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kronix - Page 183

  • Malaise dans les musées

     

    Jean Clair, grand conservateur de musées, spécialiste de l'histoire de l'art éminent et commissaire de plusieurs expositions à succès, fait le point sur la logique muséale aujourd'hui. Au terme d'un livre subtil et impitoyable, sa conclusion sans appel est que l'histoire des musées, qui aura duré deux siècles : de la révolution à nos jours, s'achève aujourd'hui.

    f7014ec0039df5c36c596e9c1395bd3d.jpgLes premiers chapitres, malgré toute l'affection que je porte à cet auteur remarquable et à ses capacités d'analyse, m'ont quelque peu agacés. Jean Clair y fait le constat atterré de l'art dévoyé, détaché de ses origines cultuelles, depuis que les musées en font une série d'images culturelles, propices aux visites décérébrées du tourisme de masse. Le culturel, voilà la fatalité : le cultuel, le sacré est perdu, les oeuvres nées de cette confrontation avec le divin ont perdu leur sens, des madones de Raphaël aux masques bambaras exposées quai Branly, les objets de culte, devenus objets d'art, ne résonnent plus dans le coeur discipliné des foules en extase, que par écho d'un a priori culturel. Clair regrette que les oeuvres soient ainsi livrées aux masses, aux peuples hébétés qui piquent un cent mètres au Louvre pour aller voir La Joconde, parce qu'on leur a dit que c'était beau. Les élites seules savent, les élites seules devraient avoir accès, elles qui peuvent goûter, comprendre, aimer une oeuvre dans toutes ses dimensions, et pas seulement en tant qu'icône du temps.

    La démonstration est par contre enthousiasmante sur les dérives des musées aujourd'hui et sur, aboutissement absurde de cette dérive commerciale, le louvre d'Abou Dabi. Quelles oeuvres, quelle logique scientifique dans un pays que les nus offusquent, quelle image d'un musée de France, perdu au milieu d'un lunapark des sables, entre un golf, un hôtel de luxe et des attractions abrutissantes ? Comment en est-on venu à faire entrer la logique commerciale (louer des tableaux, louer la « marque » louvre comme un logo, et pour même pas cher : 1 milliard d'euros pour 30 ans) dans la politique culturelle de notre pays, au mépris même de la loi (où il est dit que le patrimoine ne peut pas faire l'objet d'une cession à caractère pécuniaire) ?

    Tout cela parce que la France devait absolument vendre des armes à la famille royale des E.A.U. (une première encore : on loue des oeuvres à des particuliers désormais), et la location d'un louvre (il perd aussi sa majuscule), faisait partie de la corbeille de mariage, pour faire bonne mesure. Les collections, patiemment constituées par des générations de conservateurs et de donateurs, aujourd'hui utilisées comme argument commercial.

    Dire que pendant la guerre, des hommes ont risqué leur vie pour que des tableaux ne tombent pas aux mains des nazis. Nos élites (sous la gouvernance Chirac), complotant entre économistes, sans demander leur avis aux experts et aux conservateurs, ont réussi à faire pire. Cela, Jean Clair ne le dit pas. Permettez-moi de dépasser sa pensée. Mais j'enrage.

  • Régimes spéciaux

    Réformer les régimes spéciaux ? D'accord. Mais on commence par qui ?

    Merci à Hector pour l'info :

    http://www.dailymotion.com/video/x329rf_elus-le-regime-special

  • Manu

    Il faisait beau. Une marche agréable en prenant le chemin de la maison. Devant moi, la silhouette d'un type que je connais un peu. Il promène un landau. Manu. Je le vois là en père de famille rangé, rasé de près, retournant sagement chez lui. Manu, que j'ai connu il y a vingt ans, jeune chevelu rougissant, mélange de furie anarchiste et de froideur méfiante. Surtout détonateur en explosions textuelles. Les murs de l'atelier où il travaillait affichaient les aphorismes sortis sans prévenir de son cerveau fécond.

    Pardon, mais 20 ans plus tard, je ne me souviens que de ces deux-là :

    "Fumer provoque le bélier" et "le tabac nuit de la pleine lune".

    Tous les autres, tous ceux que j'ai oubliés, mais qui me faisaient rire, étaient de cette même eau, poétique et drôle.

    Est-ce qu'il continue, Manu, tandis que son bébé vagit dans la poussette qu'il entraîne chaque soir de beau temps, à produire de ces assertions dérisoires et bidonnantes ?

    Sûrement, sûrement. On ne se défait pas comme ça de la bénédiction de créer.

  • Affligeant

    Lui, il ne sait pas... Il se trouve que plus de la moitié du public non plus.

    Foucaud reste calme. Foucaud est grand.

    Dire que Giordano Bruno a été brûlé pour avoir répondu juste à la question. Des fois...

  • Quelques mois d'octobre

    Ce matin, tandis que je descendais la rue pour me rendre au travail, mon regard avait enregistré le titre du fait divers, placardé devant les magasins : "un enfant de 14 ans se suicide". Le quotidien de la presse quotidienne me dis-je, une tristesse de plus sous le ciel de notre ville. Les matinales sordides avec lesquelles, vaille que vaille, nous composons. Je me rendais au travail, l'esprit déjà occupé par des futilités professionnelles.

    Plus tard dans le matin, JW est passé me voir, pâle. Il avait mal dormi ; il n'avait pas dormi. Il m'a raconté. Le gamin de 14 ans, il le connaissait. Il savait beaucoup de choses sur cet enfant, il savait son nom, son visage, sa voix, la façon dont il marchait et la couleur de son regard. Il savait le détail de sa dernière journée, jusqu'au moment mystérieux, invisible, abyssal, où le gamin s'est avancé tout seul, loin des autres, loin de ses copains et de sa famille, se foutre une balle dans la tête.

    A 14 ans. Une balle dans la tête.

    Après le passage de JW au bureau, repris par le silence des objets millénaires qui veillent sur moi, je me suis assis face à l'écran. J'ai même recommencé à travailler. Et puis, soudain, l'air s'est mué en une pâte de tristesse irrespirable. La douleur de JW m'a soudain traversé, j'ai senti un froid de lame planté dans l'échine. J'étais accablé. La journée s'est poursuivie pourtant. Les enfants du même collège que le gamin, ont visité une exposition, leur prof d'art plastique parlait, les oeuvres aux murs souriaient de leur immuable façade de couleurs, la ville dehors poussait son flot d'âmes vers le soir. Je suis parti plus tôt que d'habitude.

    Le petit n'aura vu que quatorze mois d'octobre, et même pas.

    Que m'a dit JW, ce matin, en me quittant ? Il m'a dit "la vie va reprendre ses droits". Voilà, c'est vrai. C'est irrépressible. La vie est là, elle nous arrache aux larmes et à l'attendrissement, elle nous pousse dehors, chaque fois.

    Demain, je descendrai la rue comme chaque matin, et sur les placards de la presse quotidienne, on l'aura déjà oublié, le petit. JW ne l'oubliera pas et moi qui ne l'ait pourtant pas connu, non plus. Par contre, nous pourrons y penser sans tristesse. Avec de la révolte oui, mais sans tristesse.

  • D'un geste singulier

    Hier -ou bien avant-hier, mais vous pardonnerez cette imprécision- tandis que ma compagne volait à mon secours en rapportant au bureau l'agenda oublié à la maison et sans lequel je suis perdu (plus de rendez-vous, plus de notes, plus de multiples détails qui ornent le découpage horizontal des heures, chaque jour), il s'est produit un de ces petits faits qui font notre délectation. Voici : ma chérie regagnait sa voiture garée devant mon travail, sa mission accomplie. Elle s'est penchée un instant pour récupérer je ne sais quel objet rebelle qui s'était dérobé sous un fauteuil, quand son oeil a capté le geste d'une silhouette sur le trottoir d'en face. Je dis bien le geste, pas la silhouette précise : une impression en somme. Et elle a instantanément su que c'était JM*. Relevée tout-à-fait dans la seconde qui a suivi, sa vue dégagée vraiment lui a permis d'en être sûre. JM sortait de chez la coiffeuse en face de mon bureau (un point commun supplémentaire entre nous) et il fit sur le seuil un mouvement qui l'identifia, aussi vite et absolument qu'aurait pu le faire un portrait détaillé. A mes questions enthousiastes (la synthèse d'une identité par la singularité d'un geste, imaginez : de quoi allécher mon goût pour les développements abstraits), ma chérie décrivit une attitude, un pas, peut-être une manière de plier aussi le bras en laissant flotter la main, un mouvement de la tête, mais il ne lui en restait que l'impression fugace qui subsiste des images rêvées. Ainsi sommes-nous -rires distincts, tics verbaux, attitudes caractéristiques, timbres uniques, gestes particuliers- loin du regard, de la présence, fantômes de nous-mêmes, un composé de sensations dont on retiendra tout, après notre départ, et qui restitueront l'essentiel de notre apparence aux amis pensifs.

    *(adpaté d'une lettre à un ami, qu'on nommera ici JM)

  • L'élégance du hérisson

     

    Muriel Barbery. NRF. Gallimard.

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    Il est difficile de juger impartialement un livre dont le succès de librairie n'est pas dû à une opération de marketing tonitruante, mais bel et bien au bouche-à-oreille. Lentement mais sûrement, on a vu le deuxième roman de Muriel Barbery (après Une gourmandise) grimper au hit-parade des ventes, remporter le prix du Rotary (oui, je sais...) et celui des libraires (ça aussi, pas de quoi se réjouir : les libraires sont assez sensibles aux qualités d'un bouquin qui se vend bien).

    C'est donc avec une certaine mauvaise humeur que j'en ai commencé la lecture. Parce que ce genre de littérature est, en général, très éloigné des exigences que j'ai pour un livre, et son succès en dit souvent plus sur la société qui en fait le succès que sur le sujet lui-même.

    L'histoire est celle d'une concierge, madame Michel, autodidacte et subtile dont la culture ferait pâlir Philippe Sollers, Umberto Ecco et Michel Serres réunis, et qui, parce qu'elle se soumet elle-même aux stéréotypes de la société, cache sous une apparence fruste et populaire, sa nature vive et profonde (l'élégance du hérisson). Ses réflexions érudites au quotidien sont entrecoupées du journal intime d'une fille de bourges surdouée, prénommée Paloma, qui projette de se suicider. On devine dès lors avec un certain agacement que la fin sera : madame Michel va mourir, et la leçon de vie qu'elle aura donné à sa petite copine Paloma décidera cette dernière à continuer de vivre. Gagné, c'est exactement ce qui va se passer. De mauvaise humeur, je vous dis.

    En fait, ce n'est pas mauvais, il y a même des percées vraiment magnifiques, des moments de vraie littérature, des phrases sur lesquelles on revient, comme ce passage où la concierge, apprenant la mort d'un locataire de son immeuble, médite sur cette idée de l'Art comme un secours face à la cruauté du destin : « Ces jours-là, vous avez désespérément besoin d'Art. Vous aspirez ardemment à renouer avec votre illusion spirituelle, vous souhaitez passionnément que quelque chose vous sauve des destins biologiques pour que toute poésie et toute grandeur ne soient pas évincées de ce monde. » Je trouve très belle cette notion de sa propre « illusion spirituelle ».

    Il y a beaucoup de beaux éclats de cette facture dans le roman. Mais c'est le principe et l'argument qui me gênent. Je vais tenter de dire pourquoi.

    Quel est le sujet du livre, au fond ? Ne jamais se fier aux apparences ? C'est du niveau de la problématique disneyenne (la belle et la bête, Shrek (OK, c'est pas Disney), etc.), mais pourquoi pas ? Sauf que, au fil de la description des locataires de l'immeuble et des personnages qui gravitent autour, Muriel Barbery ne fait qu'aligner des stéréotypes. C'est un livre qu'elle a écrit, peut-être, pour lutter contre ce qu'elle devinait de convenu dans sa conception des êtres. Raté : la concierge tellement intelligente et cultivée que c'en est grotesque (aucune lacune, dans aucun domaine), dessine en creux, le portrait que se fait l'auteur de ce qu'est véritablement une concierge, à ses yeux comme aux yeux de tout le monde et du coup, crédibilise et conforte la vérité du stéréotype ; le locataire japonais fut, comme par hasard, représentant de matériel hi-fi de pointe (un spécialiste de l'enfumage du jambon nous aurait surpris davantage), il aime le thé, a un goût raffiné, aime les films d'Ozu (dans le Japon actuel, autant dire que c'est une antiquité) ; la jeune bourgeoise suicidaire (trois mots qui forment déjà un stéréotype) est en révolte contre ses parents, comprend les jeunes qui brûlent des voitures, se complaît dans la description des plaisirs minuscules (bref, c'est la petite soeur de Vincent Delerme, quoi) et ne supporte pas l'hypocrisie de son monde ; le critique gastronomique est condescendant, le clochard est céleste, les chats roupillent... Pour lutter contre les préjugés, il me semble que « boule de suif » va plus loin et « la tache » est un point ultime, sauf que l'un et l'autre ne gueulent pas leur message dès le premier chapitre.

    Alors pourquoi un tel succès ? D'abord je l'ai dit, il y a de jolis moments dans ce livre, et une réelle qualité d'écriture (trop sage pour mon goût, mais ce n'est pas l'essentiel) ; ensuite, je me demande si, quelque part, la figure de cette autodidacte secrète, dont le savoir s'étend à peu près à tous les domaines des sciences humaines, n'est pas l'exacte figure du héros contemporain. L'accès à l'information, au savoir encyclopédique et immédiat que le monde actuel nous permet, nous laisse croire que nous sommes tous, peu ou prou, des madame Michel : extraordinairement cultivés, capables de comprendre ou dialoguer avec les spécialistes de tous bords, les Claude Hagège, les Derrida, les Coppens, les Wolton... plus rien ne semble hors de portée des autodidactes que nous sommes.

    Dans le secret de son écriture, Muriel Barbery a sans doute cru à son sujet sincèrement, mais elle s'est laissée rattraper par ses démons. Grand bien lui fasse : les lecteurs sont à l'unisson.

    Enfin, tout ça nous fera un bon film de divertissement, dans un an ou deux, avec un rôle écrit pour Catherine Jacob. Les paris sont ouverts.

  • Soyons justes

    Oui, tout de même, soyons justes... Une fois n'est pas coutume, et pour faire preuve de bonne volonté, de jugement non-dogmatique, je voudrais saluer les paroles de Sarkozy à propos du Myanmar (euh, non : de la Birmanie).

    A ma connaissance, c'est la première fois, dans les annales politico-financières, qu'un président de la République française ose demander à une énorme entreprise française de s'interroger sur ses relations avec le pouvoir dictatorial en place. En nommant l'entreprise, qui plus est, en public : Total.

    Total qui soutient depuis des années la junte militaire, avec un cynisme inexcusable et la beinveillante négligence de l'Etat français.

    L'info est déjà ancienne, dans le flux continu et amnésique de l'actualité, mais je voulais souligner cet acte vraiment neuf.

    Si malgré tout, quelqu'un a l'exemple d'un tel courage poltique, même chez de Gaulle, je suis preneur. Mais je connais déjà la réponse. Bon, ça fera une croix dans la colonne "actif" de l'hyperprésident.

  • A Lyon aussi

    Michel Onfray fait des émules. Sa fameuse Université populaire de Caen qui délivre chaque année des cours gratuits, et ouverts à tous, sans inscriptions, sans exigence de diplômes ou de niveau, a son équivalent à Lyon.

  • Le cauchemar passé...

    Voilà qu'on se retrouve à 3 heures du matin, dans une de ces insomnies irrémédiables.

    Un cauchemar où je vois mes enfants, où je me dispute avec eux et le réveil me laisse avec une sensation brutale de tristesse. Ils sont au chômage depuis longtemps l'un et l'autre, et je rumine le tragique de leurs pensées, quand, dans une nuit identique à celle-ci, ils ouvrent les yeux dans l'obscurité pour s'interroger sur leur place dans le monde. Un monde qui ne conçoit pas d'identité sans celle que confère le travail. Je suis malheureux pour eux. Je me refuse à les harceler en les culpabilisant davantage : "Alors, tu vas trouver un boulot, oui ? Tu vas te remuer un peu ?" parce que c'est tellement difficile. Le plus dur est d'être impuissant dans cette société qui s'exprime chaque jour davantage sous des formes brutales.

    J'écris un peu, en attendant l'aube. Et pourquoi pas sur Kronix, tiens. Cette nuit, je pense à tous les amis et proches, giflés par la brutalité du monde. Je pense à ces garçons intelligents, subtils, doux et honnêtes, que leur solitude désespère. Je pense à ces femmes, déjà plongées dans une vie dure, courant entre enfant sans père et travail sans repos, et qui se voient condamnées à trimer ainsi jusqu'à la mort par épuisement, sans qu'aucun répit radieux leur soit accordé. Je pense à ce vieillard décharné qui hante nos rues et beugle sa folie de clochard pendant des heures. Je pense à cet ami précieux qui quitte sa femme et se trouve devant l'abîme d'une vie nouvelle certes, mais seul.

    Je ne suis plus triste, mais je sens le poids de toutes ces solitudes. Et je mesure mieux ma chance. Je la souhaite à mes enfants, je vous la souhaite à tous.

  • Une décision par semaine

    Cette fois, ça y est, c'est décidé : grâce au précieux concours de ma douce compagne, je vais envoyer mes deux derniers romans aux éditeurs. En plus, un autre ami (éditeur, mais pas du genre de littérature que je produis), va envoyer mes manuscrits de son côté, avec ses recommandations.

    Bon. Autant d'occasions de subir des échecs, mais il se trouve qu'à mon âge, on s'en fiche un peu.

    Evidemment, je vous tiens au courant.

  • De la justice au niveau local

    La quarantaine, très riche. Il conduit en état d'ivresse et est contrôlé après un énième dépassement de vitesse, avec un fort taux d'alcoolémie pour la deuxième fois, par la police nationale, quelque part dans notre bonne ville. Monsieur se met en colère, proteste, fait du grabuge. On l'emmène "au poste".

    Là, nouveaux incidents, la colère du chauffeur n'est pas apaisée, il cogne les policiers, défonce une baie vitrée, balaie un peu de matériel de bureau.

    Tout le monde se dit "cette fois, bonne famille ou pas, il va casquer". Ben oui, sauf que papa, avocat à la tretraite, sait s'y prendre... Résultat : 100 euros d'amende et une peine avec sursis.

    Je me souviens de ces jeunes étudiants qui ont manifesté contre le CPE, à l'époque où Super Machin était encore ministre de l'intérieur. Ils ont juste manifesté contre une loi qu'ils désaprouvaient, et se sont fait embarquer. Verdict : Prison ferme, amende et enregistrement de leur ADN.

    Non, rien, c'était juste comme ça... Sinon, tout va bien ? La digestion est bonne ?

  • Pourquoi ?

    Pourquoi, mais Pûurquoâ ?

    L'hiver s'annonce, il est temps de retourner son matelas. Côté hiver. Le côté hiver, sur un matelas est, crois-je me souvenir, celui du côté duquel se trouve le bandeau. C'est un bout de papier plastifié cousu dans un angle, avec la marque et en général une blonde en chemise de nuit, il peut encore y être indiqué les cotes du matelas, ses diverses caractéristiques.

    Chaque année, je me demande si je retourne bien ma literie dans le bon sens... Tout ça parce qu'il n'y a personne, pas un employé, pas un responsable, pas un vendeur, pas un designer, dans aucune entreprise où l'on fabrique ce produit (très cher) depuis des décennies, qui se soit dit un jour : "et si, en plus de la nana, en plus de la marque, du nombre de ressorts et de couches de feutre, d'ouate et de machins, on marquait là, en petit : côté hiver ? Comme ça, les gens n'auraient pas à se demander..."

    Nan, trop simple, trop facile, trop pratique.

     

  • Parano ? Ya !

    Bon. Hum... Je ne crois pas à la conspiration, jenecroispasàlaconspiration jenecroispasàlaconspiration jenecroispasàlaconspiration jenecroispasàlaconspiration... mais depuis lundi, après avoir revu le documentaire que je vous présentais en ricanant, je me suis intéressé, intrigué et... je deviens vraiment parano. J'évite pourtant toute exaltation :

    http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=6692

  • 11 septembre : reprenez un peu de parano

    Evidemment, c'est trop. Mais ce que je retiens de tout ça, est qu'il est toujours possible de douter, et de trouver des preuves pour douter...

    Lee Harvey Oswald, la théorie de l'évolution... On peut tout revoir à l'aune de la paranoïa.

     

    A voir, pour réfléchir sur le concept du doute.

     

  • Communiqué de la Ligue des Droits de l'Homme

    Des tests ADN pour les demandeurs de visas :

    les étrangers sont-ils des êtres humains de seconde zone ?

    Des tests ADN pour les demandeurs de visas : l’amendement au projet de loi « maîtrise de l’immigration » qui vient d’être adopté par la commission des lois de l’Assemblée nationale apporte une nouvelle pierre à l’édifice de la rupture avec le droit commun et avec les principes de la République.

    Il s’agit de « proposer » (sic) aux demandeurs de visas de faire effectuer, à leurs frais, un test ADN pour obtenir une empreinte génétique prouvant leur filiation. Faut-il rappeler que l’article 16 du Code civil interdit formellement toute « étude génétique des caractéristiques d’une personne » sauf « à des fins médicales ou de recherche scientifique » ? Seul un magistrat peut ordonner le recours aux empreintes génétiques pour établir une filiation. Mais ce qui est bon pour les Européens ne l’est plus pour certaines catégories d’étrangers qui relèvent apparemment d’une immigration que la majorité parlementaire ne veut plus « subir ».

    Dérogation au droit commun, traitement discriminatoire… à plus d’un titre : ces analyses coûtant plusieurs centaines d’euros, on voit aisément quel genre de tri entre les demandeurs elles permettront, alors surtout qu’il faudra déjà, si le projet est adopté, payer des études de français avant de prétendre obtenir un visa. Etre un immigré « choisi » ne sera pas donné à toutes les bourses.

    Quant à l’hypocrisie qui consiste à prétendre que le test ADN ne sera que « proposé » et non imposé, elle ne trompe évidemment personne : nul ne sera obligé de passer le test… ni d’obtenir un visa.

    Chaque semaine, ou peu s’en faut, apporte désormais son lot d’innovations « décomplexées » qu’aucune hésitation, aucun scrupule ne semble pouvoir retenir. Jusqu’où notre pays sera-t-il ainsi entraîné sur la voie du refus de l’autre, de la stigmatisation et de la suspicion généralisée ?

    La Ligue des droits de l’Homme appelle l’ensemble des parlementaires à mesurer les risques que cet emballement incontrôlé fait courir, à plus ou moins brève échéance, aux valeurs de la République et à la cohésion de la société française.

  • Nouvelles vérités

    On ne l'arrête plus, le bougre !

    La treizième fournée des vérités d'Hérald est annoncée. Extraits :

     

    DCXII – Je viens de passer dix minutes avec les bras croisés et les sourcils froncés, mais manifestement, ça n’impressionne pas l’inspiration.

    DCXIII – *Fronce les sourcils plus fort*

    DCXIV – Note pour plus tard… Froncer les sourcils longtemps ne permet pas d’attraper l’inspiration. Une bonne migraine, en revanche...

  • Gilgamesh

    f74c1cf93bf661b555b58674bad871ed.jpgAdapté par Léo Scheer. Editions Léo Scheer.

     

    L'épopée de Gilgamesh est le tout premier roman de l'histoire mais, du haut de ces 3500 ans, il vous flanque la gifle bienveillante du patriarche.  La lecture de l'aventure du roi d'Uruk a ceci de particulier, qu'elle vous renvoie à tous les textes fondateurs que vous avez déjà pu lire ou parcourir.

    Le déluge ? Dans Gilgamesh. Les lamentations d'Achille sur le corps de Patrocle ? Dans Gilgamesh. Les travaux d'Hercule ? Dans Gilgamesh. Lilith ? Dans Gilgamesh. L'Odyssée, L'Ecclésiaste (des passages) ? Idem.

    On n'en finit pas de retrouver les types et structures de tous les récits. Et on est épaté par la nouveauté, l'originalité de certains passages. par exemple, j'ai été abasourdi de découvrir que Gilgamesh commence par un flash back !

    La scène est écrite comme l'ouverture d'un film : au fond du temple d'Ishtar, dans un coffre de cuivre vérouillé, caché, et à l'intérieur d'un tiroir secret, est enfermé une tablette de lazulite sur laquelle est gravée l'épopée de Gilgamesh. Et l'histoire peut commencer.

    Gilgamesh n'est pas tout de suite un héros positif : c'est un mauvais roi. Sa force immense lui confère un pouvoir indiscuté : il sait que personne ne peut se mesurer à lui, il se bat avec les garçons, les tue souvent, il couche avec les filles, exerce un droit de cuissage systématiquement. Ses sujets en ont assez et se plaignent aux dieux.

    Rebondissement assez inattendu : les dieux créent un double de Gilgamesh, Enkidu, aussi puissant que lui, mais vivant innocemment au milieu des animaux (tiens j'y pense : voilà Tarzan. On n'a vraiment rien inventé). Apprenant l'existence d'un monstre velu et puissant, Gilgamesh lui envoie d'abord une courtisane. La Joyeuse (c'est le nom de la prostituée) séduit Enkidu et l'invite à la luxure la plus débridée. Ils font l'amour 6 jours et 7 nuits, après quoi, Enkidu se sent tout de même un peu fatigué (on ne dit rien de l'état de la Joyeuse). Rassasié d'amour, rasé et habillé de frais par les soins de la prostituée (tiens, la prostituée au grand coeur : voilà Irma la douce), Enkidu se laisse convaincre de rejoindre Uruk, la cité de Gilgamesh, et la civilisation. Là, des noces se préparent, et Enkidu apprend que le roi, Gilgamesh, l'insatiable, va venir exiger son droit de cuissage sur la future mariée. Indigné, Enkidu barre le passage à Gilgamesh, et une lutte titanesque commence. Les deux adversaires sont de force égale et le combat dure longtemps. Enfin, les deux hommes-jumeaux deviennent amis.

    Les deux amis vont partager encore quelques aventures, mais malheureusement Enkidu finit par mourir. Gilgamesh, inconsolable, veut comprendre pourquoi Enkidu est mort, pourquoi lui aussi, comme tous les hommes, risque de mourir un jour. Un seul homme connaît la réponse : Ut-Napishtim, seul survivant du déluge, seul homme auquel les dieux ont offert l'immortalité. Et je n'en raconterais pas plus.

    Permettez-moi seulement d'insister sur quelques aspects remarquables :

    La sensualité torride de certains passages "viens, jouissons de ta vigueur, avance ta tête pour m'embrasser entre les cuisses".

    La quête désespérée de Gilgamesh que tout le monde traite de fou, et qui revient enfin chez lui, le coeur en paix et bienveillant envers ses sujets, parce qu'il a compris que vouloir échapper à la mort était une folie.

    Les procédés narratifs très modernes : pensées de chacun, dialogues, descriptions poétiques, récit alterné.

    Le récit du déluge par Ut-Napishtim a inspiré nettement celui de la Bible, à une notable différence : dans la religion sumérienne, les dieux, assistant au terrible carnage qu'ils ont déclenché, pleurent : ils regrettent. Notable différence, disais-je.

    L'édition présentée est une version dépouillée des nombreuses répétitions et de la contextualisation érudite des versions précédentes. ca ne coûte que 15 euros. C'est très vite lu. Bonne lecture.

     

     

  • Le Planctole va-t-il nous sauver ?

    Grâce à Philippe Caza, écologiste intelligent et malicieux en plus d'être le grand dessineux de Bd qu'on connaît, cette info (déjà ancienne, mais j'avais pas su...) qui mérite d'être promulguée : 
    Une entreprise espagnole développe un combustible dérivé du plancton.
    La matière première de ce nouveau combustible est un type de phytoplancton renfermant une concentration importante de matière grasse (20% : pour comparaison, la graine de tournesol n'en renferme que 0,1%) d'où gros pouvoir énergétique. La production est basée sur le processus tout naturel de la photosynthèse. La culture de ces cellules végétales, qui se reproduisent par mitose, se réalise dans des circuits d'eau fermés, exposés à la lumière solaire et en présence d'un air chargé en dioxyde de carbone (CO2) afin d'optimiser leur développement.
    Voilà qui est intéressant : une production de carburant qui userait du CO2 au lieu d'en émettre ! La proximité d'un site industriel émetteur de CO2 serait donc une situation privilégiée pour cultiver le phytoplancton à oil. (J'ai pas dit à poil : à oyle, du pétrole, quoi, ou du planctole.)
    Selon les estimations des estimateurs, ce biocombustible coûterait entre 25 et 35 centimes le litre, soit un euro avec les taxes, ce qui est comparable au prix du diesel. Mais ce carburant ne pollue pas et contribue à lutter contre les émissions de gaz à effet de serre en ce sens qu'il en boufferait à la production autant qu'il en émettrait à la consommation. Bilan neutre, donc.
    La culture de microalgues nécessite également beaucoup moins d'espace que les autres cultures de "bio"carburant. Une surface exploitable de 52 000 km2 permettrait d'obtenir 95 millions de barils par jour, soit la production mondiale de pétrole !
    Si l'étape suivante du projet, prévue fin 2006 (raffinage et tests sur véhicules) a été menée à bien, le plancton-carburant (algoil ?) serait ensuite commercialisable fin 2007.
    Sources : El Mundo, 20/07/06

  • Le refus

    Imre Kertész

    Te26c80b55047b9ecf006095701a566c4.jpgraduit du hongrois par Natalia Zaremba-Huzvai. Chez Actes Sud. Collection BABEL.

    "Le vieux se tenait devant le secrétaire"

    "Le vieux" est écrivain. Ecrivain hongrois d'origine juive, et il ressemble beaucoup à Kertész. Dans la hongrie pro-stalinienne, un écrivain digne de ce nom a des difficultés. Notamment pour être édité. Le refus, est celui des éditeurs qui rejettent son roman : "Etre sans dépit". "Le refus" est aussi le volet central d'un triptyque composé de "Etre sans dépit" (justement) et qui s'achève avec "Kaddish pour l'enfant qui ne naîtra pas".

    Le début du roman est une passionnante analyse de l'acte d'écrire comme une fatalité, une évidence de la nature qu'il ne s'agit pas de sublimer ou de maudire, et que même l'écrivant ne peut que constater. Ensuite, l'auteur cesse son introspection, parce que, forcément, l'écriture commande et, reprenant de vieilles notes, écrit l'histoire d'un auteur appelé Köves, venu de l'étranger, débarquant dans son pays natal. Et le roman psychologique devient cauchemar kafkaïen, déambulation joycienne.

    Né à Budapest en 1929, déporté en 1944, Kertész a reçu le prix Nobel de littérature en 2002.

    "Il referma dessus ses doigts tremblants et insensibles et le serrera sûrement à l'instant du dernier, de l'ultime élan -quand il tombera sans vie de sa chaise devant son secrétaire."