Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Livres - Page 27

  • Haonthologie de la poésie

    Nous devons ce beau mot-valise reprenant le nom du village amoureux de la poésie : Saint-Haon-le-Châtel, à Jean Mathieu. Jean est un féru de littérature. On peut retrouver un savoureux portrait de lui dans le dernier livre de Jean-Yves Loude "Voyage en Côte roannaise avec mes ânes". Surtout, Jean est l'organisateur avec la Bibliothèque dudit village et l'association Demain dès l'Aube, de rencontres autour de la poésie exceptionnelles cette année (pas cette ânée, ne soyez pas bêtes).

    Au programme :

    Samedi 19 mai 2012 à 17h dans "Les Ruines" (ce sera fléché) : LECTURE d’Antonin ARTAUD par Thierry Mortamais

    A partir de 19 h Salle Bel Air, au cours d’un Repas –Buffet  (15€  -inscription au   06 45 88 79 73) : CONFERENCE MUSIQUE ET CHANSON sur ARAGON (je sens que ça va plaire à Cachard, ça) "Au bout des brouillages" par Suzanne Vengeon et Edouard Piolet

    Et à 21h 30 : SLAM par José Simon NARVAEZ (accompagné par la guitare Jean-Philippe Géressy).  José-Simon Narvaez dédicacera son livre "Excursion nocturne" lors de la soirée.


    Dimanche 20 mai de 14h30 à 17h, Jardin Cazamian ( ce sera fléché on vous dit). Table ronde animée par Michèle Naravez, entre quatre poètes et non des moindres :
     
    René Pons,  Pierre Présumey, Lionel Bourg et Jean-Luc Lavrille.

    C'est un week-end chargé, je sais bien, mais prendre le temps d'écouter ce qu'ont à dire des poètes, aujourd'hui, c'est de l'ordre de l'urgence.

  • J'habitais Roanne - Nouvel extrait (pour patienter)

    Tapon-Fougas ! le poète invraisemblable naquit déjà vieux probablement à Thiers en 1810 mais vint vivre les dernières de ses 83 années à Roanne, où il a enfin trouvé un imprimeur « honorable et sérieux qui a mis ses presses à [sa] disposition, pour tous [ses] ouvrages ». Le « Lamartine de l'Auvergne » comme il se nommait lui-même, est entré dans la postérité grâce au dictionnaire des fous littéraires d'André Blavier (...). Tapon-Fougas fut comptable, pion, secrétaire de diverses administrations mais, toujours écrivant, accumulera des milliers de vers mis en pièces (ou de pièces mises en vers si l'on veut), de grands drames, de projets fous, de diatribes et de pamphlets. Sa prolixité enviable ne lui permettra pas de dépasser la subtilité scripturaire de « Je préfère acheter du radis noir aux halles ; que l'étrange français des Belles Cannibales » ou ne le retiendra pas de faire rimer « anthropophage » avec « œsophage » (...). Une plongée dans les archives Coste à la bibliothèque du Musée Déchelette réjouit le cœur en même temps que l'on se sent traversé de tristesse à la lecture de ces délires maladifs. Tapon-Fougas (...) se plaint constamment de son absence de succès. Ses livres peinent à trouver plus d'un acheteur, ses revues plus d'un abonné. Une telle injustice faite à tant de talent ne peut s'expliquer que par un complot international ! Découvrant tardivement Rousseau, il est aussitôt pris en chasse par les voltairiens, les d'holbachiens et leurs épigones, tels que Victor Hugo, à qui il voue une haine tenace (...). Persuadé que Hugo l'a caricaturé dans Les misérables sous les traits de Thénardier, il prend la plume pour se venger et pond Les anti-misérables. Et toc. Poursuivi par la vindicte des franc-maçons et les intrigues de « l'école jésuito-dynastico-gréco-littéraire » qui voulait le « pousser à se suicider », il fuit en Suisse où il organise des lectures désespérément solitaires. Devant cet échec renouvelé, il accuse la presse d'avoir rejoint le complot qui tente de bâillonner sa voix, pourtant nécessaire au redressement national. Le journal reproduit in extenso la protestation du poète et s'excuse ensuite de façon un rien sarcastique et très savoureuse. Les titres de ses satires ou grands poèmes lyriques sont aussi stupéfiants que leur contenu : La lumière électrique par un vrai Diogène Au feu la fausse Némésis ; la Pétronéide, Pour relever et régénérer la France ; la Washingtonéide... La préface de ce dernier texte, grand poème lyrique écrit en hommage au premier président des États-Unis et à son pays, est adressée par ses soins (évidemment : par qui d'autre ?) aux organisateurs de l'exposition universelle de Lyon en 1872, « pour servir de prospectus au livre d'or de l'exposition lyonnaise ». Il explique sans fausse-modestie : « Ce doit être le véritable prix d'honneur de votre grande et si belle exposition universelle, à laquelle il manquait une grande œuvre littéraire et morale à produire à la grande lumière... Je vous l'apporte ! ».

  • J'habitais Roanne - Extrait

    "Nous nous éloignons donc du centre en même temps que s'efface le jeune adulte que j'étais. La trentaine, âge où se révèle que nous ne serons plus immortels désormais, est dépassée, on n'y revient pas sans régression stérile. Je grossis les statistiques impitoyables du mâle français moyen (je grossis tout court, d'ailleurs) et me voici quadragénaire, entamant un divorce, jetant dans l'incertitude mes chers enfants, éradiquant d'un coup des années de vie commune. Isolé, remué par la honte de faire tout ce mal, je tente de trouver un centre, un projet de vie. Je reviendrai à la fin de ce livre sur les éléments mêlés qui y ont contribué mais disons simplement qu'à ce moment-là de ma vie, je prends la décision de me consacrer à l'écriture. J'arrête toutes mes activités associatives (festival de SF, articles de presse, cours de dessins, émissions de radio, bénévolats divers), je cesse de pratiquer d'autres formes de création (illustration, vidéo, peinture) que je considère soudain comme des évasions chronophages. J'ai besoin de temps, du moindre quart-d'heure interstitiel récupéré le soir, le matin, à midi. J'écris encore à la main, sur des feuilles volantes, dans la cuisine, avant que les enfants se lèvent, quand la famille est couchée. Tout le temps."

  • "j'habitais Roanne" - Nouvel extrait

    « Pourquoi fais-tu du théâtre ? »
        « Parce que j'ai peur de la mort » me répond François, sur le ton de l'évidence. Nous prenons une pause méritée avant la seconde représentation de Peindre au théâtre de Roanne. François est assis un rang derrière moi, dans la salle vide. Depuis la scène plongée dans l'ombre nous devons ressembler à des balises flottant sur la crête des vagues de fauteuils. Le théâtre est silencieux, la coupole déploie au dessus de nous un ciel d'allégories naïves et dans le registre immédiatement inférieur, des cartouches ornent les noms d'auteurs dramatiques et de musiciens qu'on considérait comme des modèles en 1885, lors de l'inauguration de ce petit bijou architectural. Certains noms sont restés dans les mémoires (Hugo, Dumas, Molière, Corneille, Massenet, Chopin, Rossini...), d'autres (Auber, Sardou, Boïeldieu...) sont presque oubliés du grand public. Je repense à l'ironie d'un passage de Cyrano de Bergerac, quand un bourgeois énonce une liste des premiers académiciens « Boudu, Boissat, et Cureau de la Chambre ; Porchères, Colomby, Bourzeys, Bourdon, Arbaudé » et conclut avec admiration : « Tous ces noms dont pas un ne mourra... ». Des auteurs inconnus aujourd'hui. Souvenez-vous de la phrase qu'un esclave répétait à l'homme qu'on portait en triomphe, dans la Rome impériale : « N'oublie pas que tu vas mourir », souvenez-vous du nostalgique « Et in Arcadia ego » des bergers de Poussin, et encore de l'avertissement des Vanités du XVIIème siècle, ou du « tout est vanité et poursuite de vent » de l'Ecclésiaste. Passant ! les sagesses de toutes les époques ne cessent de te mettre en garde : toute réussite supposée ne change rien à ta postérité, tu disparaîtras et on t'oubliera. Pour un écrivain, l'avertissement se cristallise dans les grandes bibliothèques et leurs monstrueux alignements de reliures. Tout cela est dérisoire. Il faut s'en convaincre. Tout cela n'est rien et pourtant. Pourtant nous nous dévouons à la vanité de cette tâche. Pourquoi ? Pourquoi est-ce que j'écris ? « Pourquoi fais-tu du théâtre ? » « Parce que j'ai peur de la mort ».

  • J'habitais Roanne - extrait

    Dans le chapitre qui concerne le faubourg Clermont.

    "Le mouvement, voilà ce que je retiens de ma vie ici. Le mouvement, la conscience physique du mouvement, car le faubourg s'est construit sur l'axe d'une pente forte qui culmine vers Saint-Clair. Je suis un sédentaire, j'aime l'alanguissement et l'attente, la méditation et la sensation du temps qui s'égrène ; mais un pas dehors dans ce quartier, et tout semblait se mobiliser pour m'extraire de ma fixité, m'amener bénévolement à la noria de la vie. Descendre, monter, le tout à pieds bien souvent, comme les trajets de nos enfants pour l'école. Eux ne connaîtraient pas le déroulement immobile de mon enfance à Mulsant avec ses trottoirs aplatis sous les yeux, mais la dégringolade ou l'escalade, la vitesse de l'aller et l'essoufflement du retour. Tous les deux se tenant la main, ils allaient vite, saluaient les commerçants, sortis sur le seuil pour le recevoir, d'un « bonjour » rituel, lancé comme un coup de clairon. Le dimanche, s'ajoutait à cela l'agitation tourbillonnante du marché le matin, sur l'ancienne « Place du Peuple », devenue place Gabriel Péri en 1945."

  • Bientôt à Roanne

    "Il me semble que Roanne se résumait initialement à notre chambre, à la vue depuis la fenêtre, et au trajet vers l'école dans quelques rues. Quelques rues, empruntées à pieds toujours et regardées avec la myopie de l'enfance : les trottoirs de ciment ou de terre battue, les rues goudronnées, les pavages fragmentaires, les façades limitées au rez-de-chaussée, des carrefours examinés gauche et droite pour la seule intelligence du danger automobile, soit un champ de vision réduit à peut-être une douzaine de mètres autour de nous et à trois mètres au dessus des visières de nos casquettes de cuir." 

    Extrait de "J'habitais Roanne", 300 pages, 19 euros. Thoba's éditions.

  • Bon, parlons d'autre chose

    Couverture_Jhabitais-Roanne_Basdef.jpg « J'habitais Roanne », mon prochain livre, sort la semaine prochaine. Vous ne le trouverez qu'à Roanne, c'est logique : il est écrit pour cette ville, pour ses habitants. La première critique parue dans La Muse n'est pas enthousiasmante, même si elle est plutôt positive. Que voulez-vous, on aimerait chaque fois emporter l'adhésion la plus complète. Et puis, on pense à l'éditeur, aux risques qu'il prend, au travail effectué par toute une équipe, aux treize mois passés sur l'écriture, aux sacrifices demandés à l'entourage pour obtenir ce résultat.  Je mets ICI le lien de l'article de Franck Guigue pour la Muse (lire pages 24-25). Même si, comme dit un copain « ça donne pas envie de le lire », je soutiens la liberté critique.

  • Médiathèque Moebius

    Il y a des débats de moindre importance, d'accord, mais pour les dessineux que je connais, ce n'est sans doute pas négligeable. Je copie/colle l'appel ci-dessous :   

    "Actuellement, un concours est lancé pour donner un nom à la future médiathèque du Grand Angoulême. Les noms retenus ne font pas référence à la bande dessinée (!). Le seul qui pourrait s'en rapprocher est « alpha bulle » (A vous de juger…).

        Depuis des années, bénévoles, professionnels, auteurs, presse et municipalités successives se sont battus afin qu’Angoulême soit La ville de la bande dessinée. Cela n'est pas remis en cause. Angoulême, c'est la BD.

        Mille sabords, au moment où il s’agit de baptiser ce futur monument culturel de la ville, cette réalité est balayée d’un revers de main.

        Une initiative a été lancée pour proposer le nom de Moebius. Ce serait en effet un bel hommage rendu à Moebius lui-même, à la bande dessinée, à la création, au talent. Par ailleurs, Angoulême serait la 1ère ville à donner le nom d'un auteur de bd à une médiathèque… Et quel nom !

        Pour que cette idée devienne réalité, nous avons besoin de vous, passionnés de bd mais aussi, relais d'opinion, medias d'information.

        Le concours "officiel" s'achève mi mai. Il nous faut donc faire vite pour mener une mobilisation qui dépasse les clivages politiques et qui continuera de donner tout son sens à notre action : la passion, la reconnaissance de la bande dessinée avant tout. Et pour Jean lui-même, l’inscription de l’universalité de son œuvre notamment dans cette ville qui lui a décerné le Grand Prix en 1981.

        Pour cela, il suffit juste d'adresser un mail de soutien à cette initiative à l'adresse suivante: moebiusmediatheque@gmail.com. Vous même, à titre personnel pouvez bien sûr souscrire à cette démarche.

        Nous vous remercions d’avance de l'aide que vous pourrez nous apporter en relayant cette proposition.

        Bien cordialement

        Francis Groux

        Co fondateur du festival de la bande dessinée d'Angoulême

        Delphine Groux"
     

  • Billet d'humeur ce matin

    J'en connais. J'en connais au moins quatre. Des électeurs du FN. Ils ne sont pas spécialement de grands blessés de la vie, revanchards du système qui les brise. Ils ont un travail, sont fonctionnaires ou agriculteurs, difficile de faire une moyenne sur des profils aussi différents, mais disons que leur situation est loin d'être désespérée. Les pauvres, les vrais, ceux qui sont à la rue, ne votent pas. Donc, qu'est-ce qui rassemble ces quatre là, qu'ont-ils de commun ? Déjà, ils regardent des conneries à la télé, lisent très peu, ont toujours le sentiment de payer trop d'impôts, et qu'ils sont les seuls à bosser pour que les feignants puissent vivre sans rien foutre (pourtant, dans trois des cas, ils ont connu le chômage). Ils ne sont pas dans la précarité, mais les fins de mois sont difficiles parfois, ils travaillent dur pour payer des futilités à leurs gamins et à eux-mêmes, mais ils sont serviables, aident les copains, sont de « braves gens ». Ils ont peur pour l'avenir, ils ont peur des immigrés, de la fin du monde et du terrorisme. Ils ont peur de tout. Ce ne sont pas des pauvres qui se révoltent de trop de souffrances, non, mais des petits frustrés un peu limités, qui aimeraient que tout le monde partage leurs peurs. Enfin, je parle de ces quatre là. Pas faire une généralité. La preuve : Renaud Camus a appelé à voter FN. Voici un écrivain cultivé, fin, sensible, homosexuel. Au nom de la « non nuisance », c'est un comble, il soutient Le Pen. Pourquoi ? Encore la fascination de la peur. La peur de voir disparaître notre culture. La peur des musulmans, quoi, soyons clairs. La différence entre lui et moi ? Moi, je connais des musulmans (au moins autant que d'électeurs FN). Je les entends parler de Molière, de Rousseau, de Hugo. Renaud Camus n'a rien compris. Finkielkraut n'a rien compris. Ils ne font pas confiance à la culture qu'ils veulent défendre. Ils ne savent pas que Voltaire est plus fort qu'ils ne croient, Racine et Rimbaud plus universels qu'ils se plaisent à le penser. Que tous les classiques du XVIIè, les Lumières du XVIIIè, les romantiques du XIXè, les postmodernes du XXè, que toute cette hérédité n'aboutisse pas à la tolérance et à la bienveillance, voilà ce qui me ferait douter de la littérature. Les électeurs du FN ? Des froussards.

  • Naufragé volontaire

    Alain Bombard, célèbre navigateur solitaire pour une cause scientifique (pas pour le sport je veux dire : un altruiste, quoi), ayant programmé des mois d'isolement sur l'océan, avait emporté dans son petit canot un livre de Spinoza. Il n'était jamais parvenu à dépasser les premières lignes et il était persuadé que cette fois, sa solitude de naufragé serait telle qu'il ne pourrait éviter de lire, et de tout lire. Il dut avouer plus tard que, malgré tout, il n'était jamais arrivé à aller plus loin que ses premières tentatives. Spinoza resta à jamais un mystère pour lui. Si je devais embarquer tous les bouquins qui me tombent des mains, ce n'est pas un zodiac qu'il me faudrait, c'est un ferry. Mais va trouver un ferry où tu peux être tout seul, toi.

  • interruptus

    Après un an et demi de suspension pour l’écriture de « J’habitais Roanne », reprise le nez dans le guidon sur le manuscrit de mon prochain livre (je veux le finir pour juillet). Un roman dont l’action se déroule entre 1854 et 1918. Pour tout dire, je n’étais pas si sûr de vouloir replonger dans une histoire qui réclame autant de travail et de documentation (d’autant plus que l’essai sur Roanne m’avait demandé de prolonger sans l’arrêter un effort documentaire de même nature. Une cinquantaine de livres historiques à consulter en plus de la centaine pour ce livre… Je saturais). Et puis, à la relecture, je me suis dit que ce serait tout de même dommage de laisser tomber tout ce travail. Surtout, le délai de cette « vacance » m’a permis d’y revenir avec un œil neuf, des idées changées. Les personnages ont bougé, demandent d’autres choses, ont fait de nouveaux choix. Le roman a pris une direction imprévue.
    J’ai taillé, coupé, déplacé, remonté, retaillé tout le matériel déjà écrit, recousu l’ensemble d’une manière différente, repris de nombreux passages pour ajuster tout cela en fonction des nouvelles orientations. A l’origine, je voulais écrire deux volumes. Aujourd’hui, les deux livres seront deux parties d’un seul bouquin. Ce qui devait constituer le premier livre ayant été réduit dans l’opération de réécriture, ne justifie plus un opus indépendant. Il est davantage relié à ce qui suit, forme un équilibre dans cette configuration. Qu’auraient été ces deux livres s’il n’y avait pas eu l’interruption (salutaire, j’en suis persuadé maintenant) de « J’habitais Roanne » ? Je ne peux que le fantasmer. J’en retire une leçon, difficilement applicable cependant, par laquelle on devrait peut-être systématiquement abandonner un roman en cours, passer à autre chose (en commencer un autre par exemple, et ainsi de suite) puis reprendre l’objet interrompu de façon à en saisir une nouvelle approche.
    Non, laissez, c’est idiot.

  • Pré#Carré

    Vendredi 23 mars
    A la Médiathèque de Neulise
    Hervé Bougel a dit :
    « Ce qu'on a à dire d'essentiel aux autres me paraît tenir en quelques mots :
    Je t'aime, tu m'emmerdes, etc.
    Après, c'est autre chose »
    (il n'a pas dit « c'est de la littérature » mais il a ajouté :
    « ...c'est Victor Hugo et c'est un autre monde. »)
    Pour illustrer le principe,
    Christian Degoutte a lu
    un texte édité par Bougel au Pré#Carré
    « Il neige », de Joseph Beaude.
    « Vient un jour où les images
    n'infectent plus la langue
    on peut dire il neige quand il neige »
    Typique de cette poésie précise et légère à la fois,
    défendue selon Degoutte par Hervé Bougel
    (« la poésie considérée comme parole première se tient bien à l'aise dans ces petits formats »)
    qui suit en cela les pas tracés par Roland Tixier, du pré de l'Age.
    Hervé Bougel (RVB par goût du signe et du langage)
    publie cette année son 72ème recueil carré, plié et cousu main,
    avec ses belles couvertures
    précieuses et pensées.
    Si l'on ajoute d'autres publications aux formats différents
    (autres collections : « pas à pas », co-éditions ; des textes de Pierre Présumey, de Christian Degoutte, de Fabrice Vigne...)
    on réalise que RVB a mieux que poursuivi le travail de Tixier, il l'a prolongé, conforté, peut-être dépassé d'une certaine manière.
    Pour se faire une idée, mieux vaut aller batifoler du côté de son blog,
    de mauvaise foi et très intéressant
    Plein de gens voudraient aider Bougel, à plier, coudre, f
    aire ce « travail d'abruti » qu'il affectionne,
    mais il est de son propre aveu « très difficile à aider »
    Non, le mieux, pour lui donner un coup de main, c'est de s'abonner.
    Recevoir quatre fois par an ces petits bijoux.
    « On peut avoir des dizaines de livres chez soi,
    mais ça, ce n'est pas n'importe quels livres,
    après des années, on peut y revenir,
    leur qualité est toujours là. »
    explique Christian.
    Et c'est vrai.

  • Christian Degoutte à l'écritoire d'Estieugues

    Au centre de Cours-la-Ville (Rhône), où je m'arrête pour demander mon chemin, un panneau avertit que « la ville est sous vidéo-surveillance ». La taille de la commune le permet je suppose. Quant au Syndicat d'initiative où j'espère un renseignement, il est sécurisé par un sas à ouverture électrique commandée depuis le bureau, à l'intérieur, comme une banque. Je me dis qu'on a vraiment le sens de l'accueil dans ce patelin. Du coup, l'existence de « L'écritoire d'Estieugue », association dédiée à la poésie, prend un sens particulier. On défendrait ici une poésie de résistance à la bêtise et à la frilosité, une poésie de l'ouverture et de la générosité, que ça ne me surprendrait pas. En tout cas, les amis de l'écritoire (Gilles Cherbut et Anne Vaucanson en tête) honorent le printemps de la poésie par plusieurs rencontres et lectures. Ce samedi 17 mars au matin, c'est Christian Degoutte qui était l'invité du « conversatoire de poésie ».

    La voix de ce poète est rare malgré le nombre et la qualité de ses publications. Nous étions une trentaine à avoir tenté de ne pas louper ce rendez-vous. Christian est comme ces animaux rares, furtifs, rayonnants, qui s'effraient de la lumière et sous l'haleine des ténèbres... Merde, voilà que je me mets à écrire comme Bobin. Non : Christian Degoutte est d'abord un insatiable lecteur de poésie, un guide bienveillant, s'amusant à décontenancer : « c'est bien, la mièvrerie, moi j'aime bien les trucs mièvres. Pourquoi ce serait mal, la mièvrerie, le pathos ? » et qui, deux minutes après, vous cisaillent le cœur et les tripes en lisant des extraits de « Il y a des abeilles », texte sensuel et désarmé, apaisé mais traversé par une colère, loin très loin de toute mièvrerie. Son intervention alternera pendant deux heures, lecture de ses textes et des textes des autres. Les parentés, les influences, les complicités et les allusions sont constamment rappelées. Christian nous propose d'emblée de distinguer une poésie « d'estrade », Jaccottet, Ponge..., éditée dans de grandes maisons et reconnue (une poésie qu'il aime lire mais pas celle vers laquelle il va naturellement, en tant qu'auteur) et une poésie que pour faire vite il qualifiera d'underground. Disons, confidentielle. Enfin, encore plus confidentielle que la poésie d'estrade, c'est dire. Sans un guide comme lui, qui en une matinée nous défriche quarante ans de littérature faite « au cordeau », un piètre lecteur comme moi (pas assez curieux, voilà le drame) n'aurait jamais eu vent de l'existence de poétesses actuelles comme Ariane Dreyfus, Sophie Lucas ou Amandine Marembert.

    Un poète n'écrit rien qui ne soit rattaché à la littérature qui est sa famille. Ses premiers textes, « Sybilles ocres », « l'homme de septembre », repris à l'envi dans des anthologies, reflètent la manière de René Char, dont la densité des textes lui est toujours une énigme. On sait que le travail d'un artiste est de se déprendre de l'empreinte de ses maîtres. Lire beaucoup, beaucoup d'auteurs exigeants, c'est-à-dire multiplier les influences en fait, aide assurément à trouver sa voix. La lecture et le silence qu'impose cette avide fréquentation des autres textes. La plume de Christian se tait pendant vingt ans, après ses publications des années 70. « C'est comme ça, dit-il pudiquement, je n'écrivais rien, enfin rien d'utile. » Rien d'utile... Que les écrivaillons ruminent cette notion (je la prends pour moi aussi, d'ailleurs : ma prolixité (surtout mon peu de réticence à partager la moindre ligne), me fatigue moi-même. 'f'rais mieux de savoir si j'écris quelque chose « d'utile » parfois. Mais passons.)

    Retour à l'écriture dans les années 90 (je n'ai pas saisi, car Christian digressait, s'égarait, revenait, si « 34 cordeaux » écrit en hommage à Apollinaire, se situe dans cette phase de regain mais qu'importe), les années 90 donc, avec de « faux » poèmes. De faux poèmes, comment ça ? C'est que pour leur auteur, ces textes n'avaient pas grand chose à voir avec la poésie. Il se pense « incapable d'écrire un poème », alors il fait « fictionner » la poésie. Par exemple avec cette merveilleuse idée du recueil « paroles cuites ». les paroles cuites, ce sont des textes fragmentaires, exhumés de la terre des jardins et des talus, des signes vitrifiés sur des bouts de faïence que les naïfs croient être d'anodins morceaux de vaisselle cassée mais que le poète reconnaît comme les vestiges d'une civilisation nomade disparue. Il a suffi de traduire leur langue, « l'archaïque », pour produire un recueil, illustré de dessins scientifiques. Christian fait encore des fictions de poésie à partir des catalogues de la Redoute, où il a remarqué que les lingeries étaient assorties de textes aux teintes « poétiques », pour convaincre les clientes d'acheter tels bas, telle nuisette, telle culotte. Dans ce cas, « faire fictionner la poésie », c'est pousser les curseurs un peu plus loin, mener la tentative au terme. Appuyer sur les curseurs est question de dosage. Christian rappelle la frontière imperceptible qui sépare un bon poème d'un poème ridicule. Enfin, « comme on ne peut pas toujours faire semblant... » Christian accepte d'écrire vraiment des poèmes. Il ne s'agit plus de fictionner, il s'agit de se confronter à la genèse de cette forme. C'est très risqué : « La seule volonté d'écrire un poème suffit à tuer le poème », principe d'incertitude appliqué à l'écriture. Une source pourtant est utilisable : cueillir dans sa prose quotidienne les éclats qui sont l'amorce de textes. En revenant sur ces phrases, livrées sans ordre aux carnets, dans le flot des notes « on est éclairé à rebours par ses propres formules ».


    Et la poésie, qu'est-ce que c'est ? Personne n'a posé la question, mais on sait bien qu'elle va surgir. Apprendre de lui comment il a pensé la chose. Il devance l'interrogation, sûrement parce que, à force de réflexion, Christian est en mesure de définir la poésie comme « ce qui nous conduit au langage à l'intérieur de nous » et l'écriture ? « une érotisation du langage ». Je me souviens que Pierre Michon voulait écrire avec le Français comme s'il s'agissait d'une langue morte. J'ai eu le sentiment que les deux approches n'étaient pas si éloignées. Écrire, enchanter le langage. Érotiser, oui, comme sont sûrement érotiques les courbes surhumaines du sculpteur Henri Moore qui lui inspira le superbe « Henri Moore à Nantes », que mon ami Jean a saisi le premier. Il n'y avait qu'un exemplaire. Mais je sais bien qu'il va me le prêter...

    Lire les textes de Christian Degoutte : Le Pré#carré éditeur (Il y a des abeilles notamment, deux éditions différentes dont la plus récente est bilingue, français et allemand).
    Son premier roman Trois jours en été, chez l'Escarbille.
    On le trouve aussi dans des anthologies : le recueil III de « Poésie d'aujourd'hui en Rhône-Alpes » et dans « La poésie de A à Z » de Jacques Morin.
    Christian tient aussi une rubrique dans la revue Verso, où il chronique les revues de poésie.

  • C'est l'printemps, les poètes planent

    Ils écrivent et lisent aussi.

    Relayons donc l'avis de l'excellent Christian Degoutte qui sera l'invité de l'écritoire d'Estieugues, au Château de la Fargette (à Cours-la-Ville, ne faites pas semblant de ne pas savoir où c'est), printemps des poet-poet qui se déroulera comme suit :

    -Vendredi 16 mars à 20h30 : lecture du Prophète, de Khalil Gibran, par Charles Simond.

    -Samedi 17 mars à 10 h 45 : conversatoire de poésie contemporaine, animé par Christian Degoutte.*

    -Samedi 17 mars à 16 h : poèmes de Gaston Couté, interprétés par Hervé Mercier.

    En soirée, Michel Grange viendra avec sa guitare (enfijn je suppose) entonner ses propres chansons.

    Qu'on se le dise !

    * Ce rendez-vous était suivi dans l'annonce par la formule : "Suivi d’un apéritif gratuit" mais je ne l'ai pas mise parce que je sais que vous n'êtes pas comme ça. Moi par contre...

  • Touch d clavi r

    A force d'écrire et d'écrire, les lettres du clavier s'estompent. La première à disparaître étant la voyelle la plus usitée dans la langue française : le « e ». Je me demande si ce n'est pas à partir d'un constat aussi anodin que Georges Pérec a imaginé La disparition. Du coup, je cherche une seconde vérité dans mon clavier, dans ceux que j'ai usés avant lui. Je vois que la lettre « s » est en partie mutilée. Un livre sans pluriel -ou sans sexe ?

  • Roanne en approche

    C'est donc Daniel Arsand qui signe la préface de mon prochain livre « J'habitais Roanne ». Je dois dire que c'est un parrainage qui m'honore. Surtout que, avant d'écrire la préface, cet auteur (dont j'ai beaucoup aimé au moins trois ouvrages : « La province des ténèbres », « Ivresses du fils » et « Un certain mois d'avril à Adana »), m'a adressé moult compliments en découvrant mon texte. « Vous êtes un écrivain, un vrai de vrai » étant la phrase qui dépasse les autres à mes yeux, vous vous en doutez (toujours cette hantise de l'imposture, vous savez...).
    La couverture est signée de Jean-Marc Dublé, mon ami mon frère mon poteau. Et elle est superbe. De son côté, Jean-Luc Rocher peaufine une mise en page de grande qualité (belle typo, belles grandes marges blanches, format opulent, lecture confortable). Enfin, ce livre qui a vocation a n'être lu que par des Roannais (et encore), sera sans doute un bel accomplissement. Et moi, et bien, ça me suffit.

  • Essaye encore

    Oui, j'avais promis de vous tenir au courant : un de mes textes avait été sélectionné en première lecture chez un éditeur dont je peux maintenant révéler le nom : Gaïa. Un mail récent m'a annoncé que, finalement, il ne sera pas retenu. La directrice de collection a eu la gentillesse d'argumenter son refus et je dois dire que, plutôt que de me désespérer, les suggestions qu'elle fait me donnent envie de reprendre le propos et d'opérer les coupes nécessaires. Car il y a de bonnes choses et, après tout, je me dis qu'on peut réinventer, « réenchanter » dirait un autre, une version mal en point. J'attends d'autres réponses, d'autres romans. Toutes les révélations ne se feront pas ici, pour certaines raisons (il y a du pseudo dans l'air). Enfin, malgré cet échec relatif, ça va pas mal pour moi, merci.

  • Face à face

    Du jour au lendemain, une personne qui jusque là s'acharnait à écrire dans la solitude, est publiée, propulsée en tête de liste des ventes, traduite en plusieurs langues. Désormais on la regarde différemment. Elle est pourtant toujours la même.

    Je suis assis en face de Carole Martinez. Elle sourit. Je lui dis « Ce doit être étrange pour un être normal d'être vu comme une bête curieuse ? » Elle ne répond rien, déploie ses ailes et disparaît.

  • Ce soir, Totor encore

    D'après un article de Fabienne Croze:

    "Victor Hugo, si on y réfléchit : c'est tout près ! « Les Misérables » paraissait il y a juste 150 ans. En hommage à Victor Hugo, la médiathèque de Roanne propose deux rendez-vous : Le premier, avec l'association « Demain dès l’aube », organisatrice, chaque année, des lectures de St-Haon-le-Châtel, près de Chenay. Six de ses membres (Christian Chavassieux, Bernard Furnon, Dominique Furnon, Charlotte Furnon, Yolande Lauxerois, Jean Mathieu). tous passionnés de lecture publique, rendront hommage -à une ou plusieurs voix- à Victor Hugo avec des textes forts, puisés dans les œuvres majeures  : Les Contemplations, Quatre vingt treize, Choses vues, l’Année terrible… :  « Ils cherchent des lueurs dans la nuit ». Cette association est ouverte aux amoureux de la littérature, du plaisir de lire à haute voix, d’écouter en extérieur, plaisir individuel et collectif. Les littératures, comme trésors inépuisables de connaissance et d’amour, à sauver, à partager, à dépenser !

    Vendredi 3 février à 18h30 – Entrée libre


    Le mardi suivant, le 7 -à 19h (Entrée libre également), la médiathèque propose, en collaboration avec le Cercle Condorcet, une Conférence : « Victor Hugo et la question sociale » donnée par Agnès Spiquel, professeur de littérature française des XIXe et XXe siècles, à l'université de Valenciennes. Elle a écrit plusieurs livres sur Victor Hugo : La déesse cachée, Isis dans l’œuvre de Victor Hugo (H. Champion, 1997), Du passant au passeur : quand Victor Hugo devenait grand-père (Eurédit, 2002), Victor Hugo et le romanesque (Lettres Modernes Minard, 2005)."

    Fabienne Croze

  • Le vrai drame

    Roméo et Juliette, tu parles : des gamins ! Tu les imagines, trente ans plus tard, s'engueulant pour savoir dans quelle belle-famille passer Noël ! Les tragédies sont belles parce qu'elles interviennent avant le vrai désastre, qui est la banalité de la vie.