration, savourer la douce épice du dérisoire.

  • La tentation encyclopédique

        Mon modèle était ces vieux Larousse aux couvertures épaisses, rouge ou verte. Leur poids en s'ouvrant chassait l'air sous les ais, la masse de feuilles s'épanouissait de part et d'autre dans un soupir. Je lisais les définitions, les coudes écartés à chaque extrémité de la reliure, menton collé entre les deux rives de papier, index sur la ligne. Les mots s'étageaient en colonnes ; ils étaient si nombreux et petits que leur accumulation faisait un gris subtil, grenu sous la pulpe des doigts, leur compacité était rompue par de somptueux dessins que des artistes anonymes avaient eu la bonté de produire pour moi. Ce n'était pas un souci de connaissance, mais une avidité de beauté qui me conduisait sans cesse à me plonger dans ces ouvrages. À l'époque -j'avais peut-être dix ans- je collectionnais les fossiles, les minéraux, les cristaux, les curiosités. Il y en eut bientôt un tel nombre que mes parents débarrassèrent une pièce qui servait d'atelier pour que j'y organise une sorte de musée. J'y arrangeai soigneusement mes trouvailles sur les rayons montés par mon père, légendai chaque objet d'une étiquette approximative et quand tout cela fut fini, j'entrepris une « Encyclopédie de la préhistoire ». Le projet ne me semblait pas si monstrueux. Il me prendrait du temps, bien sûr, mais je n'y voyais qu'une longue perspective de jours consacrée à l'écriture et au dessin, mes activités préférées.
        On me trouva un superbe cahier relié, dont les grandes pages n'étaient pourvues que de quelques horizontales fines. La couverture était cartonnée et solide, ornée du motif de taches qu'on voyait sur certains cartons à dessins. La virginité de ces pages ne m'intimida pas pour autant, et j'entrepris mon ouvrage. Un stylo bille noir en main, je traçai avec application mon titre immodeste sur la page de garde sans oublier de m'en octroyer par avance le mérite en écrivant mon nom en dessous, puis tournai la page. Les choses sérieuses commençaient. Je dessinai un « A » au moins aussi alambiqué que les lettrines de l'encyclopédie Larousse puis j'improvisai une définition de l'Archéologie. Elle fut succincte : m'intéressait surtout le mot suivant. Archéoptéryx. Le premier oiseau, le premier dinosaure à plumes, selon les connaissances de l'époque. J'écrivis un article assez complet, mais ni vérifié ni documenté, puis traçai un cadre et dessinai la bête. Se succédèrent ainsi une dizaine de définitions. Les lignes serrées et sans ratures faisaient un gris agréable à l’œil, et les dessins rythmaient les quelques pages fournies. L'effet était assez proche de celui de mon modèle.  Cette vaste entreprise s'arrêta après deux ou trois jours. Ce qui distingue l'enfance de la maturité, ce n'est pas l'ampleur du projet, mais l'estimation du temps, l'appréciation de l'effort nécessaire pour y parvenir. Ce qui n'implique pas que l'on en vient à bout, mais y contribue. Ainsi, je commence à travailler sur un projet qui me prendra vingt ans. Et alors ?

  • Aucune fatalité

    Les foules décimées pour la joie d'un Livre majuscule
    C'était pas obligé

    L'argent devant tout le reste, le goût du profit
    Non,
    Faut pas croire
    C'était pas obligé

    Le dépeçage du monde au bénéfice de si peu
    C'était pas obligé

    On n'était obligé de rien

    Obligé

    de

    rien !


    Va savoir ce qui nous a pris.

  • La barbe

    Je ne me suis laissé pousser la barbe et ne la coupe très court, que pour entendre ce bruit soyeux et frêle quand, dubitatif, je passe ma paume sur les joues et me saisis le menton. La réflexion ne s'en trouve pas enrichie mais la concentration y gagne en esthétique. Et c'est toujours ça de pris dans ce monde barbare.

  • Parole et pensée

    « La grammaire est un art qui enseigne à parler et à écrire correctement. Cet art, composé de différentes parties, a pour objet la parole, qui sert à énoncer la pensée.
    La grammaire admet deux sortes de principes : les uns sont d'une vérité immuable et d'un usage universel ; ils tiennent à la nature de la pensée même ; ils en suivent l'analyse, ils n'en sont que le résultat. Les autres n'ont qu'une vérité hypothétique et dépendante de conventions libres et variables, et ne sont d'usage que chez les peuples qui les ont adoptés librement, sans perdre le droit de les changer ou de les abandonner, quand il plaira à l'usage de les modifier ou de les proscrire. »

    Grammaire des grammaires, par Girault Duvivier, 1822.

    D'une époque où un traité de grammaire était aussi de la littérature. (Merci Jean).

  • Echange de bons procédés

    Un texte de Fabrice Pousserot, de Calamités quotidiennes


    Au départ, l’idée paraissait rigolote : 7 Mars 2012- 7 Mars 2013, une année complète de « Calamités Quotidiennes », il fallait marquer le coup, un billet mémorable, un dessin avec un gâteau des bougies et des « tsoin tsoins », ça aurait pu le faire.
    Et puis, bon, quand même, tout cela aurait à mes yeux, détonné, égard à l’humour parfois potache, mais discret au regard des chiffres de fréquentation de ce blog nouveau né.
    Quelle idée donc, quel trait de génie permettrait de marquer dignement le 365ième jour d’existence de mon défouloir quotidien ?
    Un Génie ? Mais, bonsangmaiscébiensurje m’exclamait ! Un Génie ? Un Génie ! Je l’avais trouvé ! Ne me restais plus qu’à contacter par mail l’imenssissime Christian Chavassieux qui m’avait chaudement recommandé, plus d’un an avant, de compiler sur un blog les inepties que je semais à tout vent sur un célèbre réseau social : « Ouvre un blog ! » qu’il m’avait écrit, laconique et impératif, « Ouvre un blog ! », j’avais imaginé, fertile penseur que je suis la suite de ce court message :

    « Ouvre un blog ! »

    Ou je te pète la gueule
    Ou je te crève tes pneus
    Ou je te scie ta canne

    J’avais donc imaginé tous les scénarios possibles devant cette simple suggestion bienveillante de ce vieux Chavass’ ( je sais, Christian, je suis certainement le premier à t’affubler de ce sobriquet ridicule, mais c’était simplement une volonté facile de créer une intimité fictive, une espèce de vieille camaraderie qui me pousserait à t’interpeller ainsi en te gratifiant d’une solide bourrade alors que nous dégusterions un verre de « Préfontaines » accoudés à un zinc minable, mon vieux Chavass’ alors que je le sais bien, moi, que tu préfères le Chivas, mais cessons là cette parenthèse incongrue qui m’amène une fois de plus bien loin du sujet dont c’est y que je voulais causer, ça m’énerve quand je m’éloigne comme ça du thème  que je voulais traiter, vous ne pouvez pas savoir à quel point ça m’angoisse cette tendance lourde à la digression, ça me coûte une fortune chaque semaine, allongé sur un divan freudien à me demander s’il est bien judicieux de………)

    Le mail que j’envoie à Christian est également concis, précis : je lui propose de lui laisser, ce 7 Mars, la page blanche de mon blog !

    10 minutes après le mail

    Réponse de Christian, l’idée l’amuse, l’intrigue même, il me propose donc carrément d’échanger nos blogs ce jour là ! Mince alors, moi qui  comptait me la couler douce ce jour là, non seulement il va falloir que j’écrive mais , de plus, en essayant d’y glisser un peu de talent, écrire sur « Kronix », quand même, ça mérite de transpirer un peu……….
    L’idée me vient d’un Conte, d’une Fable, une aventure improbable qui mettrait en scène l’Auteur du « Psychopompe » et du « Baiser de la Nourrice ».
    Café, noir, fort, gnole de coing dans le café, les doigts transpirent sur le clavier comme lorsque ,enfant, je participais aux auditions de piano de l’école de musique, l’histoire commence, Chavassieux, tel un Jack Torrance hexagonal, décide, le temps des quelques mois nécessaires  pour écrire un roman , de devenir gardien d’un Musée, on ne se refait pas, fermé l’hiver, dans un coin perdu d’une lointaine cambrousse de montagne, loin des stations à la mode, on imagine la neige , le vent dans les sapins. Le Musée, on n’en doute pas est hanté des âmes des personnages qu’il présente, et, tout au long du temps, la terre est durcie par le froid, Christian ne peut, pour se détendre, chasser les taupes, Chavassieux est gagné par une psychose, une folie violente, qui le pousse au Crime.
    A la toute fin du film, de ce « Shining » franco rural, gros plan, sur une photo jaunie, au fond de la vitrine qui présente la maison du rebouteux, du sorcier, on reconnaît sans peine le visage halluciné de Christian Chavassieux, en paria du village tel le Zorg inquiétant de «  La Maison assassinée ».

    L’idée est bonne, amusante même, mais………………………………..
    ….. Mais la pensée, tout soudain que Christian Chavassieux  puisse, ne serait ce même que moralement persécuter sa Douce, me semble intolérable, si ce n’est inqualifiable !!!!!!!!

    Au panier donc le Kubrick de pacotille, parodie avortée, il me faut une autre idée ! Et je repense à l’insolent et inachevé : « Radical Hennelier ».
    Coup de main que j’imagine précieux à l’auteur en panne je décide de terminer l’histoire qui nous laissait sur notre faim, agacé, ou désespéré, cochez les mentions inutiles,  au matin du 4 Janvier sur ces derniers mots :
    « Dans le sourire de mes frères et sœurs, je perçois la vie nouvelle et libre qui nous attend. Dès que nous serons assez nombreux. »
    Que je conclus, désintéressé que je suis par un glorieux :
    « TSOIN TSOIN ! »


    Calamiteusement……………..

     

    Ehé. Et voilà, rendez-vous donc, vous l'aurez compris, ce même jour, sur le blog de Fabrice pour considérer l'autre facette de l'échange. On aurait pu se dire, pour rester du côté de Jack Torrance : "Viens jouer avec moi."

  • Du Ghetto

    Nous attendons de vos nouvelles est le récit croisé des parents de l'auteur à partir des lettres qu'ils lui ont laissées. Cette correspondance, dont Michèle Goldstein-Narvaez a toujours su l'existence, mais qu'elle n'avait jamais osé lire avant la disparition de sa mère, est le point à partir duquel l'écrivain greffe ses propres souvenirs, son rapport avec ses parents, les récits de sa jeunesse à Lyon, des points de sa vie, enfin tout ce qui la constitue et qui, réalise-t-elle alors, est imprégné de ce passé.
    Janka, sa mère, et Stasio, son père, juifs polonais de Lodz, se sont évadés du ghetto de Varsovie et ont survécu aux bombardements, au siège, aux combats pour la prise de la ville à la fin de la seconde guerre mondiale.
    C'est un livre terrible et intelligent, précis, généreux. Le récit de juifs qui échapperont à la Shoah, avec tout ce que ce statut de survivant peut avoir d'heureux et d'inconfortable.
    La lecture de Nous attendons de vos nouvelles a été un temps suspendu. C'est un livre à plusieurs niveaux de lecture dont il n’est pas facile de parler succinctement. Il faut dire d'abord la qualité de son écriture. Ce n'est pas une surprise quand on a lu les moindres travaux de Michèle, mais c’est le viatique de tout le reste, et c'est essentiel. Pas de sophistication inutile, de virtuosités qui auraient amoindri l'hommage en jouant le pathos ou l'emphase. C'est l'élégance, une écriture intelligente et sobre, un phrasé sûr, de la force, la forme nécessaire.
    Le croisement des récits, l'organisation des histoires dans l'Histoire, chevauchements complexes, sont rendus fluides grâce à un travail que l'on devine énorme, à partir des lettres traduites, des ouvrages référents (de la grande histoire à Sept dans un bunker de Charles Goldstein en passant par le Karski de Haenel, etc.), de la voix des parents, de la mémoire collective. Tout cela est parfaitement tissé au long du livre. Le déroulement des faits est clairement exposé, le chapitrage est fait dans une volonté d'informer. Seule ma méconnaissance des lieux et la difficulté du français avec les patronymes juifs ou est-européens m'ont obligé parfois à des retours en arrière, des vérifications. Mais que l'auteur soit louée pour l'effort didactique qu'elle a privilégié en rédigeant. A la fin, avec la lecture des lettres, le peu de doutes s'éclaircit tout à fait.
    Il est très difficile, alors que je sors juste de ma lecture, de donner une vue en hauteur et pertinente de ce texte émouvant. La première chose qui me vient, sans aucune analyse, c'est cette scène où l'auteur est sur le quai de la gare (c'est dans l'introduction, je crois, véritable livre dans le livre, déjà un formidable morceau de littérature), quand un train de marchandises stoppe ses wagons vétustes devant elle et que, pendant quelques terribles secondes, Michèle sent comme une aspiration, ses pas attirés vers eux, vers un destin inéluctable. C'est magnifique, c'est vertigineux, je crois qu'on n'a jamais traduit de façon aussi puissante la force de ce traumatisme particulier, et aussi ce que c’est que d'en hériter. On n'en finit jamais, et le monde et ses visions sollicitent constamment le survivant avec l'éternelle question du pourquoi. Un wagon qui s'arrête et c'est l'incompréhensible qui vous saute à la figure.
    Survivante, petite Thérèse (Oui, son autre prénom est Thérèse, malgré les réticences de la famille, mais cette trouvaille trouve son explication dans le beau passage du bombardement et du garçon à qui Janka sauve la vie), miraculée parce que ses parents ont eu la chance de vivre (la chance, insiste Lipietz dans sa superbe postface, car l'argent, la volonté et le courage n'ont pas suffi pour la grande majorité, hélas), il y a donc cela que l'auteur doit supporter. Comme il faut supporter que l'humanité un jour, se révèle sous l'angle de sa plus néfaste nature. Je rejoins encore Lipietz quand il souligne cette scène où les domestiques polonaises, tout à leur joie carnassière, volent rideaux et objets, dans l'appartement et sous les yeux de leurs employeurs, avec la bénédiction des soldats allemands (quand je vois l'effet qu'ont sur moi les minuscules trahisons, les petits désordres de l'amitié, je me dis qu'être témoin de toutes ces bassesses doit être absolument dévastateur, et d'une dévastation durable). Avoir confiance en l'humanité après ça... Heureusement, comme toujours, il y a les exceptions. L'étonnante Jula, polonaise catholique, qui cache des juifs  en plein Varsovie, se brosse innocemment les cheveux tandis que les nazis fouillent son appartement, en est un merveilleux exemple. Quel courage !
    Les témoignages des parents seront livrés au fil des ans à leur fille avide de détails, livrés par bribes ou par distraction, avec de l'humour souvent. On saisit comment tout cela a construit l'identité de l'auteur. Et comment les lettres disent l'angoisse pour ceux dont on doit se séparer, malgré ou à cause de l'amour qu'on leur voue, les tracas quotidiens, les espoirs même dans les moments les plus sombres, et la façon dont la vie triomphe, au bout du compte. L'importance du quotidien est peut-être un des apports les plus importants de ce livre. Il n'est pas absent des grands textes exemplaires sur la Shoah ou le Ghetto de Varsovie, de Primo Levi ou de Martin Grey, il n'est pas oublié par Lanzmann, mais il est toujours livré sur le mode édifiant, pour expliquer la dureté de la vie, donner un détail significatif (ce pourrait être ici la façon de se laver dans un verre d'eau, par exemple). L'idée de citer les lettres in extenso ou presque, au cours et surtout à la fin du livre, renvoie à celle de l'impensable. Je m'explique. Au jour le jour, un cataclysme inédit est impossible à analyser, parce que le quotidien l'emporte. Se nourrir, se vêtir, trouver un travail, s'informer sur tel ou tel, sur une mère ou un fiancé, voilà ce qui importe. Les grandes colères des nations et les idéologies ont le caractère des éruptions volcaniques. S'en inquiéter ne changera rien et, de toutes façons, on le saura quand ça arrivera. C'est cela que les lettres disent. C'est pour cela que la mémoire est importante. C'est pour cela que, disant le quotidien, les lettres familiales, quelques objets, ce minuscule trésor tassé dans une enveloppe repliée ou dans une boîte métallique, disent aussi combien la litanie des jours est un danger. Un danger mais aussi la substance de la vie. La marque de son obstination. Que l'auteur aie, toute jeunette, dressé ses poings pendant mai 68, soutenu la résistance chilienne, n'est pas anodin. C'est qu'elle avait compris le désastre de l'autisme face aux mouvements idéologiques. C'est un autre héritage.
    Je trouve remarquable et significatif que Michèle Goldstein-Narvaez ait attendu la disparition de sa mère, dernière survivante, pour se lancer dans ce travail. Je comprends cet atermoiement. Je crois qu'il s'agit davantage d'une maturation nécessaire que d'une hésitation à se confronter au passé, aux événements trop durs, à la mémoire de ses parents, d'êtres trop proches pour qu'on leur substitue une traduction scripturaire, aussi respectueuse soit-elle. Il s'agit de transmettre, et je me dis là aussi que le  métier de l'auteur (elle est professeur) n'est pas venu par hasard, mais qu'il est bien le fruit de cette idée, née quelque part sur un coin de table, à la cuisine, quand Janka et Stasio lui racontaient, encore une fois, la survie dans les égouts.
    Michèle Goldstein-Narvaez a produit là une belle œuvre de transmission, importante, que je vous invite à découvrir.


    Nous attendons de vos nouvelles : voix du Ghetto de Varsovie.

    Michèle Goldstein-Narvaez. Editions Max Milo. 18 euros.

  • Espérant la réciproque

    Une part méconnue mais non négligeable du statut d'écrivain est la lecture des textes des amis écrivains, manuscrits ou achevés. D'où l'importance de sélectionner ses amis parmi les bons écrivains. J'avoue que j'ai cette chance.

  • Repentir

    J'avais d'abord exhibé ici ma rage envers certaines choses dans un billet virulent. Et puis, il se trouve qu'à l'instant, alors que je viens de demander à ma douce de mettre de la musique sur l'ordinateur, elle avoue en être incapable. Mais, lui dis-je, tu m'as bien vu faire, plusieurs fois même ? "C'est que, me répond-elle, quand je suis à côté de toi et que tu es sur l'ordinateur, je n'ai aucune idée de ce que tu fais, ce n'est pas l'écran que je regarde, c'est ton visage, tes yeux, tes cheveux, c'est toi."

    Infatigablement, ma douce me réconcilie avec l'humanité. je ne vois pas qui pourrait refuser d'aimer une telle personne, et je ne vois pas comment je ferais pour l'aimer moins.

  • Après un sondage

    Les statistiques le prouvent : les français écrivent beaucoup et lisent de moins en moins. Mais bon, ils écrivent plus de merde qu'ils n'en lisent. Ceux qui lisent de la merde écrivent beaucoup plus que ceux qui ne lisent rien, tandis que ceux qui lisent moins de merde qu'ils n'en écrivent, écrivent moins. Sans oublier ceux qui écrivent de la merde sur la merde de ceux qui en écrivent.

  • Les oreilles rouges

    Enfant, du coup de règle sur les doigts, je n'ai retenu que le coup de règle, et aucune leçon.

  • Un point

    Vous avez remarqué : on ne donne pas vraiment l'impression de souhaiter une bonne année par écrit si on ne clôt pas l'expression Bonne année d'un point d'exclamation. Sans ce signe de ponctuation qui souligne son essence performative, la pseudo phrase semble dépourvue d'enthousiasme, sans réelle volonté que l'année soit véritablement bonne pour le destinataire. Cependant, en ajouter n'arrange rien : Bonne année !!!!!!!!!! n'est guère plus convaincant que Bonne année !!, on voit que le nombre ne fait rien à l'affaire.
    Insérer un point d'interrogation teinte l'affirmation d'un peu de lucidité : Bonne année !?! Mais l'effet à la lecture est assez cruel. Le récipiendaire ressent un doute, en effet, mais dirigé vers celui qui adresse le vœu. Il peut traduire cette intrusion comme un mal qui s'insinue, contamine le projet, comme une tentative nuisible de distiller l'inquiétude dans la bienveillance de l'annonce. La série de trois points n'est pas agréable non plus: Bonne année... laisse supposer une condition à venir, qui pourrait la rendre bonne, oui, mais sans laquelle le désastre est assuré. Un signe de ponctuation rarissime est le point d'ironie (une sorte de point d'interrogation inversé, on ne le trouve pas sur le clavier et je ne peux le produire ici), on le déconseillera.
    Bon, et bien, restons-en à la tradition.
    Bonne année !
    (tout ça pour en arriver là)

     

    Et c'était la 1600ème note.

  • Dans le bureau ovale

    Et puis quelqu'un eut une idée : il suffisait d'envoyer les enfants au combat en Afghanistan puisque, statistiquement, ils auraient moins de chance de se faire tuer là-bas que dans une classe. Le président se frotta le menton, ça méritait réflexion. L'autre, enthousiaste, ajouta : En plus, on pourrait faire l'échange, mettre les soldats à l'école. Ce serait un progrès, socialement.

  • Fatras

    Ce n'est pas qu'on ne croit plus à l'amour, mais c’est qu'on y a collé tellement de choses et surtout tellement n'importe quoi, qu'on finit par ne plus savoir de quoi l'on parle. C'est comme une bibliothèque monstrueuse où se côtoient le pire et le meilleur sous prétexte qu'il s'agit de livres. Va trouver de la littérature dans  ce fatras, toi.

  • L'idée avant les mots

    Écrire quelque chose d'utile ; écrire quelque chose d'utile ; écrire quelque chose d'utile ; écrire quelque chose d'utile ; écrire quelque chose d'utile ; écrire quelque chose d'utile ; écrire quelque chose d'utile ; écrire quelque chose d'utile ; écrire quelque chose d'utile ; écrire quelque chose d'utile ; écrire quelque chose d'utile ; écrire quelque chose d'utile ; écrire quelque chose d'utile ; écrire quelque chose d'utile ; écrire quelque chose d'utile ; écrire quelque chose d'utile ; écrire quelque chose d'utile ; écrire quelque chose d'utile ; écrire quelque chose d'utile ; écrire quelque chose d'utile ; écrire quelque chose d'utile ; écrire quelque chose d'utile ; écrire quelque chose d'utile ; écrire quelque chose d'utile ; écrire quelque chose d'utile ; écrire quelque chose d'utile...

  • Ego-centré

    Je remarque qu'on n’est plus guère antimilitariste de nos jours, c'est un engagement un peu démodé. Et puis, je réalise que l'armée est maintenant de métier, et que le spectre de se trouver enrôlé dans un conflit et d'y mourir, ne menace plus que les pauvres qui n'ont aucune autre perspective professionnelle. Du coup, il devient moins urgent d'être contre la guerre. On se tourne vers la protection des loups. Sauf les bergers et les moutons, bien entendu.